Bad Tripes + Faith In Agony + Barn Hooker (Chambéry, le Brin de Zinc, 1er mars ...
Photographe : Chris Metalfreak
Reporter : Quantum
Ce soir-là, c’est de nouveau direction Barberaz que je m’apprête à aller en concert. Au Brin de Zinc qui fête cette année ses vingt ans en 2025 ! Bel anniversaire donc à cette salle de villégiature pour les concerts dans le coin. Véritable institution, Thomas Filachet, qui a repris la gérance en 2015, a réussi à faire de cette salle un vrai lieu de pèlerinage pour les amateurs de concerts intimistes et non moins riche en musique sophistiquée. Vous trouverez par ailleurs une belle interview de son gérant chez nos confrères de La Vie Nouvelle ici.
En compagnie de mon acolyte, ami et photographe chez Soil Chronicles dont il est le chef, Chris Metalfreak, nous voici donc au devant d’une affiche qui a la particularité d’accueillir des groupes qui ont tous des frontwomen. Et question qualité, ces dernières n’en manquent pas d’un point de vue musical, mais chacune à sa manière. La question du chant féminin dans le metal a toujours été un point tortueux chez moi, car j’ai naturellement du mal, sans que je ne parvienne à comprendre pourquoi, avec le chant féminin. Ce n’est absolument pas une question misogyne, je précise ! C’est purement du ressenti d’écoute. Je trouve la tessiture vocale féminine, en terme de chant saturé, pas toujours à ma convenance. Je ne parle même pas du procédé qui consiste à entendre la même voix chez plusieurs chanteuses, car en chant saturé, c’est encore pire même chez les hommes. Simplement, j’ai du mal, voilà. Cela n’enlève en rien que certaines chanteuses ont quelque chose en plus dans la manière de chanter ou sur scène, dans la manière de se mouvoir et d’occuper l’espace qui me met instantanément d’accord car, je le répète, la musique metal ou rock est d’abord et avant tout du théâtre. Le charisme, la posture, ce qui est raconté dans le langage non-verbal est prépondérant. Voilà pourquoi l’affiche de ce soir me sied beaucoup d’ailleurs. Parce que les trois groupes ont chacun une chanteuse qui assure totalement, autant vocalement que théâtralement. Trois groupes sur lesquels j’en connais deux, un déjà vu en concert il y a quelques années, et un que je connais par le biais de la chronique et qui m’a occasionné un vrai coup de cœur artistique ! Il s’agit donc de couvrir le concert qui réunit, en ce 01 mars de l’an 2025, dans l’ordre (du moins le croyait-on) Bad Tripes, Barn Hooker et Faith in Agony !
Bad Tripes est donc le groupe qui m’avait offert un véritable coup de foudre. Ayant chroniqué l’album « Les Contes de la Tripe« en 2018 (publiée un 01 mars en plus, coïncidence !), je n’ai jamais cessé de suivre et d’écouter la musique bien shock rock des marseillais. J’adore énormément le côté grandiloquent, burlesque et presque circassien, sinon fantasque et horrifique, de la musique de Bad Tripes et là où l’excitation était à son comble réside dans les nombreux compliments que l’on m’avait fait des performances live du groupe, qui met un point d’honneur à soigner sa scénographie en y mettant du sien. Sa frontwoman en particulier, Hikiko Mori, est connue et reconnue pour son caractère bien histrionique (sans que ce soit péjoratif) devant son public. Franchement, j’avais hâte de les voir. Concernant Barn Hooker, c’était la parfaite inconnue pour moi et comme je n’écoute jamais un groupe que je ne connais pas avant un concert, j’ai découvert qu’il s’agissait d’un projet monté par Joey, membre d’Opium du Peuple en tant que danseuse, et qui oscille manifestement entre le stoner, le blues et le metal. Je suis très curieux, comme toujours, d’aller à la rencontre du groupe qui nous vient, je crois, de Lyon. Mais à vérifier ! Enfin, tout grenoblois avide de concerts ne peut pas ne pas connaître Faith in Agony. Existant depuis 2016, nos amis isérois sont menés au chant par Madie, ancienne de Nightmare, pour laquelle Chris et moi entretenons une amitié certaine et un profond respect pour le parcours musical. Il est temps donc de laisser place aux festivités !
