Leymfest 8 (Leyment, 02 septembre 2023)

Le 12 septembre 2023 posté par Metalfreak

Photos : Vigdis
Report : Mitch

affiche

Le Leymfest ! Tradition locale juste avant la rentrée, ce petit festival à l’ambiance familiale reconnue se tient à Leyment (Ain), à 40 kilomètres de Lyon, depuis 2015. Je l’ai découvert un peu par hasard, sur l’édition 2016, pour y voir Chemical Wedding, groupe culte Grenoblois, dont j’étais « drogué » depuis quelques mois !
En 2017, l’affiche traditionnellement dédiée à la fine fleur du heavy régional s’ouvre à une tête d’affiche de choix, avec le Blazing War Machine de Franky Costanza et Izakar (ex-Dagoba), pour une claque visuelle et auditive.
2018, le groupe de votre serviteur, Mother & Pearl (groove metal), a l’honneur de jouer avant les historiques Nightmare, pour une journée parfaite, qui restera gravée dans nos mémoires.
2019 monte encore d’un cran en termes d’ambition, avec une ouverture aux groupes étrangers (Max PieXaon en tête d’affiche), sans oublier Existance (passé en juin dernier au Hellfest), et le Hrothgar de notre cher chroniqueur Quantum. Pourtant, l’affluence déçoit cette année-là, et les années qui suivent plongent l’équipe organisatrice AMM dans la difficulté : deux ans de Covid et une année 2022 blanche, entre tensions financières et une passion trop éprouvée pour lancer un tel événement, des mois à l’avance, sans certitudes.

La passion, pourtant, c’est le moteur de l’équipe, avec ses têtes de proue Christophe Ginet (programmateur) et sa sœur Magali, extrêmement fidèles aux groupes qu’ils produisent, et constamment « au soutien », comme ils disent, sur les scènes de la région, parfois plusieurs soirs par semaine, au détriment de leurs sommeil et finances, tellement présents que certains les prennent pour un couple ! Passion, partage, échanges, ce sont les maîtres mots de l’association AMM (Accords Majeurs et Mineurs), de son équipe de fidèles bénévoles et de son discret et travailleur président Morgan.

Eight Sins #41

Alternant traditionnellement ses festivals avec des dates en salle, « After Leymfest » et « Sur la route du Leymfest », l’asso se refait une santé avec quelques soirées, et refait finalement le grand saut, pour l’organisation du Fest, en 2023. Pour le montage de sa programmation, elle bénéficie du soutien de deux des « boss » de la région, Yves Campion (Metallian, Metallian Prod, Nightmare) et Mick Caesare (Lions Metal Fest, Destinity, Crimson Production), dont on retrouvera l’impact sur l’affiche 2023.

Mais entrons dans le vif du sujet !
Le vaste site, lieu d’un ancien casernement, se présente avec, au fonds, la scène et l’espace groupes (avec des barnums ajoutés par rapport aux éditions précédentes, pour que les formations suivantes se préparent et stockent leur matériel). D’un côté, les stands exposants (33 tours déco, Adipocere, photos…). De l’autre, le merch’ des groupes du jour, un gros marteau de Thor enraciné, le bar. Et à l’entrée, à l’opposé de la scène, les stands de ravitaillement en bouffe (cochon à la broche, burgers…), et de beaux bidons d’essence / huile vintage pour se poser et grignoter.

Et la musique, dans tout ça ?

Whisky of blood #11

Les festivités ont démarré à 17h, avec Whisky Of Blood, groupe grenoblois de hard rock entertainment qui fait taper du pied. On y reconnaît, au chant et à la guitare, Emmanuelson du groupe Ellipsis et nombre d’autres formations régionales, lieutenant d’Yves Campion chez Metallian Prod. Et à la basse, Cyril Caillat, inlassable activiste du glam rock, très looké, avec crête, basse rose flashy, tatouages colorés et attitude « sex drugs & rock n’roll ». Une danseuse à cornes court vêtue vient se trémousser avec les musiciens, le festival est lancé dans la bonne humeur, la mission est accomplie. Artistiquement, rien de très neuf, esprit 80s, « rock n’roll » répété dans chaque refrain (ou presque), du gros hard rock fun et sans prétention, on se met dans l’ambiance et on attend la suite !

