Membrane + Demande A La Poussière + Maussade (Colmar, le Grillen, 26 avril 2025 ...
Photos + Report : Rose de Lacfeld

C’est dans les entrailles fumantes du Grillen que Step And Blast a lâché les chiens pour une soirée placée sous le signe du sludge, du sale et du lourd. L’ambiance sentait déjà la bière tiède, l’adrénaline et l’overdrive à fond les ballons. Et pour ouvrir les hostilités : les locaux de Maussade, qui, malgré leur nom, n’avaient visiblement pas prévu de nous plomber l’ambiance. Bien au contraire.

Le quintette débarque, visiblement prêt à en découdre. Ça transpire la rage, ça suinte le riff vicié. Et dès les premières notes, c’est le chaos. Un mélange habile de Doom plombant et de Hardcore qui tabasse : les mecs balancent un set tendu comme un arc, chaque titre plus massif que le précédent. On se prend une véritable douche écossaise de violence : chaud-froid entre les breaks lourds comme une enclume et les accélérations hardcore à t’en faire recracher tes tripes.

Derrière les fûts, ça cogne comme si le batteur avait un compte à régler avec la batterie. Les guitares crissent, hurlent, se déchirent dans une avalanche de distorsions, pendant que la basse ronfle comme un moteur au bord de l’explosion. Le tout est magistralement couronné par un chant guttural qui te prend à la gorge et ne te lâche plus. Un hurlement du fond des tripes, qui semble vomir tous les démons du coin.
C’est brut, sans concession, et ça te laisse sonné. Une claque sonore, viscérale, implacable. Et ce n’était que le début de la soirée…

Demande A La Poussière
Après l’ouverture fulgurante de Maussade, la température monte encore d’un cran. Et voilà qu’ils arrivent, toute sirène dehors, comme des démons évadés du périph’ : Demande À la Poussière, tout droit débarqués de Paris. Le ton est donné dès l’apparition sur scène : le noir sera total.
Inspirés par l’univers littéraire de John Fante — et ça se sent — le groupe ne joue pas seulement du sludge : il te conte une apocalypse. moderne, urbaine, saturée d’angoisses. Chaque morceau est une descente, une spirale entre spleen et rage. On flotte entre le calme menaçant d’un silence prêt à éclater, et la furie d’une colère contenue trop longtemps. Et quand ça explose, ce n’est pas pour plaisanter : c’est la déferlante, brutale, abrasive.
Les riffs poissent, les ambiances s’épaississent. Les textes ? Rasoirs affûtés. C’est une poésie de la ruine, du désenchantement, qui s’insinue sous la peau. Le public reste suspendu, hypnotisé. Et puis, sans prévenir, le chanteur saute dans la fosse, comme une bombe à retardement. Il hurle, hurle encore, visage tendu, corps en transe, et cette sirène — mon dieu cette sirène ! — te vrille le crâne et le cœur. Tu n’es plus spectateur, tu es dedans. Pris à la gorge. Percuté de plein fouet.

Demande À la Poussière, c’est un trip sans retour. Un uppercut émotionnel, un chaos magnifiquement orchestré. Le genre de set qui te laisse à genoux, sans savoir si tu viens de vivre un concert ou un exorcisme.

Membrane.
l est déjà tard, les corps sont moites, les esprits bien secoués. Mais la nuit n’est pas finie. Non. Car c’est à Membrane, vétérans venus de Vesoul, que revient l’honneur de clore ce sabbat sonore. 25 ans qu’ils traînent leur sludge noir et viscéral à travers les salles, et ce soir encore, le public est là, fidèle, prêt à se faire broyer.
La grande salle du Grillen déborde. Littéralement. Ça grouille, ça frémit, ça retient son souffle. Dès les premières vibrations, le ton est donné : ce ne sera pas une fin, mais une descente. Une descente lente, douloureuse, dans ce que la musique a de plus lourd, de plus pesant, de plus cathartique. Le son est poisseux, presque tangible. Il s’insinue dans chaque pore, te ligote, t’envahit.

Membrane ne joue pas. Il invoque. Une atmosphère envoûtante, suffocante, s’installe. Chaque riff est un poids supplémentaire sur la poitrine. Chaque frappe de batterie te rappelle que ton cœur bat encore – pour combien de temps ? Le chant est rare, torturé, toujours juste, toujours au bord du gouffre. Ce n’est pas un mur de son, c’est une vague noire qui vient te chercher là où tu pensais être seul.
Et là, dans le noir, dans le vacarme, ta part d’ombre ressurgit. Le groupe n’en demande pas tant : il vient la cueillir, sans violence, mais avec une intensité bouleversante. Ce n’est plus un concert, c’est un rite de passage. Tu ressors vidé, lessivé, et pourtant… vivant. Avec des cicatrices fraîches, et une étrange sensation de plénitude.
Membrane a refermé la nuit avec grandeur. Une cérémonie de sludge dans ce qu’il a de plus noble, de plus viscéral. Et pour cela, un immense merci à Step And Blast, qui une fois encore, a su créer bien plus qu’un simple événement : une expérience.































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