Tersivel – To the Orphic Void

Le 11 février 2022 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


Lian Gerbino : guitares, chant Franco Robert : claviers, piano, accordéon, chœurs Danny Ebenholtz : batterie

Style:

Doom Metal Symphonique

Date de sortie:

11 février 2022

Label:

Uprising! Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 7.25/10

 

Le sommeil est le frère jumeau de la mort.” Homère

Le manque de sommeil m’assaille quelque peu ce soir, et dans ma condition peu évidente parfois d’infirmier je suis amené à me lever tôt. Je n’ose me plaindre tant les horaires de notre big patron sont pires (NdMetalfreak : c’est quoi, dormir ?), et certainement d’autres concernant mes consœurs et confrères de Soil Chronicles, mais j’ai énormément de mal à supporter mes horaires. Me lever à 4h30 du matin comme présentement ce matin, c’est un truc qu’on ne devrait pas vivre toute une vie. Après, il y a une sorte de solitude enchanteresse qui est appréciable par moment. J’aime par exemple prendre mon café – premier d’une longue série – dans la pénombre, dans le calme de l’appartement, avec les filles qui dorment pas loin, et le chat qui ne daignent même pas se réveiller à mon arrivée fracassante et encore embrumé de torpeur dans le salon. C’est un rare moment avant de bosser où je peux savourer du calme et m’envelopper d’une quiétude réconfortante avant d’affronter l’orage. Mais en vérité, je parle de sommeil parce que je m’aperçois que l’aspect onirique de la musique prend une place de plus en plus importante, et que beaucoup de groupes s’évertuent à arborer les havres de paix oniriques et en faire des représentations sonores et visuelles intéressantes, de plus en plus chiadées. Voilà pourquoi je déblatère un tantinet tout seul sur le sommeil, car n’oublions pas cette phrase de Dumbledore dans Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban : « Quand nous rêvons, nous entrons dans un monde qui n’appartient qu’à nous. Laissons-le nager dans l’océan le plus profond ou planer au-dessus des nuages les plus hauts. » Ce soir j’ai opté pour le groupe Tervisel et son album nommé To the Orphic Void parce que je pensais idiotement (la fatigue vous dis-je!) que « orphic » voulait dire un truc relatif au sommeil. En fait non. C’est tout autre chose, mais comme j’étais lancé sur mon introduction, j’ai continué. Voilà.

Tervisel est un mot qui signifierait rassemblement, mais comme « gathering » a plein de significations, difficile à faire la part des choses. Mais c’est d’abord et avant tout un groupe international, mi-argentin et mi-suédois. Au départ il n’est qu’argentin avec une fondation en 2004 à Buenos Aires et qui a connu des musiciens uniquement argentins, jusqu’à l’arrivée du batteur Danny Ebenholtz en 2019 qui est donc suédois et qui vient de Malmö. C’est pour la petite subtilité, même si je persiste à dire que l’intégration d’un musicien étranger ne joue pas spécifiquement sur l’origine du groupe, donc pour moi Tervisel est un groupe qui vient et se maintient en Argentine. Pour ce qui est de la discographie, on ne peut pas dire qu’elle soit florissante. C’est le moins qu’on puisse dire. Avec « seulement » trois albums avec ce dernier en dix-sept ans d’existence, et néanmoins toute une flopée de démos (deux), d’EPs (deux), des singles (quatre) et un split avec… quatre autres groupes. Voilà, ce n’est pas énorme mais je retiens surtout les trois albums. Je pense que cette cachexie discographique est induite par divers changements de line up que le groupe a connu, et si je ne m’amuse pas à tout recensé, croyez-moi il y en a eu beaucoup ! Espérons que ce troisième album qui sort chez un bon label ne soit pas une coquille vide. Mais j’en doute !

