Photographes : bénévoles de l’association « Déclic Photos »
Rédacteur : Quantum
Paris, capitale de France. Nous sommes le vendredi 31 octobre et d’ordinaire, religieusement, je célèbre Halloween avec ma fille. Rompu à l’exercice périlleux et épuisant de la quête mystique aux bonbons dans les rues glauques de Fontaine, en banlieue de Grenoble, pour la première fois, j’échappe à ce rituel immuable mais avec finalement peu de regrets au départ. Ma fille grandit, la chasse aux bonbons n’a pas la même saveur sucré-salé qu’il y a quelques années, et je me dis qu’elle peut exceptionnellement se passer de moi pour le faire avec sa mère et ses copines. De plus, déambuler dans les rues de la métropole grenobloise en plein mois d’octobre, avec son lot de jeunes des cités excités (je vous mets au défi de le répéter rapidement plusieurs fois) et des autres jeunes déguisés en clowns tueurs (véridique), n’est pas finalement l’élément qui m’aurait le plus manqué. On se demande pourquoi n’est-ce-pas ? Et pourtant, arrivé en plein périphérique parisien, un soudain sentiment de nostalgie m’a parcouru l’échine, bloqué dans les embouteillages, découvrant par ailleurs qu’un bout de périphérique passait dans Paris intra-muros (le fameux périphérique intérieur). Que suis-je venu faire dans cette galère ? Que m’est-t-il passé par la tête de me lever aux aurores, de monter en région parisienne pour couvrir un festival ? Moi qui n’aime pas Paris, je me console alors comme je peux en me disant que le festival n’a pas lieu à Paris en elle-même, mais à Ecouen. Ville qui, sur le papier, a l’air en plus de cela charmante ! L’affiche aussi m’offre son gros lot de consolation, car l’enjeu est de taille : je ne connais pas un quart des groupes qui vont jouer, et dans le quart qu’il reste, je crois n’en avoir vu aucun en concert auparavant. Vous me direz, ce n’est pas déconnant vu que je ne monte jamais en région parisienne, encore moins pour des concerts, et que la seule potentielle opportunité pour que j’y monte, aurait été que mon groupe y joue, ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent. Mais au moins, ce festival annonce par avance son lot de découvertes et c’est l’élément qui m’excite le plus quand j’affronte vers midi les redoutables bouchons parisiens. Car il faut bien l’avouer, à ce moment précis, je cherche des excuses pour ne pas faire demi-tour et rentrer chez moi. Et ce n’est pas l’arrivée dans mon hôtel qui va me faire changer d’avis. Nota bene pour l’avenir : ne JAMAIS réserver un hôtel bon marché à Sarcelles. Au mieux, vous tombez sur un véritable taudis infect. Au pire, vous prenez le risque de tomber sur un hôtel de passe, ce qui m’est, j’en suis convaincu, arrivé ! C’est à ce moment là que j’ai pris la meilleure décision de mes deux jours sur place : j’ai abandonné cet hotel et j’en ai pris un autre bieeeeeeeeeen mieux, à Gonesse ! Bref. Vous l’aurez compris, mon arrivée à Ecouen ne fut pas de tout repos. Alors, intérieurement, j’espère vivement que ce Winter Rising Festival 2025 va tenir autant de promesses que notre bon Marquis Arthur ne l’avait entrevu l’année dernière quand il l’avait couvert seul. D’ailleurs, mon camarade ne nous rejoindra que le lendemain. Ce sera donc des bénévoles du festival qui nous prêtent des photos pour illustrer ce report du premier jour.
