Malemort

Le 25 octobre 2022 posté par Metalfreak

Interviewer : Jaymz
Interviewé : Xavier Napora (Chant)

Malemort

Interview de Xavier « Malemort » Napora, chanteur, leader et principal compositeur de Malemort.
Réalisé par Jaymz pour Soil Chronicles, le Samedi 22 Octobre 22, via Messenger (off) et Zoom (40 mins, Officiel).
Interview passionnée et passionnante entre 2 passionnés !

Xavier, commence par nous présenter le groupe et leur 3eme album « Château Chimères » :
C’est le point d’équilibre vers lequel on voulait arriver avec le groupe (NDLR : composé aujourd’hui uniquement des guitaristes Sébastien Berne (également aux claviers) & Sébastien Lafaye, déjà présents sur Ball Trap, précédent opus datant 2017). Certains commentateurs parlent d’une synthèse du côté aventureux du premier disque (French Romances en 2013) avec la maitrise technique du 2eme (Ball Trap en 2017). J’y ajouterai même une dimension cinématographique.
Jaymz rebondit sur le terme cinématographique :
Le côté cinématographique qu’on retrouve dès le premier single « Quelle sorte d’hommes » sorti il y a 6 mois dont le clip fait forcément référence à ces films de « bonhomme » des années 50/60 : Les tontons flingueurs, un singe en hiver dont tu es fan, je le sais. De fait, ce « Château Chimères » fait référence au château d’Hérouville, où le premier home studio français a été monté par Michel Magne, compositeur de la fameuse musique des tontons flingueurs, entre autres.

Et Xavier de nous expliquer « qu’il se trouve que j’habite à 3 mins d’Hérouville dans le val d’Oise. A la fin des années 60, début 70, ce château devient le premier studio résidence au monde, c’est-à-dire un endroit où les musiciens pouvaient non seulement enregistrer et créer, mais aussi y vivre. Cela nous parait naturel aujourd’hui mais l’époque les musiciens allaient enregistrer dans des studios en ville, avec des horaires de bureau. Forcément après 68, les artistes ne goutaient guère plus à ce format, alors quand Michel Magne a racheté le château, pour y monter le studio, il a rapidement proposé à des groupes de venir enregistrer. Si les Français ne sont pas sentis concernés, les anglo-saxons ont adhéré tout de suite. En effet, pouvoir profiter d’un chef étoilé, de grands crus classés pendant les repas, puis de l’immense parc du château, les Anglais ont adoré cela ! Bowie, Iggy Pop, Elton John, les Pink Floyd sont tous passés par le château d’Hérouville. »

Jaymz : « Château Chimères » Chimères avec un s car il y en a eu beaucoup, donc beaucoup d’histoires différentes à raconter tout au long de ce nouvel album concept, après « Ball Trap » dans les années folles, revoilà Malemort et cette fois-ci dans les années 70. Pour les chanceux comme moi, qui, grâce à leur participation à la cagnotte, ont pu obtenir le fameux grimoire de 30 pages qui l’illustre toute l’histoire, tout est expliqué dedans ! Si on peut écouter apprécier l’album sans, la lecture du Grimoire amène une profondeur dans l’écoute, comme des sous-titres posés sur chaque morceau. Ma question sera donc la suivante : Comment faites-vous pour caler votre musique sur l’histoire ? et vice versa.
On compose la musique avec Sébastien Berne (guitariste et claviériste). C’est toute la difficulté du truc, mais j’ai observé que travailler avec un maximum de contraintes te permet d’être plus créatif. Cela t’aide un peu à avoir un cadre, quitte à trouver des voies de contournement. Donc 11 morceaux – plus un instrumental, le fabuleux « décembre » NLDR – et donc 11 histoires à raconter, liés à 11 personnes différents. Il fallait donc imaginer à qui chaque compo devait correspondre dès le départ mais aussi où le caser dans l’histoire d’Hérouville. Par exemple « Sémaphores » – l’histoire de Bowie et d’Iggy NDLR – c’est dans la 2eme partie de l’histoire du château, donc forcément dans la 2eme partie de l’album.

