Forgotten Tomb – Nihilistic Estrangement

Le 10 mai 2020 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


Ferdinando Marchisio : guitare, chant Algol : basse Asher : batterie

Style:

Gothic / Black Doom metal

Date de sortie:

08 mai 2020

Label:

Agonia Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 9.5/10

« Prends soin de tes parents et grand-parents avant de prendre soin de leurs tombes. » (Jeff Paillat)

Il y a des groupes comme ça où une seule expérience nous suffit pour ne plus y revenir pendant longtemps. Dans le cas de Forgotten Tomb, j’ai un souvenir très précis de la première fois que je suis entré en contact avec ce groupe : c’était pour le Vormela Fest, au Centre Culturel Œcuménique (haha) de Villeurbanne, le 9 mars 2013. J’ai un souvenir très précis de ce concert pour plusieurs raisons : d’une part parce que j’y avait été avec deux de mes camarades de Ravenskull et d’autre que le concert avait été sujet à des dossiers mémorables (le guitariste qui est littéralement en transe sur Anaal Nathrakh, le batteur qui fait un slam en chemise à carreau et pantalon en toile et qui se fait offrir une cigarette pendant le concert de Forgotten Tomb par le bassiste pour finir en gros câlin après le concert, le début de bagarre avec un des types de Crystallium, etc.), mais aussi grâce à la prestation scénique des groupes. Je ne le savais pas encore mais j’étais aux prémices d’un live report tant j’ai de souvenirs. Mes potes de Daedalion, qui sont très bons sur scène, les mises en scène de Handful of Hate et Cirith Gorgor qui valent le détour, Otargos qui nous fait une prestation des plus moyennes mais qui a le mérite d’inviter Julien Truchan le temps d’un morceau et, surtout, Stortregn et Anaal Nathrakh quoi, qui nous retournent la fosse en deux-deux. Mémorable ! Et curieusement, ou pas, la prestation que j’avais le moins aimé dans ce festival, c’était celle de Forgotten Tomb. Je revois encore les différentes balafres sur les bras de Herr Morbid, tombant dans ce que je considérais à tort à l’époque comme un cliché de Black dépressif… De plus, ce côté Doom Metal m’avait vraiment déplu au plus haut point et, depuis ce festival, je n’ai plus jamais écouté Forgotten Tomb.
Mais aujourd’hui, la donne a changé : je me suis mis à vraiment aimer le Doom Metal ; alors je me suis dit que la sortie de leur dernier album appelé Nihilistic Estrangement était surement l’occasion pour moi de revoir mon jugement et enfin remettre les couverts à leurs places ! Allons-y gaiement, donc !

Forgotten Tomb, pour ceux qui l’ignoreraient encore, est un groupe qui existe depuis 1999 et qui nous vient de Plaisance en Italie. Drôle de paradoxe pour un groupe dépressif comme Forgotten Tomb, d’ailleurs ! En vingt-et-un ans de carrière, on retrouve pas moins de dix albums en comptant le dernier nommé, une démo, un EP, un album live et, surtout, chose qui m’a interpellé, un split avec Whisky Rituals que je ne connais pas, en hommage à GG Allin qui est l’un des artistes qui me fascinent le plus, dans le sens psychiatrique du terme ! Au vu de la discographie foisonnante du groupe, j’ai l’impression que ce dernier explore beaucoup et ne reste que très peu sur des fondations solides. Passer d’un hommage à un artiste punk à une prestation très doom metal, en passant par certaines dénominations hasardeuses mais disparates (Black dépressif, Metal gothique, etc.), je ne sais vraiment pas dans quoi je vais mettre les oreilles et c’est limite un peu emballant. J’ai cependant peur de tomber dans la caricature du groupe qui ne se donne aucune limite et fait du sur place. On va voir de suite !