Petite présentation du festival qui nous intéresse aujourd’hui : le Winter Rising Festival prend pour sa neuvième édition (incroyable !) ses quartiers au nord-ouest de Paris, à Ecouen, célèbre ville pour son passage dans le film « Les Anges Gardiens » (on a les références qu’on mérite…) et son château que le lendemain, j’ai visité avec assiduité ! Le Marquis Arthur ne m’avait pas trompé : le château est superbe. Et le cadre du festival cette année l’est tout autant. Ce dernier est situé à la Grande à Dîmes qui, comme son nom l’indique, fait penser aux vieilles granges qui accueillaient les chevaux, avec un parvis en pierre magnifique et une sorte de cour intérieure qui se trouve au milieu d’une partie avec la salle de concerts, dont la jauge me semble assez grande, et un bâtiment accueillant le ravitaillement en boissons et les stands de merch. Situé en plein centre-ville, juste à côté de la mairie, le cadre est parfait en tous points, et les places de parking, contrairement à ce que je redoutais, étaient relativement accessibles. Concernant le festival en lui-même, j’ai cru comprendre qu’il était géré de deux mains de maîtres par les nommés Kévin Le-Bras et Thibault Barbelane, c’est d’ailleurs ce dernier qui m’accueillera gentiment et m’offrira l’accès plénier au festival pour que je puisse déambuler et prendre la température avant l’arrivée du peu de connaissances que j’ai sur place. J’aime ce rituel qui consiste à tout regarder, scruter, analyser avant que les réjouissances ne démarrent. On y voit des détails qu’on ne perçoit pas quand on est concentré sur sa tâche. Y compris les gens, les organisateurs et leur stress. Je me dis souvent à ce moment-là que cette passion commune du metal qui nous réunit, on se donne tellement de mal pour la faire vivre… D’autant plus concernant ce festival que l’affiche prend indéniablement de gros risques ! Exit les énormes groupes mainstream, ou les groupes français qu’on voit partout à en avoir la nausée. Ici, place aux groupes plus discrets, plus underground, quitte à aller les chercher sur d’autres continents. Sans compter que le festival donne manifestement sa chance à des formations jeunes et inexpérimentées, on le verra au deuxième jour. Voilà pourquoi, d’ores et déjà, le Winter Rising Festival mérite que l’on s’y penche de plus près. Parce que nous ne verrez pas les groupes, qui y jouent, forcément partout.
Enfin, le premier groupe aurait tendance à me faire mentir. Ecr.Linf a déjà joué dans pas mal d’endroits en France mais en ce qui me concerne, c’est bien la première fois que je vois en concert la formation parisienne dont le chanteur Krys Denhez est une connaissance sur Facebook que je suis, aussi bien d’ailleurs comme chanteur, acteur de la scène metal que comme chef du label Source Atone Records. J’avais beaucoup aimé « Belluaires » qui constitue à ce jour le seul album du groupe dont le nom signifie pour ceux qui l’ignoreraient « écrasons l’infâme » et dont l’abréviation était une signature de Voltaire dans ses lettres, pour inviter ses lecteurs à combattre l’obscurantisme. Un nom de groupe très intéressant qui à l’époque ne n’avait pas laissé indifférent du tout ! J’aime beaucoup ce genre de groupe qui fondent leurs univers artistiques sur des éléments qui questionnent et piquent ma curiosité. Concernant cette ouverture de festival, Ecr.Linf m’a conforté dans une importance capitale que beaucoup de groupes, à mon sens, dénigrent dans leurs shows : l’introduction. Le clavier, presque omniprésent sur l’ensemble du concert, lance les hostilités si j’ose dire de manière magistrale. Pourtant, les nappes de claviers ne sont pas spécialement hyper chiadées ! Mais ces sonorités me mettent littéralement les poils d’entrée de jeu, avec ce côté à la fois solennel et sombre qui rend magnifiquement bien et me met d’entrée de jeu dans un état d’esprit de profonde méditation. Je suis seul à porter les couleurs du webzine, ma compagne arrivera plus tard et je profite alors de cette ambiance si prenante qui est inhérente au genre black metal que propose Ecr.Linf ici. Il est très à l’air du temps d’ailleurs, ce black metal là ! Avec ce chant particulier, très sludgien, que l’on retrouve dans pas mal de formations actuelles en France (le roster des Acteurs de l’Ombre