Report : Crazy Diamond
Photos : Le Marquis Arthur

Une brume légère envahit l’antre de l’Ar’Vran Fest.
Des voix s’élèvent, mystérieuses.
Rituel.
Un magicien drapé dans une cape noire,
Plumes de corbeaux perchées sur ses épaules,
Au visage barré de noir.
Il est 12h30. Le groupe Breton Tan Noz initie ce festival de deux jours avec au menu quatorze groupes de la scène Folk, Pagan et Black Metal.

Le Ar’Vran Fest, IIIe édition, fait se rejoindre la musique metal et l’univers médiéval grâce à un marché qui accueille des exposants (cyanotypies, tatouages, bijoux, illustrations, …) et une scène sur laquelle se produisent d’autres groupes et des représentations théâtrales. Des bottes de paille jonchent le sol du marché, les festivaliers et les habitants de la région s’y posent, discutent, se restaurent.

Jour 1 : 05 juillet 2025.

La musique de Tan Noz parvient jusqu’à nos esgourdes. Ce groupe chante, en français mais aussi en Breton, des légendes Bretonnes – il parle d’Ankou, de chaos. Musiques et instruments traditionnels s’en mêlent. Leur concert s’achève dans un bruit de vague qui nous submerge. Il est l’heure de passer à Mourning Wood. Et c’est une toute autre ambiance que nous offre ces Néerlandais !

Serre-tête licorne, chapeau de cow-boy à paillette, colliers de fleur et j’en passe, les voilà prêts à enfiévrer la foule et à l’entraîner dans une joyeuse fest. Ce n’est pas une forêt paisible qui attend le festivalier. Mourning Wood nous invite à une réelle party de Folk Metal : ces morceaux sont entrecoupés de banjo, d’interludes entêtants comme issus de jeux vidéos. On y rame, on y fait du rodéo. Ces interludes joués au clavier donnent un côté ludique et déluré. S’y mélangent des samples d’autres morceaux, d’autres styles. Mourning Wood met l’ambiance ! Et le concert se termine par l’air de « The Champs Tequila ». Il est temps de repasser par le bar.
Avant de regagner la salle, le vigile demande au gars devant moi de lui montrer son sac. Celui-ci s’exécute et lui déverse le contenu de son verre sur ses rangers… « Verser sa bière sur les pompes du vigile » : fait !

S’ensuit un groupe français de Heavy Metal / Metal mélodique : Orkhys. Qui parvient à accrocher le son du metal aux notes de la harpe celtique. Le groupe assure, notamment le batteur. Il joue leur titre emblématique « Guardians of our lives » et gagne un public déjà conquis.

La harpe celtique est ensuite remplacée par le violon, la flûte, la cornemuse ou encore le bandonéon : Cave Growl entre en scène. Ce groupe dégage une énergie folle, emportée par ses musiciens et tout particulièrement par le chanteur Antoine, et le violoniste Clément. Bienvenue à la taverne des Trolls ! Côté musical, on retrouve subtilement des airs Irlandais ou du moins Celtiques, révélés par le violon comme dans « Story of a Straight Man’s Life ». « Ace of Beer » annonce la fermeture de la taverne.

Une transe s’empare du public, hochement de tête généralisé et en rythme. Obscurity, groupe allemand de Pagan / Viking Metal, présente entre autre de nouvelles chansons. Le chanteur s’installe sur le devant de la scène pour être au plus proche du public. Sur « Vintar », on pourrait même y reconnaître un petit air de « Monkey Gone to Heaven » de The Pixies.

L’appel des cornes retentit dans toute la salle. L’armée des Trolls est en marche et escorte le prochain groupe, Aktarum. « Trolls at the Gates » s’ouvre sur les voix d’un chœur, les guitares deviennent mystiques. Ce groupe belge de Black / Folk Metal nous catapulte dans un monde de fantasy grâce à la variété des registres des chanteurs, de parties musicales, épiques.

Lyrisme. Epopée. Voici venu le groupe Saor qui nous conduit sur ses terres écossaises. Son Metal atmosphérique agit sur la foule qui se transforme en onde océanique, oscillement des têtes. Les lumières bleues accentuent cette sensation. On sent de la connivence entre les musiciens. Le chant de la flûte nous guide à travers cette odyssée. Le concert se déroule comme un unique morceau. Pourtant, cinq titres sont joués ce soir-là. Saor a posé son histoire, sa légende dans ce petit coin de Bretagne. Gros coup de cœur du festival !

