Pavillon Rouge

Le 9 avril 2018 posté par Metalfreak

Interviewer : Antirouille
Interviewé : Mervyn SZ (Guitares, programmations)
Photos : Metalfreak

 

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  • Antirouille: Raconte-moi un peu l’histoire du groupe 

Mervyn : J’ai fondé le groupe en 2008, le premier mini CD Mizuage est sorti quelques mois plus tard. Nous étions alors un trio, composé de Benjamin (ex-Sybreed), YVH et moi-même. C’était encore l’époque de Myspace et de l’amical Tom, il était facile pour un jeune groupe de faire découvrir sa musique, et de se faire des contacts. On a donc trouvé un label pour produire notre premier album Solmeth Pervitine qui, en 2012, proposait un style de black indus tout à fait unique. On a commencé à faire des concerts l’année suivante, et on a pour cela fait appel à Sorthei, qui a assuré la batterie live pendant plusieurs années, avant de s’envoler pour le pays du Hockey sur glace et de l’accent absurde. En 2015 est sorti notre second album Legio Axis Ka, chez Dooweet records, qui nous a permis de mieux nous faire connaître. Sur ces deux albums, les parties vocales étaient assurées par Kra Cillag (ex-Crystalium). Pour notre nouvel album Dynasteia Klub, c’est Mu Cephei qui, en plus de la guitare, s’occupe du chant, accompagné par plusieurs amis qui ont prêté leur voix sur certaines chansons : Jad de Division : Cristal, Arnhwald de Deathcode Society, Hreidmarr de The CNK et Baise ma Hâche, et enfin Saint Vincent de Blacklodge. A la basse, nous avons Shulgin qui est là depuis le premier album, et sur scène nous sommes épaulés par Xhalmstad (percussions live) et Pliszken (guitare lead).

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  • Le style de métal dans lequel vous évoluez ?

Dur à définir en un mot, en fait chaque année on s’invente une nouvelle appellation,  il y a eu entre autres « techno black wave », « solar black metal », « dancefloor metal »… Pour le dernier album je serais tenté de le définir comme du « Training black metal », car les compos te donnent davantage envie de t’entraîner dans une salle de sport glam et flashy que de te scarifier dans je ne sais quelle cave de merde. Après ça reste réducteur, dans la mesure où notre musique incite aussi à la rêverie, à l’extase et à la fête, donc, pour paraphraser un célèbre trio de comiques, je dirai qu’« on a pas d’étiquette » …

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  • Pourquoi « Pavillon Rouge » ?

L’idée originelle de ce groupe était d’associer la puissance du metal extrême et les ambiances sensuelles et asiatisantes de l’Indochine des années 80 (en particulier, celles de l’abum Le Péril Jaune). C’était  assez provocateur pour l’époque, vu le manque d’ouverture d’esprit des black metalleux d’alors, et je voulais que le nom du groupe soit comme un étendard du style que nous allions créer, et pour lequel nous allions nous faire tailler. J’ai donc choisi le titre d’une mes chansons préférées d’Indochine, Pavillon Rouge, qui fait référence à la littérature érotique japonaise. Il faut bien avouer que, dans une scène où les trois quarts des noms de groupe sortaient du Seigneur des anneaux ou de la Mythologie scandinave, notre patronyme détonnait pas mal ! Il eut été absurde de s’appeler «Dark Morgul of Valhala » pour faire un metal éthéré, se référant à l’Asie et à la new wave française !

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  • Quelles sont les influences musicales de chacun ? Qui apporte quoi à la finalité musicale ?