Productions en est truffé) et qui est chaque fois du plus bel effet. Les groupes français comme Ecr.Linf ont su conjuguer la froideur du black metal avec la torture du chant sludge metal et les parisiens ne font pas exception. Le décorum du concert en lui-même est plutôt sobre, le groupe faisant la part belle à un logo avec des bouts de bois acérés, que l’on retrouve par exemple sur un drap noir qui enveloppe le clavier ou un pied de micro, et évidemment quelques apparats bien liés au black metal, des peintures sur le visage par exemple. J’ai aimé le fait que chaque musicien soit dans sa bulle, le frontman Krys étant dans son personnage, dans une forme de méditation personnelle, qui finalement ne le fait pas plus que cela interagir avec nous mais honnêtement on s’en fout. Ecr.Linf est manifestement un appel à la transcendance, à l’égrégore. On vit le concert, on vit les mouvements de va-et-vient du chanteur qui nous hypnotise par sa présence, sa posture de réflexion qui, d’une certaine manière, rend un magnifique hommage à ces philosophes de jadis qui ont été la base séculaire d’une grande partie de notre façon de penser encore aujourd’hui. Le concert passera incroyablement vite tant j’ai été aspiré comme dans un tourbillon d’introspection. Je dis souvent en substance que ce n’est jamais facile d’ouvrir un festival. Franchement, ce jour-là, Ecr.Linf m’a tout simplement fait mentir et m’a donné une leçon C’est magnifique de se rendre compte qu’un groupe rend hommage aux Lumières… En faisant la musique la plus sombre qui soit. Excellente ouverture qui donne assurément le ton !
Après un tel concert d’ouverture, pour l’avoir moi-même déjà vécu, je ne peux m’empêcher de penser que prendre la suite va être ardu. Vous savez ! Cette sensation quand vous voyez la première partie avant vous, tout écraser sur son passage, et que vous avez cette petite montée de stress qui vous fait penser que vous allez galérer pour faire mieux. C’est exactement ce que je ressens avant de voir Ataraxie monter sur scène ! Je me dis « les pauvres… » C’était sans connaître vraiment Ataraxie en fait. D’ailleurs, que signifie « ataraxie » ? Encore un concept philosophique qui consiste en l’état de profonde quiétude, impliquant l’absence de tout trouble ou souffrance. Mais contrairement à ce que l’on croit, hormis pour certaines écoles philosophiques, l’ataraxie ne rime pas forcément avec bonheur. Car pour connaître l’état d’ataraxie, il faut selon d’autres écoles en passer par la souffrance, la privation et les émotions négatives. Alors, dans quel état d’esprit le groupe de Rouen Ataraxie va se présenter à nous ce soir ? Manifestement, on ne va pas beaucoup rigoler. Enfin si ! Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire quand Jonathan, le chanteur, parle avec sa petite voix pour nous présenter le groupe « Nous sommes Ataraxie… -ie ! » Car oui, il y a deux groupes qui portent le même nom ce soir-là ! Et cette petite voix timide contraste énormément avec la lourdeur extrême de la musique d’Ataraxie. La formation nous entraine rapidement, en effet, dans la lourdeur démentielle et moribonde d’un funeral doom metal énorme. Exit le chanteur timide ! Jonathan est totalement transformé par sa musique, écarquillant les yeux d’une manière effrayante pour déverser son growl extrême. Ses musiciens, dont j’ai reconnu quelques têtes comme Frédéric Patte-Brasseur à la guitare qui officie également dans Conviction et Julien Payan qui officie quant à lui dans Sordide et Void Paradigm (comme Jonathan Théry par ailleurs), sont concentrés dans leur musique car contrairement à ce que l’on croit, jouer du funeral doom metal demande une rigueur rythmique très impressionnante. Je ne suis donc pas surpris que les musiciens soient au diapason de leur batteur qui s’avère être d’une précision redoutable, y compris dans les passages plus rapides qui rappellent les heures anciennes du death metal. La musique funeral doom metal se veut, pour les non-initiés, extrêmement lourde et grave, le riffing étant principalement un jeu d’harmoniques entre les instruments à corde, voire carrément des balancements d’accords longs, très très longs. Le tout ayant pour but de planter un décor musical sombre et torturé au possible, en abordant souvent des thématiques autour