 

Jaymz : l’une des grandes forces de Malemort, sur « Ball Trap » et encore davantage sur « Château Chimères » c’est votre capacité à écrire de très bonnes chansons, accrocheuses, qui s’écoutent très bien seules et qui sont sublimées quand on écoute les albums d’une traite, ce qu’on n’a pas toujours le temps de faire.
J’ai une méfiance naturelle vers le concept album, car certains sont vraiment bidons. Ma religion, c’est d’écrire des bonnes chansons avec l’ambition de proposer une histoire à dérouler et ce depuis 2 albums. L’idée de proposer une dimension supplémentaire quand on écoute l’histoire en entier. Si on te découvre par une unique chanson, il faut que celle-ci ait du sens. Maintenant, je crois beaucoup aux disques, même en cette période de dématérialisé. Construire un disque complet permet aux artistes de rester libres. L’album c’est qui a permis au rock de devenir quelque chose de plus complexe, de plus subtil, qu’une simple succession de singles. Avant les Beatles, l’album sortait après une volée de singles, qu’on assemblait les uns après les autres. Pink Floyd par exemple n’aurait jamais existé sans l’album. Il faut accepter qu’il y ait quelques morceaux qui soient immédiats, et d’autres plus complexes, moins convenus. L’album c’est un terrain de jeu très très large.

 

Jaymz : Ce que j’aime dans le Metal, c’est la palette de styles qu’il peut proposer. J’ai du mal à écouter des albums monostyles et chez Malemort, il y a une patte particulière entre chansons à texte en français aux refrains immédiats et entêtants, et Heavy Metal / Hard rock léché et c’est cela que j’adore ! Du maidenien « quelle sorte d’hommes », au folk de « je m’en irai », en passant par le punk mélo des « grands ducs » pour culminer sur le génial « Sémaphores » avec ces cuivres, la diversité et la créativité de Malemort fait encore mouche sur cet album.
La diversité n’est pas une démarche tape à l’œil. Ce qui compte avant tout c’est la qualité de la chanson. Par rapport aux mélanges de style, je considère que lorsque tu crées, tu te dois de proposer quelque chose de différent de ce qui existe déjà, sinon tu auras toujours des groupes meilleurs que toi. On parlait en off de Queen, qui n’a jamais cessé d’être un groupe de rock alors qu’ils ont fait des incursions dans à peu près tous les styles. Il y a bien sûr eu quelques loupés, mais il y a toujours eu une énorme intensité dans ce qu’il proposait. Queen, cela reste absolument génial !

 

Jaymz : et bien qu’ils aient touché à tout et soient classés pop rock, Brian May (guitariste et principal compositeur de Queen avec Freddy Mercury NDLR) est très souvent cité comme influence majeur par de nombreux groupes de Metal.
J’aime bien l’idée qu’à un moment donné, on n’est plus besoin de classer un groupe. J’aime bien l’idée de dire que Queen fait du Queen. Ma grande fierté c’est de ne pas avoir de noms associés à notre groupe dans Rock Hard. Ce n’est pas de l’orgueil mal placé, c’est juste la fierté de dire qu’à un moment, on a proposé notre version de la musique. Les gens qui écoutent l’album font expérimenter quelque chose de différent.
Je suis de la même génération que toi, j’ai grandi dans les années 90, une décennie que je trouve passionnante, car on sort du Metal des années 80, où le Heavy Metal règne en maitre vers une décennie compliquée pour le Metal mais en même temps très riche car on est venus ajouter plein de choses à la musique Metal. Les années 90 ont amené une diversité dans notre style en le nourrissant de plein de choses différentes. Je ne vois pas en quoi les grands standards comme Metallica, Judas Priest, Iron Maiden, sont incompatibles avec une approche plus rock’n’roll à la Guns’n’Roses par exemple, du moment que tu es sincère dans ton écriture et que tu trouves une sorte d’équilibre dans tout ça. C’est à mon avis ce qu’on arrive à faire dans Malemort.