Perso, je me laisse inspirer par tout ce que j’entends, et ça va de la variété française des 80s à Muse, Emperor ou Scooter. Même des DJ à la con genre Tiesto ou des chanteuses de merde comme Britney Spears, avec certaines de leurs sonorités ou de leurs mélodies, arrivent à me faire vibrer et me donner envie de composer. Après il y a des groupes qui ont clairement influencé le groupe et qui continueront de le faire, comme Blacklodge, Crystalium, Indochine, et Hanoi Rocks. C’est la variété de ces influences et l’absence totale de barrières qui fait le « son Pavillon Rouge ». On est tous fans de black metal bien sûr, mais pour nous c’est plus un outil qu’une finalité. Etre un groupe de black metal, ou même de black indus, avec toutes les conneries de règles et de restrictions que cela implique, ne sera jamais pour nous une fin en soi. D’ailleurs, cela ne devrait l’être pour aucun groupe, chacun devrait essayer de produire la meilleure musique possible plutôt que de chercher à répondre absolument à un cahier des charges. Pour cela, j’admire des groupes comme Tiamat, Enslaved ou Ulver, qui n’en ont jamais rien eu à foutre de l’étiquette qui leur était collée.

  • Comment travaillez-vous au sein du groupe ? Qui écrit, qui compose… ?

Tout part de l’electro, depuis le premier mini CD. J’écris la trame avec les synthés et les drums, puis chacun vient poser ses parties. Une fois cette base posée, le chant vient se greffer. Pour Dynasteia Klub, Mu Cephei a écrit une bonne partie des textes, Saint Vincent (Blacklodge) et Jad (Division : Cristal) nous ont apporté des lyrics qui étaient tout à fait dans le délire de Pavillon Rouge.

  • Le français s’impose-t-il toujours comme une évidence ? vous sentez vous comme des résistants ?

J’adore la langue anglaise, je la trouve tout à fait adaptée au hard rock, au heavy, au glam etc… mais dans le style qui est le nôtre, le français est incontournable. Au début du groupe, j’écrivais les textes et je préférais les écrire dans une langue que je maîtrisais plutôt que balancer des trucs hyper stéréotypés dans un anglais hasardeux. Et finalement le français collait parfaitement aux compos, on a donc décidé de le garder ! Ce n’est en aucun cas un acte de résistance, je n’ai absolument rien contre les groupes français qui chantent en anglais, tant que ce n’est pas un truc genre « It is not because you are, I love you because I do ».

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  • Parle-moi de DYNASTEIA KLUB en combien de temps l’avez-vous écrit ? quelle différence par rapport aux autres, l’évolution prise.

La compo proprement dite a pris une année, on ne voulait aucun morceau « bouche-trou », juste des brûlots. Et pour cela, on a du prendre un max de temps pour évaluer le potentiel catchy de chaque titre. On voulait un album à la fois fois plus puissant, plus dansant et plus aéré que nos précédents disques. Si le second album Legio Axis Ka s’apparentait à une quète fraternelle et spaciale, Dynasteia Klub, nous fait débarquer sur un dancefloor cosmique, que viennent enflammer des Dieux grecs exhubérants et probablement défoncés. C’est un peu comme si Scooter, légende germanique de la techno, se mettait à faire du black et se prenait de passion pour le cosmos et l’Antiquité. La plupart des chansons ont été composées comme de purs titres de black metal, mais on a pris le parti de mettre les kicks et les synthés très en avant, afin de créer une musique tout à fait nouvelle, violente, dansante et envoutante.

 

  • Vous l’avez enregistré où et sous quel label ?

Il sort chez Dooweet Records, et a été enregistré, comme nos précédents albums, chez Sicarius Production avec Arnaud Ménard, qui s’est surpassé sur le mix et nous a donné de précieux conseils sur les vocaux. Et c’est Dave Ottero du studio Flatline Audio qui a masterisé tout cela. L’enregistrement s’est déroulé dans un cadre on ne peut plus solaire, au Studio du Lac à Annecy en plein été, ce qui collait à merveille à l’esprit du groupe. Dans une ambiance aussi parfaite, on aurait été culottés  d’enregistrer du hardcore revendicatif ou du black dépressif !

  • Pourquoi « Dynasteia Klub » et parle-moi de l’artwork.

Le « Dynasteia  Klub » c’est le lieu cosmique dont je t’ai parlé précédemment, où se retrouvent les Puissants de l’Olympe pour s’euphoriser sur le dancefloor. On a dans ce titre les idées de puissance et d’extase, qui ont présidé à la composition de la plupart des morceaux.