Last Addiction #18

 

Les jeunes Nord-Isérois de Last Addiction prennent possession de la scène à 18h15. Last Addiction, c’est le groupe de metalcore qui fait le buzz depuis deux ans à Lyon, ils ont joué sur la majorité des fests de la région (PlaneRFest 2023Polguestergeist 2022Metalifest 2022), et même au grand Wacken 2022, en tant que gagnant du tremplin organisé par Metallian. On se doute donc qu’ils savent tenir une grosse scène, ça bouge, c’est carré, ça joue propre ; les breakdowns où tout le groupe headbangue en rythme succèdent aux parties plus mélodiques, le chant alterne entre clair et scream, Dylan Fournet était même soutenu par le guitariste Gaël Augier sur les parties les plus hargneuses. La palette est assez large, des riffs énervés, des moments plus mélodiques, tout est bien calibré et ne se démarque pas trop des canons du genre. Le concert a été bon, il sera peut-être demain excellent si le groupe parvient à insuffler un peu plus de personnalité artistique dans sa musique et de spontanéité dans son engagement et sa communication scéniques. Histoire que le public sente « qu’il se passe quelque chose d’unique », au lieu d’une performance bien calibrée (mais c’est déjà beaucoup, et en plus, les gars sont des crèmes, donc on les soutient pour la suite, ils se donnent les moyens et le méritent !).

Une demi-heure de changement de plateau sépare les prestations. Elle est toujours trop courte quand on croise tant de têtes connues, avec qui on aurait envie de discuter et de passer du temps. Musiciens de groupes locaux, présents en bénévoles ou festivaliers, spectateurs fidèles des scènes locales, vieilles connaissances de l’équipe d’organisation, photographes, c’est ça, aussi et surtout, le Leymfest, une communauté d’habitués heureux de partager une journée ensemble.

Lodz #06

 

C’est désormais au tour de Lòdz de nous délivrer son post-metal / metal atmosphérique élégant. Lòdz, je vous en ai déjà parlé abondamment ces derniers mois, vous retrouverez chronique et interview en nos pages. C’est là un choix artistique fort de l’équipe AMM, le groupe présentant une vraie personnalité, et se montrant moins immédiat d’accès qu’un combo juste calibré pour retourner la fosse. Pas de circle pit, pas d’hystérie collective, donc, mais un voyage introspectif respectueux de la part d’un public attentif. Bien qu’habitués des grosses scènes, les musiciens sont très contents d’être là et impressionnés par le lieu, ils le disent et le montrent en donnant tout : Julien, basse saturée en avant, bouge constamment ; Olivier secoue sa longue chevelure et, avec ses nombreux effets, tisse des toiles hypnotisantes avec un Éric aussi efficace en rythmique qu’au chant, mélodique mélancolique ou hurlé avec les tripes. Seul Erik, à la batterie, rencontre quelques galères de son, perdant par moments le clic dans ses in-ears. Et soudain, à la barrière, Jérémy « Pif », bassiste de Vesperine et proche du groupe, demande à la sécurité la permission de monter sur scène ! Une des cymbales est tombée de l’estrade batterie, il grimpe donc en catastrophe pour la remettre en place, belle solidarité ! Mais cela ne perturbe pas la perception de la performance, appuyée par un son excellent, comme tout au long de la soirée. Le Leymfest a misé sur une scène plus grande que d’habitude, et aura proposé un confort d’écoute optimal sur chacun des six groupes, point à relever !
Et en tout cas, très beau concert de Lòdz, ce soir ! Une première partie de set consacrée à son nouvel album, avec même l’instrumental « Pyramids », et une conclusion avec le classique « Time Doesn’t Heal Anything » et le définitif « The Sound Of Deceit ». Merci les gars, on adore.

Whisky of blood #20

Ceux qui n’ont jamais de problème de sono (et pour cause !), ce sont les Karlek, fanfare reprenant des classiques de metal extrême, de Septicflesh à Emperor, en passant par Opeth, Rammstein, Destinity ( ! ) ou System Of A Down.
Placés à côté du bar, ils auront la charge d’animer la demi-heure de battement entre les groupes, soit quelques heures de musique à assurer ! Initiative bienvenue et pleine de bonne humeur, les festivaliers se cassent la tête à mettre un nom sur ce riff qu’il leur semble connaître, mais qui les surprend, joué par des trompettes et trombones !
Au moment où je vais me présenter à François, leur leader, connu sur les réseaux mais pas encore dans la vraie vie, le batteur découvre que quelqu’un a déposé un préservatif sur sa caisse claire : « ah, je vais enfin passer une bonne fin de soirée ! ».
Vous retrouverez ici la passionnante interview vidéo de la fanfare Karlek, publiée en avril dernier sur Soil :

Après la machine à émotions Lòdz, changement de registre avec Eight Sins, groupe de pure bagarre et de brassage de pit ! Honnêtement, la soirée atteint son « climax » avec la prestation d’Eight Sins, l’affluence est à son comble devant la scène, les bouées et matelas pneumatiques volent dans la fosse, le concert n’est pas commencé depuis 30 secondes que le frontman Loïc Loxiput demande (et obtient !) un circle pit ! Ce chouchou du Sylak (où son groupe s’est produit plusieurs fois, et dont il vient de dessiner l’affiche 2023, partageant ses talents de tatoueur dans des designs de vêtements, pour la marque Crève, ou donc pour le Sylak) dirige les débats avec humour (« vous m’attirez comme l’aimant / Leyment » et autres boutades). Le crossover thrash hardcore des grenoblois sert d’exutoire à l’énergie en trop du public, qui pète littéralement les plombs 45 minutes durant : un circle pit géant jusque derrière la régie, ça vous parle ?! En mode Municipal Waste ou Insanity Alert, du riff frénétique et de la déconne : on n’en sort pas plus intelligent, mais on s’est bien éclatés !!!