On va commencer, comme d’habitude désormais, par la pochette. En regardant un peu les autres, étant épris d’un sentiment de curiosité pour étayer ou non mon hypothèse d’un groupe épars, j’ai vu que même s’il y a avait une sorte de constante dans les pochettes, avec un accent mis sur l’aspect dépressif, il n’en demeure pas moins que cet artwork signe un peu l’aveu d’un contre-courant total. Pour une fois, en effet, il y a un artwork fait d’une peinture, avec ce jeu de symétrie entre deux cascades d’eau, qui échoue dans un même point d’eau venu d’une montagne, le tout étant surplombé d’un ciel chargé en nuages gris. Bon… en elle-même, elle est très belle, cette pochette, mais au-delà de la signification qui reste mystérieuse, je suis piqué de curiosité concernant ce choix de style : est-ce annonciateur d’un tournant musical ? Il faut savoir qu’il y a eu trois ans qui se sont écoulés entre le précédent album We owe you nothing et celui-ci. Ces trois années de silence ont-elles été mises à profit pour réfléchir et orienter autrement la musique de Forgotten Tomb ? C’est une pochette d’autant plus étonnante qu’elle adopte un style esthétique, plus raffiné que les précédentes pochettes qui étaient gores, voire dérangeantes de brutalité. C’est finalement sur un constat objectif que j’affirme que cette pochette est très belle et annonce de grands changements !
MAIS : vraisemblablement l’artwork est un tableau de Paolo Girardi vu la signature en bas à droite et l’artiste a créé le tableau pour le groupe ce que je trouve génial!

C’est là que le suspense prend fin ! Musicalement, c’est loin de ce que j’avais entendu en concert mais je dirais même à des années-lumière ! Ce serait un euphémisme que de dire que la musique me plait, parce que les influences sont désarmantes. Le premier morceau plante un premier décor, et ce CD s’annonce comme une pièce de théâtre en plusieurs saynètes. A commencer par une influence résolument thrash metal ! Vous l’aurez bien lu, « Active Shooter » présente des riffs incroyablement thrashy, limite Metallica ou Five Finger Death Punch sur l’album Got your Six sur les bords ! Incroyable découverte, donc, et une mise en bouche excellente, qui donne envie de bien se remuer le derche pour la suite.
Le deuxième est de suite un peu plus doom metal mais conserve cette essence un peu thrash, avec des harmoniques travaillées, une guitare lead qui me fait penser à certains travaux de John 5 dans le groupe de Rob Zombie, avec un solo très technique.
Le troisième morceau est la continuité de ce précédent et amène juste une dimension plus noire mais, encore une fois, il y a cette empreinte inattendue de Thrash Metal qui me scotche véritablement ! Un court passage calme typé black metal et c’est reparti pour un tour.
Les deux « Iris’ House Part. I » et « Part. II » sont vraiment de grandes factures.
Le quatrième morceau est presque dansant, c’est vraiment surprenant. « District³ » présente des passages de guitares qui sont mélodiques, bien rythmés et, si la voix n’était pas enraillée comme elle est, on aurait presque affaire a du bon Thrash Metal aux accents heavy !
Le cinquième, « Nihilistic Estrangement », démarre encore plus étrangement, avec une intro lead très positive dans la mélodie, limite planante ! Plus doom metal encore, avec des tempos lents et lourds mais toujours cette mélodie déroutante en avant-plan…
Et, enfin, le sixième et dernier morceau, « RBMK », démarre quant à lui sur les chapeaux de roue pour déverser des blasts ravageurs, toujours agrémentés d’un jeu impressionnant sur les harmoniques qui déroute totalement mes habitudes pour terminer en fondu.

Cela se ressent que je me suis pris une claque sonore? Attendez, ce n’est pas terminé parce que j’ai encore quelques trucs à dire sur cet album ! Si l’on devait retenir un style de musique, j’aurais énormément de mal parce que les influences sont complètement dispersées. On va retenir que cet album – et je dis bien cet ALBUM – sent bon le Thrash Metal avec du Doom Metal. Première association de ces deux styles pour moi, à ma connaissance la seule mais je peux me tromper. En fait, si je devais retenir un constat, c’est qu’on est loooooooooin de ce que j’avais découvert en concert ! En album studio, le rendu est absolument aux antipodes d’en concert : la musique, en tout cas de cet album, est bourrée d’innovation, de création inédite, et de génie ! Il faut quand même arriver à associer un chant scream et torturé à des passages limite un peu fantasques. Cela relève totalement du génie à ce stade, je suis ébloui !