Première surprise, et non des moindres, vous allez comprendre pourquoi : c’est Barn Hooker qui ouvre le bal. La stupeur est totale d’autant que j’ai annoncé le running order à des spectateurs en annonçant Bad Tripes. Bon… Admettons qu’il y ait eu des arrangements en interne, de dernière minute. Cela arrive. Barn Hooker s’offre à nous et c’est le moins qu’on puisse dire quand on découvre la charisme et la performance scénique de leur leader au féminin Joey, qui entre dans un personnage de cabaret, provocatrice au possible, dans une tenue légère dirons-nous. La musique est résolument rock, avec effectivement de bonne teintures de stoner et un soupçon d’énergie qui évoque le rock anglais agressif, je suis étonné de l’attitude un peu en retrait des instrumentistes même s’il est vrai que la chanteuse prend l’auditoire sous ses apparats, on sent que les musiciens ont un petit peu de mal à se dérider. Mais rien d’extraordinaire, la musique fonctionne très bien et le public n’a pas donné sa part aux lions en invectives et en acclamations. J’apprécie les groupes comme Barn Hooker qui mettent en scène leur musique avec autant de sobriété visuelle, puisque tout repose sur le jeu de scène, le regard, les postures, etc. Parce que musicalement parlant, même si les compositions sont solides et jouées avec beaucoup de talent, on est d’accord pour dire qu’elle n’est pas non plus ultra originale. Elle fonctionne parce que cette musique rock fonctionne naturellement quoi. Quand on écoute cette musique, et que l’on a cette sensibilité aux distorsions de guitares et à l’énergie que cela nous procure, on sait que l’on va aimer la musique. Maintenant, dans ce cas de figure, tout repose sur ce qu’une formation comme Barn Hooker va proposer d’original, et le résultat est que visuellement parlant, mettre en scène ce caractère provocateur et charmeur que Joey maitrise manifestement très bien, était l’élément fondateur pour que la prestation nous sied. Belle prestation, convaincante et efficace ! Maintenant, Barn Hooker avait une place de choix en débutant avec un show qui aurait été très bon en deuxième, j’y reviendrai.
Deuxième surprise de la soirée, preuve en était donc que le running order avait été particulièrement chamboulé : Faith in Agony, annoncé comme fer de lance de la soirée, passe en deuxième ! Alors là, j’avoue ne pas comprendre, jusqu’à ce que l’on m’explique que les musiciens ont tous ou presque la crève, et qu’il en irait de leur capacité à assurer un concert en fin de soirée. Là, je comprends mieux. Mais au final, la formation grenobloise emmenée par sa frontwoman Madie nous offre un concert vraiment digne d’être en haut de l’affiche de ce soir. Un concert qui nous conduit vers une énergie sans faille, subtil maillon manquant entre le rock et le metal, tant la puissance est de mise. Les musiciens sont dans leurs rôles, nous gratifiant d’une scénographie travaillée et presque professionnelle où chacun connait sa partition et sa posture sur le bout des doigts, Madie prenant quant à elle bien évidemment une grosse part de l’attention de l’assistance par son charisme et son énergie communicative qui depuis toutes ces années a forgé sa réputation sur notre belle scène. Mon dernier contact avec Faith in Agony remonte à 2019 et le Matheysin Rock, c’est vous dire que cela faisait une paire ! Et pourtant, je me serais cru comme si j’avais toujours suivi le groupe, comme si j’avais assisté à son ascension grandissante mais qui, à mon sens, mériterait largement plus au regard de la prestation de ce soir de haute volée. Et le public n’a pas fait défaut non plus à ces chouchous du soir ! Actif et toujours aussi répondant aux discours tantôt sérieux, tantôt empruntés d’une certaine complicité avec Madie, la salle n’a pourtant pas été aussi active que je l’espérais. Mais est-ce le côté hypnotisant de Faith in Agony qui sait allier énergie et une forme d’aura ? Je ne le sais pas vraiment, mais il est vrai qu’il est difficile de se laisser totalement porter par la musique quand on a des musiciens aussi actifs et aussi propres. Bref ! Vous l’aurez compris, ce fut un immense plaisir pour moi de revoir Faith in Agony que quelque part, je me promets de voir plus souvent tant il faut soutenir notre scène mais surtout pour espérer un jour les voir dans des concerts ou festivals beaucoup plus hauts, sur le piédestal qui est finalement le leur. Mais je sens que le prochain album qui s’annonce, va davantage propulser nos camarades grenoblois sur une dimension nouvellement méritée. Enfin, en tout cas, je l’espère ! Superbe.