Et pour clore cette première journée, Equilibrium met le feu à la salle ! Ce groupe d’Epic Folk Metal allemand conclut énergiquement la soirée. Les riffs sont bons. On y perçoit parfois des parties un peu électro. La foule s’agite dans tous les sens. La soirée du samedi s’achève…

Jour 2 : 06 juillet 2025.

Douze heures après, retour à l’Ar’Vran Fest pour la suite du programme. En ce dimanche, six groupes sont programmés. Glyphe, groupe d’Atmosphérique Black Metal, est une récente formation (deux guitares, une flûte, une batterie, une basse, un clavier). Pour la batteuse, la claviériste et la bassiste, c’est leur premier concert de metal. Le chanteur alterne entre chant saturé et voix claire. Des voix telles des mélopées nous enveloppent et nous conduisent dans un monde de fantasy.

Peau de renard autour du cou, le chanteur du groupe français de Viking Metal, Pitkan Matkan, nous offre un chant assez brut et dur. Entre chaque morceau, il prend le temps, mais pas de trop tout de même, de nous les présenter ou d’avoir un mot, juste un, pour le public. Ainsi, introduit-il « Betrayal » par cette phrase d’accroche « Dans la vie d’un guerrier, il n’y a rien de pire que la trahison d’un frère ». Ou encore celle-ci, c’est « un lieu magnifique mais plein de dangers ». Quelqu’un crie « Le bar !! ». Le chanteur rit. « Sanctuary » peut démarrer. Le public est conquis et réactif. Des pogos, en veux-tu en voilà !

Les Chants De Nihil donne un concert agressif, énergique et épique. Le batteur, tout le monde s’est accordé à le dire, à assurer tout le long. Blast beats presque en continu. Il tape même tellement fort que les micros suspendus au-dessus de sa batterie dansent frénétiquement et dangereusement. Un technicien les revisse et c’est reparti !

Belenos, groupe de Black Pagan, reprend le nom d’un dieu gaulois : dieu guérisseur, de la jeunesse et du renouveau. Et c’est bien en guérisseur que se pose ce groupe breton ! Autre coup de cœur du festival. Une osmose se ressent entre les membres du groupe. Les morceaux sont structurés : on retrouve le chant saturé, les caractéristiques du metal (jeu rapide, blast beats, …) et tout cela est entrecoupé de parties plus mélodiques, plus musicales et assez rock. L’effet Larsen y est saupoudré. Cette alternance de styles, de registres et de rythmes rend les morceaux dynamiques. Musicalement, le groupe est très bon. Sur le morceau L’antre noire, on passe de guitares lourdes à une envolée musicale : la foule est solidaire et ne fait plus qu’un. En ce final, l’éclairage passe en une lumière grise, musiciens à l’allure spectrale dans un décor de Montagnes Hallucinées. Des notes lugubres de piano accompagnent la fin de ce concert.

Hallucination ? Rêve éveillé ? Est-ce bien un magicien sur scène ? « Sexy Gandalf », surnom donné au bassiste par le chanteur de Cruachan, avant-dernier groupe de la soirée, donne le ton. Les lumières resteront vertes tout du long. C’est l’Irlande qui débarque en Bretagne ! Ce groupe de Folk Metal, dont Keith Fay, chanteur et guitariste, serait à l’origine de la création de ce genre, fusionne des riffs issus du metal aux airs et histoires irlandaises. Les parties jouées au violon sont très belles et inspirantes. La magie opère.

L’Ar’Vran Fest touche à sa fin. Et c’est Heidevolk, groupe néerlandais de viking et folk metal, qui se charge de clore la IIIe édition de ce festival breton. Le public en redemande et les membres du groupe y répondent : mosh pits, circle pits, slam et Viking Row ! Le public est totalement immergé dans cette ambiance Viking grâce au décorum de Heidevolk (fourrures, bois de cerf, cornes), à son énergie et à sa musique. La foule est rassemblée et ne veut plus partir. Le groupe entonne son mémorable « Vulgaris Magistralis ». Fin du festival.

Une nuit noire et humide n’empêchent pas les derniers festivaliers de s’attarder devant la salle de concert et de se remémorer les meilleurs moments de cet Ar’Vran Fest. Pour certains, on peut dire qu’ils y passeront la nuit. Que se sont-ils dit ? Ça, seuls les Trolls errant sur cette terre Celtique pourront vous le dire…