de la condition humaine et de l’introspection dans la dépression par exemple. Il convient donc de préciser que ce style de musique est parfois difficile à avaler quand on ne connait pas bien. Il faut un degré d’adhésion plus élevé. Ici, Ataraxie me confirme ce que je pensais d’eux : ils sont les maîtres du genre en France, assurément. Outre le caractère sobre de la scénographie, il y a à la fois dans la musique et dans le concert en lui-même une sorte d’aspect progressif qui transparait, comme un cheminement lent vers la souffrance, comme si cette dernière suivait un chemin de plus en plus tortueux et la musique d’Ataraxie est exactement ce type de progression. La lenteur laisse de plus en plus place à la rapidité, la souffrance gagne du terrain de plus en plus vite et cette dépression majeure, on la retrouve également dans la posture des musiciens qui se laissent emporter eux-mêmes par cette marche progressive vers… Peut-être l’ataraxie finalement. Et nous, dans le public, nous resterons de marbre ou comme moi, nous serons bercés par la musique, transportés vers ce marasme qui a malgré tout un côté réconfortant. Ataraxie assurera donc un show maitrisé et entrainant, avec simplement deux morceaux mais bon ! Chacun durera en moyenne quinze ou vingt minutes, le temps pour nous de disparaitre dans un processus de méditation pour lequel, à titre personnel, je vais avoir un peu de mal à m’en remettre. Et rares sont les groupes qui me font entrer en méditation. Fantastique.
Changement radical de décor avec l’arrivée ensuite de Creeping Fear ! Il y aura beaucoup d’inconnus pour moi sur le Winter Rising Festival et Creeping Fear en fait partie. J’ai déjà entendu parler de la formation de Viroflay, non loin de Versailles, mais je n’avais ni écouté la musique ni vu la formation en concert. A peine sais-je qu’ils existent parce que j’ai en ami Facebook le leader de Dolorem Records qui est leur label. C’est donc sur des bases toutes neuves et fraiches (enfin, si on exclut les déflagrations précédentes et la bière forte vendue sur le festival) que je découvre donc la formation ce soir. A peine vis-je le t-shirt du frontman Clément que je compris tout de suite à quel genre de metal nous aurons à faire. Le look général est d’ailleurs très old school, aucun doute possible : Creeping Fear officie dans le death metal. Reste à savoir comment, avec quelle fioriture. Fiori… Quoi ? Noooooooooooon ! En fait, il n’y en a pas. Creeping Fear va littéralement tout dévaster sur son passage ! Dire que la musique death metal ici est d’une violence inouïe est un euphémisme. On est selon moi à la limite du brutal death metal avec des riffs très rapides, acérés, une batterie qui est une véritable mitraillette en blast beat et le son global sort des sentiers battus en étant un poil plus aigu que le death metal old school ne le laisserait transparaitre. Les musiciens sont totalement en transe, en bougeant comme des malades, le chanteur étant lui-même dans une posture de violence incroyable, dont l’agressivité transpire du visage très expressif de ce dernier. D’ailleurs, la foule commence vraiment à se chauffer sur Creeping Fear, après avoir été stoïque devant les deux précédents groupes. On attribuera le mérite au groupe des Yvelines d’avoir secoué le cocotier pour déclencher le public qui se prendra au jeu de ce virage à cent-quatre-vingt degrés. Moi-même, je suis plus attiré par le jeu de scène du frontman qui a une certaine présence, qui vit complètement la violence de sa musique death metal et qui n’est pas en reste pour haranguer la foule ! La musique en elle-même ne m’aura pas laissé un souvenir impérissable, même si je reconnais à l’instant précis où je suis dans la fosse, que le groupe est efficace et délivre un death metal très bien composé, peut-être un poil violent pour moi qui aime surtout le death metal old school, bien gras et un brin plus lent et lourd. Petit bémol d’ailleurs sur le chant pour lequel j’émets une réserve sur le fait de rester sur la même technique. Le chant fonctionne, en dehors de la rythmique opportune, un peu comme un encéphalogramme plat dans la technique vocale. C’est toujours la même, sans réel effort d’articulation, et cela, cela me dérange un peu. Je veux bien que la plupart des grands chanteurs de