C’est Mu Cephei qui s’est occupé de la pochette, et c’est l’une de nos meilleures. On voulait garder la thématique cosmique de Legio Axis Ka, mais en y apportant davantage de lumière et de couleur, car Dynasteia Klub » est, à mon sens, un album très coloré.  Comme pour notre précédente pochette, l’idée était d’inclure, dans ce cadre spatial, une référence à l’Humanité, sans laquelle tout cela n’a guère de sens. C’est ce qui manque, selon moi, sur la plupart des covers de black metal ayant une thématique spatiale, comme celles des groupes suisses souvent, où l’on voit juste des planètes et des étoiles. Perso je trouve qu’il manque un truc, l’espace c’est cool, mais au bout d’un moment tu t’y fais un peu chier si t’es tout seul avec les planètes. La figure mythologique de Pégase était idéale puisqu’elle symbolise à la fois la fougue, la puissance (c’est son côté « cheval »), et l’élévation, la liberté, l’envol vers les cieux. Parfaite image de notre musique, puissamment portée par les beats, et prenant son envol avec les mélodies de gratte et de synthés. En tous cas, tu as écouté l’album, je pense que tu seras d’accord avec moi si je dis qu’elle annonce pas mal ce qui va s’y passer non ? Avec tous ces éléments, le Cosmos glam, le Pégase au top et toutes ces couleurs bleutées, faudrait vraiment être con pour s’attendre à du Drone ou du Gore metal !

  • Quels sont les thèmes principaux abordés ?

La quète cosmique, sur laquelle on tripe depuis le second album, le stoïcisme et la philosophie grecque en général. Mais certains titres abordent des thèmes plus concrets : l’auto-discipline, les personnalités toxiques, le pardon et la paix dans l’au-delà, la vanité des querelles d’ici-bas… Un titre comme « L’Harmonie et la Force » même s’il aborde différents thèmes, a pour but de redonner la force, l’espoir et l’énergie aux personnes qui le mettront dans leur bagnole en allant au boulot ou dans leur lecteur mp3 avant d’aller en chier sous les barres. Comme sur nos précédents albums, on accorde toujours pas mal de place à la rêverie, à tout ce délire cosmico-trippé, mais on ne s’éloigne à aucun moment de la vraie vie. Je ne perçois pas l’Art comme un truc pour s’échapper du réel, mais  comme un outil pour le façonner et le soumettre à sa volonté. Prends une chanson comme Livin on a Prayer de Bon Jovi, elle pourrait convaincre n’importe quel dépressif que la vie est cool !

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  • Ça attaque fort avec « l’harmonie et la force », quoique jusqu’à « in aenigmate », on n’a pas le temps de toucher terre. L’équilibre est parfait entre le métal et le son club Comment parvenez-vous à harmoniser ceci ?

C’est la première fois qu’on arrive à un équilibre aussi bon, justement, et c’est ce dont on a toujours rêvé : des guitares puissantes et tranchantes à mort, des synthés qui t’emportent dans le cosmos et des kicks fracassants, qui te font croire que ton voisin est en train de frapper au mur parce que tu fous le son trop fort. On est très fiers de tout cela, mais pour y arriver, ça a été des mois d’essais infructueux, de désaccords et de prise de tête, bien plus que pour les précédents albums.

Si je devais décrire le style de cet album précis, je te dirais d’imaginer l’énergie electro de Combrichrist, Alien Vampires et tous ces groupes qu’on se réjouit d’entendre sur le Dancefloor, habitée par le souffle épique d’Emperor. Perso c’est le style de metal que j’ai toujours rêvé d’écouter,  catchy, dansant, et ascendant. Mais bon, tu as écouté l’album, donc tu dois déjà savoir tout ça !