Parce que la pochette a déjà posé de très bons débuts. Outre l’aspect fort bien exécuté de cette dernière, j’aime beaucoup le sens que l’on peut y mettre et qui va de pair avec la notion d’orphisme qui est présente dans le titre de l’album. To the Orphic Void est donc un album qui parlerait d’orphisme. C’est quoi ? Pour faire simple parce que c’est une notion antique et tellement philosophique que l’on pourrait y consacrer un essai entier, l’orphisme est un mode de pensée qui s’apparente à un truc religieux, et qui consiste à penser que l’âme doit se défendre, pour « gagner sa place au ciel » de l’impureté du corps et ainsi doit connaître une vie d’ascète. Cela reprend le mythe d’Orphée dont je vous avouerai que j’ignore la corrélation possible entre ce mythe et l’orphisme, mais bon. Bref ! J’y vois à travers cet artwork une représentation métaphorique de l’orphisme dans la mesure où il y a dans la main droite du personnage une eau qui s’écoule et qui symboliserait plein de choses mais surtout de se contenter de peu par exemple, et de l’autre un crâne censé représenter le savoir induit par une vie d’ascète. D’ailleurs ce personnage mystérieux et un peu glauque pourrait très bien être Orphée, puisque ce dernier descend aux Enfers chercher Eurydice, et l’on a quand-même un côté macabre qui émane de cette pochette. Donc pourquoi pas ! C’est une interprétation que j’en fais, je ne serai pas étonné d’apprendre que je suis totalement à côté de la plaque. En tout cas, cette perspective d’analyse m’a permis de me plonger sincèrement dedans et d’y voir un bel ouvrage en guise de mise en bouche. Cet artwork est très beau, et je ne suis pas en reste d’aller approfondir la musique qui se cache derrière. C’est évidemment tout ce qu’on demande à un design de CD. Donc contrat rempli !

Première écoute donc pour To the Orphic Void, et déjà un premier constat sans appel : tout le monde parle de death metal mais honnêtement je ne trouve pas cela flagrant. Petit rappel : le groupe officiait à ses débuts, et donc ses deux premiers albums, dans un registre power metal symphonique et / ou folklorique. Et curieusement, sur cet album, le groupe s’essaye, ou du moins essaye de s’essayer, dans un style plus doom death metal. Seulement voilà, quand on me vend du death metal, j’attends de la lourdeur, et quand on me vend du doom metal j’attends la lenteur. Or, dans le cas de Tersivel, il n’y a ni l’un ni l’autre ! Enfin, tout du moins le death metal ne transparaît pas spécialement. La musique est lente, j’exagérais un peu, mais ce n’est là encore pas totalement réussi dans la mesure où cette lenteur n’étant pas accompagnée d’une certaine lourdeur, on pourrait vite trouver le temps long. Concrètement, si la musique de Tersivel en était restée là, je me serai emmerdé royalement. Heureusement que la partie qui oscille entre le symphonique et le folklorique existe, parce que cela relève totalement le niveau. Les interludes dans les pistes sont magnifiques, j’ai été même par moment bouleversé par l’intensité et le calme triste de certains passages. Pourtant ces parties ne sont pas d’une énorme élaboration, bien au contraire ! Certaines parties ne sont qu’une enfilade de notes légères au piano ou dans une banque-son très My Dying Bride. C’est une musique qui finalement sonne comme un truc lancinant, presque oppressant. Du coup il est vrai qu’avec du recul, cette base doom metal joue bien son rôle et devient difficile à encaisser, rehaussée par instants de passages discrets mais ô combien importants, on se prend vite au jeu. Et comme aussi parfois il y a des accélérations, on finit par trouver cet album surprenant. Ce qui s’avère être une bonne chose au final. Maintenant, il reste pas mal de choses à voir pour approfondir pourquoi j’ai été un peu sur le reculoir.