death metal ne brille ou ne brillaient pas dans l’effort effectué dans l’articulation, mais quand-même… Il y a parfois une certaine variation dans la technique vocale qui amène un truc. Là, notre ami Clément reste trop sur le même growl et cela m’ennuie au bout d’un moment. Pour faire vivre la musique de Creeping Fear qui est redoutablement violente, il aurait fallu autre chose au chant pour ne pas la dénaturer, d’autant que les techniques ne manquent pas pour accompagner les riffs. Donc, si on résume la prestation de Creeping Fear, objectivement parlant, le groupe est excellent dans sa musique et sa prestation, mais le chant m’a rapidement ennuyé et j’ai eu plus de mal à rentrer dans le délire d’ultraviolence du groupe. Peut-être la faute aussi au précédent groupe qui m’a mis dans une torpeur difficile à quitter, c’est possible. Du coup, à retenter une prochaine fois !
Vous vous souvenez qu’il y avait cette originalité d’avoir deux groupes du même nom ? Nous avions eu précédemment Ataraxie, voici venu Ataraxy ! Bien évidemment, les différences sont multiples. Ataraxy est le premier groupe étranger de cette édition puisqu’ils nous viennent d’Espagne, de Saragosse pour être plus précis. C’est là encore une totale découverte pour moi, Le quatuor se présente à nous avec beaucoup de sobriété, étant donné que le registre musical re-bascule dans une sorte de doom death metal bien macabre qui tranche avec le funeral doom metal de son homonyme français. Sobriété que pourtant, le batteur ne suit pas du tout à la lettre et il sera d’ailleurs l’attraction de la prestation de son groupe ! Littéralement, je vais briser le suspense tout de suite : c’est mon énorme coup de cœur du festival ! Mais à un point que je n’aurais jamais imaginé en arrivant ici. Je partais sur des bases neuves là aussi, j’étais loin, très loin de me douter que j’allais prendre une claque pareille. Il faut d’ailleurs préciser que ma compagne m’a rejoint à ce moment-là et elle aussi a pris la claque de son week-end. Je ne l’avais jamais encore vue bouger comme cela, c’est simple ! Enfin… « Bouger » est un grand mot, disons plutôt « être en transe ». Le doom death metal proposé par Ataraxy rappelle indéniablement les grands groupes actuels du genre comme Krypts ou Rotten Tomb, avec cette lenteur extrêmement pesante, cette lourdeur riffique exceptionnellement oppressante et ce chant guttural incroyablement caverneux que le chanteur exécute avec une facilité et une décontraction déconcertante. C’est fou comme un groupe comme Ataraxy peut retranscrire une morbidité extrême sans fioriture aucune, presque avec nonchalance, juste par la présence et la musique ! C’est un truc qui m’a toujours laissé pantois d’admiration. Les compositions se veulent d’une oppression totale et d’une lourdeur incroyable. Et quand viennent les fameuses accélérations, plus death metal, alors là, c’est l’explosion ! Le public est littéralement devenu fou ! On retrouve tout de même ce caractère progressif, comme un cheminement psychique qui conduit à la crise, à l’amok. Alors, pourquoi je parlais du batteur en amont ? Parce que le type, s’il n’était pas sous acide ou autre substance euphorisante, je ne l’aurais jamais cru s’il m’avait juré le contraire. Outre son costume délirant de squelette, comme pour Halloween, il est totalement dingue. Il cogne sur ses futs comme si sa vie en dépendait, en ayant en plus ce sourire bizarre, comme le gamin qui s’éclate à la foire, cette folie qui le rend au pire ridicule, au mieux totalement étrange. Et c’est là que je trouve son jeu de scène pas si déconnant que cela ! Parce que si l’on part du principe qu’Ataraxy nous conduit vers une forme d’amok, de folie furieuse, le batteur a un rôle plus burlesque qui le rend tout aussi dérangeant, mais qui rappelle que la Folie a un côté insondable et dérangeant qui le rend finalement totalement crédible ! Bon, honnêtement, je cherche une excuse pour comprendre son comportement, mais en vérité, je comprendrais que certains trouvent cela un peu hors sujet, surtout pour le costume. Pour ma part, j’ai été totalement happé par la musique, qui m’a remué les tripes et l’âme et m’a conduit dans cette explosion d’émotions qui m’a l’espace d’un instant fait perdre la raison. Énorme coup de cœur pour moi donc !