Et donc, étrangeté que je ne cesserais de répéter ce soir quand j’écris, Bad Tripes a été mis en dernier pour clôturer cette belle soirée plein d’amitié et de retrouvailles pour moi ! Mais cela va avoir des conséquences. Comme vous le saviez, j’adore Bad Tripes en studio, et jamais l’occasion ne s’était présentée à moi de les voir en concert. Le problème quand on adore un groupe et que l’on loue le caractère grandiloquent de la musique qui est, il est vrai, une véritable bande-sonore burlesque et horrifique, on s’attend à une prestation idoine, une scénographie de fou ! Moi, je m’imaginais volontiers les marseillais nous proposer un concert digne des cabarets d’horreurs, avec un décorum florissant, des costumes dignes de ce nom, enfin. Tout un apparat exagéré et hyperbolique, qui allait totalement de pair avec la musique. Un peu comme le fait Lordi sur certains concerts que j’ai vus. Et évidemment, vous l’avez deviné, ce ne fut pas le cas. Enfin ! Si. Mais pas autant que je l’imaginais. Hikiko Mori est belle et bien venue avec un costume bizarre, sorte de mélange entre un look visual key et un côté Harley Quinn qui ne laisse sans doute pas de place à de la délicatesse ; mais pour les autres musiciens finalement, c’était soit du réchauffé et du facile en termes de costumes, soit rien de dingue. Et le décor de scène était finalement sobre pour ne pas dire vide. Du coup, j’ai eu une forme d’étonnement qui ne m’a pas lâché du concert et je pense que, pour le coup, c’est totalement de ma faute. Je n’aurais jamais dû fantasmer de la part de Bad Tripes une quelconque scénographie grandiose. Pourtant, tout le monde me disait à l’unanimité que le groupe est absolument génial en concert. Je le confesse donc, pour ce point précis, c’est de ma faute. En revanche, là où vraiment j’ai été déçu, c’est sur la prestation en général. Sur les morceaux en eux-mêmes, je n’ai vraiment rien à redire, les musiciens étaient très bons en dehors de quelques pins habituels qu’on ne relève même plus en temps normal parce que cela arrive à tout le monde, et malgré l’absence de lumières dignes de ce nom et de décors, je me suis quand-même bien fait plaisir et j’ai constaté que, si l’on ferme les yeux, les pistes fonctionnent effectivement très bien en live. Mais bon. Je suis chanteur et je sais que derrière le talent de retranscription des pistes, il y a aussi et surtout le jeu de scène. Et c’est sur ce point précis que je n’ai pas compris ce que je voyais… Des musiciens que j’ai trouvés un peu trop chacun dans leurs coins, avec finalement très peu de communions ou de symbiose et on n’avait même l’impression, et cela prévaut même pour Hikiko Mori que pourtant j’aime beaucoup, que soit ils n’étaient pas en condition totale pour jouer, soit ils s’ennuyaient. J’ai trouvé Hikiko Mori pas tellement dans son rôle de fille fofolle, je l’ai trouvée éteinte sur une bonne moitié de set. Et surtout, désolé par avance de ce que je vais dire, mais la présence de la deuxième chanteuse, je l’ai trouvée vraiment pas intéressante. D’abord parce que, comme je disais sur la posture globale, on la sentait pas à l’aise du tout et pas du tout dans un rôle burlesque, y compris dans le costume avec cette robe noire qui franchement, ne doit pas être confortable pour faire de la scène et n’avait rien d’extraordinaire pour coller avec la musique. Et surtout, je me demande si indirectement, elle n’a pas empêché Hikiko Mori de justement occuper tout l’espace comme elle sait bien faire, et donc ne lui aurait pas coupé la chique au final. Moi, je l’ai ressenti comme cela, avec des pensées bien plus dures sur l’instant. Tout cela fait que j’ai été déçu de la prestation, je plaide honnêtement pour un coup de moins-bien qui arrive à tout le monde tant je pense du bien du groupe ! Et c’est la raison pour laquelle je me suis promis de revenir les voir une prochaine fois, je suis convaincu que ce sera mieux. Et si éventuellement ils pourraient nous proposer une scénographie à la hauteur de leur musique qui est indéniablement une de mes préférées dans leur registre shock rock, je pense qu’ils franchiraient un cap salutaire ! Voilà.
C’est sur ce constat mitigé que j’ai quitté Barberaz pour rentrer dans mes pénates. C’était néanmoins une belle affiche, avec son lot de satisfaction et son lot de déception. J’en profite pour remercier comme toujours Thomas du Brin de Zinc pour sa confiance et tout ce qu’il fait pour la scène. Je remercie bien sûr mon boss et ami Chris Metalfreak avec qui c’est toujours un plaisir de partager une affiche, chacun dans son rôle. Les amis Chris Besse et son chauffeur d’un soir et ceux et celles que j’oublie ! Et à la revoyure !
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