Jaymz : Ce que j’ai retenu quand je vous ai découverts avec « Ball Trap » c’est que dans ta biographie sur votre site, tu t’inspirais aussi bien de Brassens et d’Higelin, que Metallica ou Judas Priest et pour moi, c’est la meilleure définition de Malemort. Sans oublier une science du refrain fédérateur comme « Cabaret Voltaire » ou « Carnaval Cannibal » sur « Ball Trap », alors forcément on vous attendait là-dessus sur « Château Chimères » et on n’a pas été déçus !
C’est 2 choses qui sont parfois séparés dans les groupes que j’écoute. C’est le fait d’expérimenter des choses et d’avoir des titres très accrocheurs. Je me plais à penser qu’on peut réunir les 2. Expérimenté mais fédéré en même temps, c’est toute la difficulté. Trouver l’équilibre entre les 2, ce n’est pas simple. Trop fédérateur, la musique perd en saveur sur la longueur et quand on expérimente trop, on peut emmener l’auditeur trop loin et lui donner l’envie de partir.
Le refrain fédérateur cela vient de mes 2 sources d’inspiration : le Heavy Metal des Metallica et des Maiden avec une science du refrain et l’efficacité absolue d’un côté, et le rock et la chanson en général de l’autre, dans lequel tu ne proposes pas de chanson avec un refrain pourri. Je pense que sur ce 3eme album, avec Sébastien Berne, on avait dès le départ cette idée de bons morceaux mais qui devait avoir ce retour en bouche. Du coup, les guitares sont plus complexes que sur « Ball Trap ».

 

Jaymz : En effet, les guitares sont moins heavy que sur « Ball Trap » sauf sur « Pyromane Blues » qui est le morceau le plus bourrin que vous ayez écrit. Mais elles sont souvent doublées et sont plus subtiles. Et j’aime beaucoup les claviers qui sont utilisés avec parcimonie et justesse pour relever ou créer des ambiances. Comme sur « l’eau des fossés » ou le magnifique « Magnitude Pop » ou encore sur l’instrumental « Décembre ». D’ailleurs c’est le premier instrumental de Malemort. Pourquoi ? Comment ?
Alors, comme pour les albums concepts, je suis assez méfiant des instrumentaux. Bien sûr j’adore les classiques du genre comme « Orion » – de Metallica, sur l’album culte « Master of Puppets » NDLR – mais j’ai beaucoup de mal avec les instrumentaux prog qui tournent à la démonstration, ce qui n’est pas du tout ma conception de la musique. Sachant que mes 2 guitaristes sont fans de progs, il fallait être vigilant, mais nous nous sommes vite mis d’accord sur la couleur et la durée de cet instrumental. On a vraiment travaillé sur la limite à ne pas franchir pour que l’instru reste abordable pour tout le monde. C’était d’ailleurs un morceau sur lequel j’aurais dû chanter, mais Seb m’a dit que cette maquette pourrait faire une belle instru, alors on a continué sur cette voie.

 

Jaymz : et ce morceau « décembre » ferme le cercle et conclut brillamment l’histoire, de façon épique, comme un générique de fin d’un bon film, ce qui n’aurait certainement pas déplu à Michel Magne. Pour conclure, je voulais te parler que quelques autres groupes qui me passionnent en ce moment car grâce à Soil Chronicles, je m’intéresse assez à notre belle scène française. J’ai eu un gros coup de cœur en 2019 pour Magoyond, avec leur concept cabaret/Metal/Zombie, tu les connais ?
On se connait et on s’apprécie. C’est marrant que tu m’en parles car pendant notre journée de promo pour la sortie de l’album, il se trouve que Julien Escalas, chanteur de Magoyond, passait par là et on a pu discuter ensemble. On a une approche similaire de la musique et de la composition et il n’est pas impossible qu’on fasse quelque chose ensemble bientôt. Ils sont chaleureux et passionnés.
Jaymz : Il reste 2 mins alors on va conclure rapidement. Je voulais parler de Molybaron, mon gros cœur l’année dernière.
On est très potes, on a fait plusieurs dates ensemble et j’aime beaucoup leur 2 albums que je place dans les quelques albums français de la décennie. Et vous allez certainement nous voir ensemble sur quelques dates l’année prochaine !
Jaymz : Eh bien voilà une belle conclusion pour moi qui suis fan des 2 groupes. Mille mercis Xavier pour ton temps et à très vite « en vrai » j’espère.

 

BandCamp  Facebook  Site web  Twitter  YouTube
Chronique « French romance« 
Chronique « Balltrap« 
Chronique « Château Chimères« 
Live report Chambéry 2018

Retour en début de page

Laissez un commentaire

M'informer des réponses et commentaires sur cet article.

Markup Controls
Emoticons Smile Grin Sad Surprised Shocked Confused Cool Mad Razz Neutral Wink Lol Red Face Cry Evil Twisted Roll Exclaim Question Idea Arrow Mr Green