Quoi ? Vous pensiez qu’on avait atteint le paroxysme de la soirée ? Que nenni ! Car les patrons du death metal français arrivent et croyez-moi, nous n’irons pas faire du poney avec eux. Vous le croyez ou pas, compte tenu de la notoriété de Mercyless, je ne les ai encore jamais vus en concert ! Écoutés en CD, oui bien entendu, mais pas non plus tant que cela. En vérité, j’ai beaucoup de retard sur le death metal français, je m’étais ainsi dit que voir pour la première fois Mercyless en concert me permettrait de rattraper mon retard puisqu’il s’agit ni plus ni moins du groupe ayant eu le plus de notoriété par le passé dans ce registre en France, et qui continue encore aujourd’hui d’entretenir sa légende. On ne présente plus le groupe ? Allez ! On va le faire quand-même un peu. Mercyless, c’est une formation qui vient de Mulhouse, qui existe depuis 1987 et qui a, à son palmarès, huit albums et tout un tas d’autres sorties de tous genres, EPs, singles, albums live, etc. Portée par son leader charismatique Max Otero, la formation continue encore d’écrire sa légende dans les différents festivals de l’hexagone. Alors, ce concert-là, il a une valeur très symbolique pour moi : je vais enfin voir les patrons. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que je n’ai pas du tout été déçu ! On pourrait croire qu’à son âge, notre Max Otero vénéré fatigue un peu, tant l’épreuve de la scène est sportive pour nous tous. Il n’en est rien ! L’énergie déployée est dantesque, et la musique de Mercyless est d’une impétuosité qui me laisse admiratif. J’aimerais vraiment avoir sa fougue et sa passion quand j’aurais son âge ! Mais au-delà même de son état de forme colossal, c’est le charisme de mec qui est phénoménal. Il occupe à lui seul, par sa présence, son regard et son chant, toute la scène. Et je pense que la foule, totalement en lien avec la violence de la musique, n’a pu que boire les paroles de ce gourou du death metal hexagonal. Le public a d’ailleurs fait largement honneur aux pionniers en retournant la fosse. Etant donné la dimension démoniaque et enférique de ce death metal crasseux, j’ai comparé l’ambiance à une sorte de bal de l’Enfer où les âmes décharnées se bousculent pour admirer la Bête. En tout cas, ce death metal présent a répondu à toutes mes attentes et je n’ai pas non plus été totalement maître de moi, suffisamment en tout cas pour approfondir une analyse pompeuse du concert. La musique, dans une dimension très old school mais violente, a rempli son contrat avec brio, mais en même temps… Etions-nous en mesure de douter quand on contemple un groupe avec autant d’expérience scénique que Mercyless ? Bien entouré en plus de cela par ses musiciens qui n’ont pas donné leurs parts aux lions, le concert a été un des plus redoutables de la journée et m’aura laissé quelques séquelles physiques. Mais bon, le jeu en valait largement la chandelle. Merci messieurs pour la leçon ! Et que les jeunes groupes un brin pédants qui inondent la scène actuellement en prennent de la graine.