 

 

  • On entend des samples, qui sont les références cette fois ci ? (cf. o légions o triomphe, dynasteria klub)

Niveaux samples on est restés super loyaux envers nos références cinématographiques des débuts : le sympathique Bodhi de Point Break dans Dynasteia Klub, le patibulaire Rorschach de « Watchmen », on les entendait déjà dans nos chansons « Sept siècles et le Feu » , et « A l’Univers ». Point Break, que beaucoup considèreront comme une ringardise du début des 90s, avec son lot de bermuadas fluos, de hits glam rock et de branleurs à surf, est l’un des films qui ont le plus marqué ma jeunesse, en me familiarisant avec la coolitude mystique, l’esprit de bande et de fraternité. J’y fais donc souvent référence au fil des albums. « Watchmen » m’a également fasciné, tant par son propos, que par son esthétique et sa fidélité à la BD. Sur « O légions o triomphe », on entend un sample d’Orange Mécanique, référence plus classique dans le metal, mais la réplique collait bien à la musique. Et pour tous les autres samples, on maintient le secret, surtout pour les auditeurs, car il y a rien de plus cool que d’entendre une réplique dans un film et se dire « putain ! C’est là qu’ils ont pris le sample ! ». Petit indice tout de même : y a un Kubrick, et un gros blockbuster comme on les aime.

  • « dans l’ailleurs absolu »   peut être déstabilisant pour une personne qui vous découvre par ce titre où l’équilibre est rompu entre le son club et le métal. Pourquoi cette approche ?

Le morceau devait à l’origine être la trame pour un featuring avec un groupe de hip hop, mais le projet n’a pas abouti. On a donc émaillé la partie instrumentale de samples d’une de nos idoles absolues : HP Baxxter, chanteur du groupe Scooter, spécialiste ès-punchlines absurdes. Je ne pense pas que ce dernier nous tiendra rigueur d’avoir utilisé sa prose, dans la mesure où lui-même n’hésite pas à piller les riffs, mélodies et lyrics d’autres groupes ! En tous cas tu as raison, c’est peut-être pas le meilleur morceau pour découvrir Pavillon Rouge, mais il a sa place dans l’album, puisqu’il constitue un break bien mérité pour l’auditeur, qui s’est enquillé pas mal de blasts et d’agressions solaires avant, et qui va se prendre juste après le morceau « Ad Augusta » dans la gueule.

  • Ad augusta est mon préféré, avec  pour moi des références 80’s. Dit-m ‘en plus.

Eh ben voilà on y vient ! C’est justement le morceau où l’on retrouve notre ami Rorschach et son imputrescible optimisme ! C’est drôle que tu y voies des références 80s, car à la base je voulais en faire le morceau black metal de l’album … Mais en effet, on retrouve les sons de synthés, et même les mélodies qui faisaient toute l’innocence et la beauté des années 80. C’est le premier morceau qui a été composé pour cet album, et il était encore très influencé par Legio Axis Ka, puisqu’il associait la violence des blasts et la mélancolie du thème principal. Il comporte les meilleures mélodies que l’on ait jamais composées, tant au niveau du chant que des synthés, et on a donc hésité à le mettre en dernier, mais au final, il est parfait comme morceau de clôture.  C’est notre tout premier refrain en chant clair, et Mu Cephei et notre ami Arnhwald (Deathcode Society) se sont surpassés pour en faire un putain d’hymne.

  • Et toi, tu as un titre préféré ou qui vous séduit plus que les autres ?

Perso « Bodhissatva » pour son refrain, son côté super pop et ses paroles !

  • Des concerts de prévu ?

Oui bien sûr , début avril à Annecy, Lyon, Nice et Toulouse, puis fin mai en Hollande, et mi-juin en République Tchèque. On fera ces dates en compagnie des tchèques Gorgonea Prima et de nos amis grenoblois de Blacklodge.

  • Comment perçois-tu cet album ?

J’ai lu assez de magazines metal quand j’étais gamin pour savoir qu’à cette question, il faut répondre « Cet album est bien plus mature que le précédent, c’est notre meilleur album à ce jour ». Et, en disant ça, je ne mens pas !

  • Si je te dis que je te mets 9,5/10 et que c’est la plus haute note que j’ai mis jusqu’à présent…

Ben c’est génial, merci à toi, tu as notre reconnaissance absolue, déjà pour la note, mais surtout pour l’immersion dans notre musique.

  • Le mot de la fin est pour toi.

Encore merci pour ton interview et ton ouverture d’esprit. Et à tes lecteurs : restez cool, positifs et authentiques, même si c’est pas très black metal !

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