Je vous partage le pressbook qui résume parfaitement bien la musique éclectique de Forgotten Tomb: « from its early, depressive black metal roots (a genre Forgotten Tomb was crucial in defining) to eerily dark blues/rock passages and finally exploring different shades of extreme doom. » Ce que j’appelais moi « Thrash Metal » est décrit ici comme du Blues et du Rock, ce qui est aussi bien décrit !

Inutile de préciser que le son de l’album est juste impeccable, façonné aux petits oignons. Avec Agonia Records, je commençais à m’habituer sincèrement mais, là, on est monté encore un cran au-dessus ! Les harmoniques qui sont juste exceptionnelles, sont également mises à leur juste valeur par le mastering de l’album qui ne délaisse aucun instrument, chacun ayant une place importante et l’égalité est de rigueur. Du coup, on entend tout, et bien !
A un bémol près : le chant est parfois un peu trop mis en avant : j’ai fait ce constat sur le morceau éponyme mais rien de bien choquant.
J’ai adoré aussi le son de la batterie qui claque, n’est pas trop épaisse pour ne pas tomber dans le piège du Doom Metal bien lourdingue et laisser ainsi place à ces guitares qui me font vibrer d’extase. La basse, rien à redire : elle a largement sa place ! Bref, un son rarement vu [ou même « entendu » (Hans Aplastz)], comme on n’en fait de moins en moins et qui démontre à quel point rien n’est laissé au hasard pour un groupe de la trempe de Forgotten Tomb. Du grand art !

Et alors, tandis que je pensais que le chant allait être redondant, sans saveur, comme je l’avais vu en concert où Herr Morbid n’avait pas franchement étoffé sa prestation scénique, il est tout le contraire et, plus fort encore, sans varier d’un iota ! C’est à l’écrasante majorité le même type de chant, unique sans accompagnement, unique aussi par le grain vocal enraillé mais pas trop, torturé mais pas trop non plus pour laisser place à la technique, et qui s’écoute comme l’on boirait du petit lait. Et là où je causais de Thrash Metal, c’est que, contrairement à l’étiquette trop vite collée d’un Black dépressif et son chant linéaire qui fait fi de la rythmique, celui de Herr Morbid est très rythmé, saccadé, limite dansant. Pour du chant scream c’est très agréable : cela change drastiquement des sempiternels groupes de Black old school. Vraiment un très bon point au chant, et plein de surprises. Mais c’est l’effet « je suis resté sur un a priori sans revenir dessus » : on est surpris de part en part, souvent agréablement. Donc un constat qui est à la hauteur de ma déception passée : une révolution pour moi.

C’est sur une conclusion extrêmement positive que je vais vous parler du dernier bébé de Forgotten Tomb. Positive en tout : musicalement parlant c’est du très haut niveau, je n’ai que rarement entendu une telle recherche de renouveau dans un même album, un tel mélange de genres différents relève véritablement du génie artistique et je m’en veux terriblement de ne pas avoir exploré davantage la discographie béante des italiens. Il va de soi que Forgotten Tomb a désormais largement marqué de son empreinte le monde metal extrême et va certainement dérouter bon nombre de ses fanatiques avec cet album aux accents divers… mais qu’importe ! Parce que je suis prêt à mettre ma main au feu qu’avec Nihilistic Estrangement, ils vont en gagner d’autres.

Très bonne surprise pour moi qui vais donc m’encourager fortement à écouter les précédents, c’est décidé!
Une tournée européenne s’annonce pour mai 2020 mais chut, je ne vous ai rien dit…

Tracklist :

1. Active Shooter (8:32)
2. Iris’ House Pt. I (5:21)
3. Iris’ House Pt. II (6:14)
4. District³ (6:02)
5. Nihilistic Estrangement (8:43)
6. RBMK (5:48)

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