Ami(e)s lecteurs et lectrices, voici venu le temps de la révélation. Celle que je gardais secrète durant toute la rédaction de ce report de concerts. Le prochain groupe est LA raison pour laquelle je me suis tapé toutes ces contraintes qu’étaient la route, le manque de sommeil, les bouchons parisiens, les affreux sandwichs triangle Sodebo, l’hôtel miteux de Sarcelles, le risque de trouver un café à huit euros sur place et mon animosité pour la ville de Paris et sa banlieue. La reformation pour quelques concerts de Temple of Baal. Il s’agit ni plus ni moins du groupe qui m’a donné envie de faire du chant guttural sur du black metal. C’est l’un de mes groupes de chevets depuis toujours, dont je chéris généreusement la discographie et son créateur / leader Amduscias pour tout ce qu’il amène dans ses projets musicaux. C’est simple : en tant que chanteur, je dois énormément de ma vision de la musique metal extrême à Temple of Baal. C’est vous dire à quel point je frétille devant la scène, un peu comme une tique au salon du chiot de Seyssins en Isère ! Je découvre un Amduscias stressé par l’enjeu mais soucieux d’offrir une prestation à la hauteur des attentes du public – et ils sont nombreux à trépigner – et cela me procure un sentiment de stress partagé, plein d’empathie pour ce musicien qui va m’offrir un cadeau de Noël éternel en avance. Bien entouré par ses sbires dont le palmarès en black metal extrême n’a rien à envier à personne (on parle de Hell Militia, Arkhon Infaustus, Decline of the I, The Order of Apollyon, Antaeus, etc.), on sent qu’il y a déjà une ferveur intense qui arrive petit à petit. Et quand les premiers accords résonnent, c’est un concentré d’émotions que j’ai senti remonter en moi. Oui, il faut le faire, je vais me faire traiter de fragile mais je m’en fous : j’ai pleuré. Le black metal de Temple of Baal n’est pas à proprement parlé un truc de fou en soi ! Mais c’est une musique qui me parle au plus profond de moi, avec un accent mis sur la vénération des forces obscures, le tout n’ayant pas besoin d’une mise en scène de dingue pour renaitre de cendres endormies. En fait, la musique en elle-même se suffirait mais vous avez un Amduscias qui vit tellement sa musique, qui est tellement dedans qu’il en arrive à tomber à genoux plusieurs fois et malgré l’enjeu, malgré la musique démoniaque et froide, incisive même, il en sourit de bonheur. Et quand on connait un peu les soucis de son créateur, le voir sourire me remplit de joie. C’est surement cela le black metal : la catharsis suprême qui consiste à métaphoriser, à hyperboliser même, des émotions humaines dans un sujet inhumain comme le démonisme et le culte de la noirceur. Temple of Baal va nous faire offrande d’un concert plein de cela, plein de souffrance vomie sur nous. Avec une setlist qui s’avère excellente, avec des morceaux que j’adore par-dessus tout. Je n’ai pas pu là encore analyser la prestation tant j’étais pris d’émotions intenses, tout comme les personnes qui m’ont accompagné dans la fosse. Je retiendrai néanmoins que le concert, sous le joug de ces fameuses émotions qu’on ne maitrise pas toujours quand on vit la musique, sera un instant à part, unique. Et franchement, merci ! Merci pour me faire vivre cela. Bon, maintenant on attend un album ! Hein, oh !