Et je pense que le premier point qui peut expliquer des choses se trouve dans la production. Je disais que le groupe et le label vendent la musique comme du death metal, ou du doom death metal c’est selon les paragraphes. Or, le son ne s’y prête pas forcément. Qu’il soit raccord avec du doom metal, là d’accord, et complètement même. Du moins sur de l’old school. Mais il n’y a pas le son lourd et gras qui est inhérent au genre death metal. Résultat : vous pensiez avoir un truc bien épais, comme un mélange de saindoux et de Maroilles, et vous vous retrouvez avec une tranche de Comté. C’est appétissant mais il y a forcément un moment de recul nécessaire pour mieux déguster. Difficile de savoir si c’est une erreur de production sincère ou d’étiquetage. Quoiqu’il en soit et c’est manifeste il y a erreur sur la marchandise. Après, cela n’enlève en rien que pour du doom metal avec des incorporations symphoniques, c’est très bon! Le son est plutôt aérien, plus léger et plus old school, laissant donc une place intéressante à des claviers ou un piano, voire un accordéon qui ne donnent pas leur part aux lions dans le mixage mais mériteraient selon moi d’être un peu plus mis en avant. C’est ce qui m’a laissé sur ma faim lors de la première écoute, cette sensation que les parties claviers sont magnifiques mais pas mises en exergue comme il faudrait. La batterie est trop peu technique pour avoir du sens profond mais a son rôle dans le mixage de marqueur rythmique et c’est au final une utilisation minimaliste mais importante. En fin de compte, je peux me tromper mais cette production sent l’erreur de l’errance. C’est à dire que le groupe aborde un style qu’il n’avait pas l’habitude de jouer auparavant et en paye probablement le prix. Pour sûr que le prochain album sera meilleur mais en attendant et au regard de cette production qui est bonne mais encore à améliorer, je pense que To the Orphic Void est un album à prendre comme un premier pas. Avec des faiblesses flagrantes mais des promesses.

J’ai fini par me forger une opinion sur Tersivel et son album To the Orphic Void. Je pense qu’effectivement, et ce constat prévalait initialement pour la production, c’est un album de transition. Cela explique ainsi pourquoi on a besoin d’un temps d’adaptation et d’apprivoisement pour ne pas s’écorcher les oreilles. En gros, pour que vous soyez moins perdus, nous retiendrons que la musique de Tersivel sur cet album est un genre de doom metal symphonique, voire folklorique mais comme les instruments utilisés ne sont pas réellement traditionnels, je rechigne un peu. Doom metal symphonique c’est bien ! Mais du coup cela contraste avec les opus précédents que j’ai finis par écouter. To the Orphic Void présente de réelles preuves de talent et je suis en mesure de penser que la confirmation n’est pas loin, parce que même si depuis tout à l’heure je suis plus enclin à montrer du doigt les faiblesses et les axes d’amélioration, cet album est vraiment bien. Il y a des riffs intéressants, la démarche qui consiste à mélanger des ambiances calmes me fait penser à Ixion que j’avais adoré, et c’est vrai que j’ai sur-adoré les passages calmes sur les morceaux. Maintenant il faut approfondir le changement. Lui donner plus de confiance, de sincérité et peut-être un peu plus de sérieux et je suis convaincu que Tersivel va trouver sa voie !

Pour le chant c’est d’ailleurs un point fort que je tiens à relever parce qu’il scelle désormais toute ma théorie sur l’orientation musicale. Il est totalement en chant clair. Et on est bien d’accord que le chant clair et le death metal, en principe c’est comme accoupler une jument avec une girafe! C’est en cela que je trouve le chant clair particulièrement révélateur de ce vers quoi doit tendre le groupe Tersivel. Sur la technique en tout cas je n’ai rien à redire de vraiment rédhibitoire sur le chant, il est bon, voire très bon sur certains passages. Il mériterait, pourquoi pas, d’avoir un peu plus d’intensité, mais je trouve au moins qu’il pose les choses. Il amène une dose supplémentaire de douceur, et d’apaisement qui, loin d’être incompatible avec le metal, fonctionne comme un équilibre nécessaire parfois. Un chant largement à la hauteur de mes attentes en tout cas !

Pour conclure ici, Tersivel revient aux affaires mais dans un registre radicalement différent ou presque! Fort de son incorporation d’un batteur suédois, le groupe argentin s’immisce dans une musique plus couillue on va dire, mais sans tomber dans la disgrâce folle. Un doom metal symphonique qui s’avère être encore à perfectionner. Beaucoup de points ne sont pas encore optimaux notamment dans la démarcation du groupe sur l’échiquier des genres, et dans la production qui manque un peu de sérieux. Je pense que Tersivel est en phase d’observation avec To the Orphic Void qui ressemble selon moi plus à un CD d’expérience qu’une vraie avancée avec confiance. Il faut donc persévérer vers la voie de l’amélioration car sur d’autres points largement énoncés dans ma diatribe, le groupe promet de bons auspices ! A voir par la suite pour moi.

 

Tracklist :

1. She
2. Weeping Iron tears
3. Moving On
4. The Ferryman
5. Shivering Deadly Cold
6. Transmigration of the Soul

 

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