Eight Sins #37

22h, la co-tête d’affiche, Destinity, prend la suite de cette tempête. On n’est plus là dans du gros groupe régional, mais dans du calibre international, avec un groupe qui tourne dans toute l’Europe.
Surprise, Florent Marzais d’In Arkadia est derrière la batterie. S’il remplaçait Florent Barboni sur quelques dates étrangères, officiellement suite à un souci administratif, il semble que cet intérim prenne une tournure de C.D.I., le titulaire du poste étant bien présent sur le site et le stand du groupe (et d’autant qu’In Arkadia semble en sommeil). Cela n’est pas pour me déplaire, la prestation du batteur étant celle qui m’a le plus impressionné sur la petite trentaine de musiciens officiant ce soir : kit minimaliste, droit comme un i, il rayonne à la batterie et propose un jeu littéralement magnifique à regarder, la grosse claque de la soirée !

destinity #15.1
De toute façon, professionnalisme est le mot d’ordre de Destinity : le death mélodique à la suédoise du combo est un rouleau compresseur, joué à la perfection par une équipe qui n’a pas pris sa réformation à la légère. Toutefois, si Mick Caesare joue son rôle de leader et de communicant avec expérience, et que les trois gratteux headbanguent avec énergie, j’ai toujours trouvé que ces derniers manquaient de partage et de spontanéité pendant leurs concerts : comme s’ils étaient dans leur monde, il est, par exemple, impossible de capter leur regard ou de communier avec eux quand on est dans le public, même à la barrière. A ce bémol près, c’est une performance de très haute volée qui est délivrée : mélodie, violence, groove, niveau technique, qualité du son, un modèle de concert. Décidément, ce Leymfest fait un sans faute jusque là !

 

Mai 2022, « Metallian 30 ans Birthday Party » à Grenoble, à l’affiche, Deathless Legacy. Page Facebook du groupe, « International booking : Metallian Production » ; 31 octobre prochain, concert à Grenoble avec… Ellipsis, vous l’avez, le lien ?
Le choix de Deathless Legacy est osé pour le Leymfest : ce groupe italien, auteur de six albums depuis 2014, est-il assez connu en France pour déplacer le public en masse, ce qu’on attend généralement d’une tête d’affiche ? A ce que j’en ai entendu, c’est plutôt la présence d’Eight Sins, de Destinity, et la fidélité au Leymfest en lui-même qui ont motivé le public présent en masse (autour de 400 entrées payantes, record battu ! Avec les accréditations, bénévoles, groupes, etc, nous devions être près de 500 sur le site !).

Deathless Legacy #47
Ceci dit, le metal gothico-horrifique de Deathless Legacy (qui a commencé comme tribute band de l’historique groupe italien Death SS) possède toutes les qualités pour tenir une tête d’affiche et en donner pour son argent au public. Une excellente chanteuse, avec presque autant de tripes qu’une Lzzy Hale (Halestorm), une musique accrocheuse, même pour les novices, et surtout, le groupe propose un vrai spectacle, et pas juste un concert de plus.
Alors, les maquillages, les costumes (pas très raccords entre les membres), le clavier en arc de cercle porté autour du cou, l’intervention de personnages (comme cette sorte de pape évangélisateur qui arrive avec une croix lumineuse, se fait bagarrer, retourner par la chanteuse, et repart avec sa croix renversée), façon shock-rock à la Alice Cooper, personnellement, je trouve ça kitsch… Certains ont adoré, je peux le comprendre, dans tous les cas je conviens que cette prestation a ajouté un côté événementiel et unique à cette soirée, clôturant l’enchaînement de groupes avec un caractère festif et porteur de « merci au public de s’être déplacé en masse ». Un bon choix, donc, au final !

Deathless Legacy #22

Alors, le Leymfest 8, une pleine réussite ? Oui, assurément ! Une affiche alléchante et équilibrée, des conditions techniques excellentes, un accueil du public convivial, une ambiance familiale typique de cet événement, un public mobilisé en masse. Et puis, sans gros moyens financiers, ce sens de la débrouille, pour tirer le maximum d’un site et des ressources, matérielles ou humaines (cf la nuit blanche de Christophe Ginet pour trouver une solution à la galère de transport de Deathless Legacy, bloqué en Italie). Rendez-vous en 2024 ?!

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