Et pour terminer ce premier jour, voici Cirith Gorgor qui va normalement nous en faire voir des vertes et des pas mûres ! Ma dernière expérience avec Cirith Gorgor, groupe qui nous vient de Hollande, date de… 2013. C’était à l’occasion du Vormela Festival à Lyon et je me souviens qu’à l’époque, avec le peu de souvenirs qu’il me reste évidemment, le groupe m’avait particulièrement plu par son ambiance très sombre et sa musique black metal très old school. Je me souviens surtout des chandeliers qui leur servaient de lumière. Autant vous dire qu’on va finalement partir là encore sur des bases neuves, histoire de ne pas être parasité par des souvenirs obscurs. Sur le décorum, on reste finalement sur du standard, avec des costumes plein de warpaints, un peu destroy, le tout animé par quelques bougies. Première surprise : la présence au chant d’un grand type très costaud, qui m’a fait un peu penser à Jason Momoa, mais en mode « pas content ». Il m’aura fallu par la suite, pendant que j’écris ces lignes, chercher un peu loin sur Internet pour tomber sur son identité : un certain Balgradon Xul, batteur / chanteur dans le groupe Infinity. Je suis allé écouter et franchement j’ai adoré ! Son chant en particulier est vraiment très bon dans Infinity et je me suis même promis d’acheter des CDs. Mais alors… Pourquoi je l’ai trouvé mal à l’aise sur scène ? Pourquoi j’ai trouvé son chant vraiment très moyen ?… Non mais sérieusement, le concert était pour lui une vraie purge. Il était droit comme un I, pas du tout réceptif à la musique, à peine osait-il écarquiller les yeux pour faire un semblant de frayeur, mais il maintenait cette posture inconfortable et un brin ridicule, qui faisait penser qu’il avait un manche à balai enfoncé dans le fondement. Autant les musiciens ont joué leur jeu de scène de manière excellente, sans en faire trop mais tout en accompagnant ce black metal hyper démoniaque comme il fallait, dans un grand hommage à Satan, enfin… Comme on aime quoi ! C’est ce que j’attendais personnellement de Cirith Gorgor, pas plus pas moins. Mais au chant, franchement sur la première moitié de set, avec ma compagne et ses potes, on s’est demandé ce qu’il foutait là. Cela a complètement nuit à la prestation du groupe. On ne reviendra pas sur son costume avec le bide à l’air, parce que cela aussi… Et encore, niveau vocal ce n’était pas non plus mauvais, loin de là. Mais en tout cas, pour moi il y aura eu deux concerts de Cirith Gorgor. Et la première moitié n’était pas à la hauteur du tout au chant, vraiment. En revanche, la seconde moitié avec cette fois-ci l’arrivée au chant de Nimroth, chanteur un peu « historique » de Cirith Gorgor, nous aura tous soulagé. D’abord parce qu’au niveau de la prestance scénique, on a atteint quatre niveaux d’un coup ! Le gonze arrive avec un t-shirt noir pentagramme satanique rouge, ceinture avec des balles, pantalon noir moulant, corpse paint, etc. Bref ! Toute la panoplie du parfait chanteur de black metal old school. Cela faisait limite un peu cliché, mais après son précédent acolyte, on était foncièrement ravis. Et le chant, mille fois mieux quoi ! Hyper aigu, fort, horriblement puissant, un vrai chant black metal comme on aime, doublé de cette présence sur scène qui puait l’expérience et le charisme. Bon sang, cela m’a complètement retourné le cerveau. Ascenseur émotionnel au maximum et j’ai sans surprise adoré la dernière partie du concert des hollandais. Là, vraiment, on était heureux ! La musique était bien exécutée, puissante et incisive en même temps et je me suis dit qu’on avait quand-même les pionniers du black metal hollandais devant nous, ce qui n’est pas rien. Et ce fut une belle manière de clôturer ce premier jour de festival. Bedankt Nimroth voor het redden van het concert !
Voilà ! Ainsi s’achève ce premier jour a Ecouen qui s’est parée d’un voile sombre et extrême ce soir. Il est temps pour nous de savourer le confort du B&B Hotels de Gonnesse. Avec la promesse que le lendemain sera sans doute très bien, mais sans Temple of Baal cela risque d’être difficile de me rendre plus heureux. Quoique, notre ami Amduscias n’est pas venu la besace vide, il nous réserve quelques tours dans son sac… Affaire à suivre les ami(e)s !






























































































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