by Mr.Olc | Mai 25, 2011 | Interviews

En 2006, les roumains de Negura Bunget mettent une claque à beaucoup d’amateurs de Metal atmosphérique profond en sortant le monumental Om. D’ailleurs, ceux qui assistent alors à leurs concerts s’en prennent une deuxième puisque l’atmosphère unique de leurs albums est parfaitement retranscrite lors de leurs prestations.
Puis le drame en 2009, le groupe s’éteint. Il reprend vie un peu plus tard avec seulement Negru, batteur, du line-up originel (les deux autres, Hupogrammos et Sol Faur formant un autre projet sublime Dordeduh). Negru s’entoure de nouveaux membres, d’anciens membres sessions notamment, et avec eux sort un autre excellent album Virstele Pamintului.
Voilà pour l’histoire !
Il y a peu, Negura Bunget a pris la route avec Enslaved pour parcourir l’Europe et surtout le Nouveau Casino de Paris. J’ai bien évidemment saisi l’occasion pour enfin interviewer ces fameux roumains.
Negru nous présente donc l’ensemble des projets actuels de Negura Bunget et l’idéologie qui accompagne chaque nouvelle réalisation de ce groupe unique.
Comment se passe la tournée jusqu’à présent avec Enslaved ? Ca doit être le pied de tournée avec des musiciens comme eux.
Ca se passe vraiment bien, on ne pouvait pas espérer mieux qu’Enslaved comme tête d’affiche, ça nous convient totalement.
Je crois qu’il y a eu pas mal de nouvelles choses pour Negura Bunget depuis la sortie de votre dernier album Virstele Pamintului : un DVD live Focul Viu et un EP. Pourrais-tu nous en dire davantage sur tout ça et s’il y a d’autres nouvelles que je n’ai pas évoquées.
Le concert que vous pourrez voir sur le DVD date de 2008, c’est donc l’ancien line-up qui est sur scène. S’il ne sort que maintenant c’est parce que nous venons juste de finir le montage. Ce DVD a aussi pour rôle de conclure l’histoire de Negura Bunget sous son ancienne forme.
L’EP quant à lui marque la fin de notre collaboration avec Code666. Désormais, nous travaillons avec Prophecy et, avec eux, notre prochain projet sera de réaliser une trilogie.

Oui j’ai un peu entendu parler de cette Transylvanian Trilogy, de quoi s’agit-il exactement ?
Nous comptons réaliser 3 albums qui aborderont à la fois le domaine auditif et le domaine visuel. Les albums comporteront un CD et un DVD. Concernant le DVD, il ne faut pas s’attendre à voir des personnages et suivre des dialogues.
Il s’agira d’une sorte d’exploration visuelle comme vous l’avez fait pour le clip de Dacia Hyperboreana ?
Oui, ce sera plus dans cet esprit là.
Devons nous attendre un changement important dans votre musique avec ce nouvel EP Poarta de Cincolo ou reste-t-il dans lignée typique de Negura Bunget?
Je crois que musicalement, cet EP se situe entre nos premiers albums et Virstele Pamintului . Cependant, nous avons aussi expérimenté pas mal de nouvelles choses. Il n’y a que 4 morceaux, et il ne dure qu’une demi-heure mais il varie énormément et propose un spectre musical très large: on y trouve aussi bien des mélodies traditionnelles que des passages plus modernes.

Pour le DVD Focul Viu, étant donné, comme tu l’as précisé, que c’est l’ancien line-up qui est sur scène, n’y a-t-il pas eu de problèmes de droits pour le réaliser ?
Non, car c’est un projet qui avait déjà été abordé avant que le groupe ne se sépare. Nous devions le réaliser de toute façon. Tout était prêt déjà à l’époque mais ça m’a pris plus de temps que prévu.
Reparlons un peu de cette trilogie qui va paraitre. Pourquoi l’avoir intitulée Transylvanian Trilogy ?
Cette trilogie est une sorte de devoir que nous avons. Si lorsque l’on évoque la Transylvanie, ce que les gens s’attendent à y voir sont des loups et des vampires, ils seront déçus, c’est un peu différent ! En réalisant ces DVD, nous voulons que les gens aient une vision claire et précise de ce que la Transylvanie signifie pour nous.
Voici comment cela va se présenter : la première partie de cette trilogie portera sur la nature, nous y verrons différents lieux ainsi que les légendes et mystères qui les entourent. Le rendu sera extrêmement détaillé et précis puisqu’il y aura à la fois la musique et les images pour dépeindre tout cela. La deuxième partie témoignera de la façon dont ce paysage évolue avec le temps et la présence de l’Homme. Enfin, le troisième volet portera sur les habitants, là aussi ce sera très complet. Comme je le disais, c’est notre devoir de réaliser cela, aussi bien pour nous, car cette région est en nous depuis le début, que pour les gens qui y vivent.
C’est un hommage à vos racines. Trois albums qui contiennent chacun un CD et un DVD, c’est un projet ambitieux. As-tu une idée de la date à laquelle nous pourrons commencer à jeter un œil et une oreille là-dessus ? Car tu sembles déjà avoir une idée bien précise de ce que vous allez faire.
Je pense qu’il nous faudra une année pour chaque album. L’année prochaine nous réaliserons le premier volet, l’année suivante, le deuxième, et ainsi de suite. Nous avons déjà enregistré pas mal de choses, c’est un projet important auquel nous nous sommes bien préparés.
Chaque album aura deux versions musicales, la version du CD qui correspond davantage à ce que nous faisons actuellement, et la version du DVD qui sera plus calme, plus atmosphérique, afin que les gens qui ne sont pas dans le Metal puissent tout de même appréhender ce que nous leur proposerons. D’ailleurs, pour cette musique nous travaillons avec un ami à nous qui est compositeur et gère un orchestre. Cela va nous permettre d’élargir nos horizons et d’accentuer encore plus notre musique. C’est un énorme travail qui nous attend !
Nous allons revenir maintenant sur votre dernier album. Malgré la division au sein du groupe, Negura Bunget a réussi à proposer un nouvel album qui garde le même feeling que les albums précédents. Comment avez-vous réussi cela ?
En fait, quand Hupogrammos et Sol Faur sont partis, nous nous sommes demandé si nous pourrions continuer sans eux. Heureusement, nous avons rapidement réussi à reformer un line-up complet et une fois cela effectué il ne restait plus qu’à travailler très dur pour que nous nous remettions sur pied. Si tu sais exactement ce que tu veux faire, tu n’as qu’à travailler pour y arriver, c’est assez simple ! Et c’est ce que nous avons fait.
Comme certains musiciens étaient avec nous déjà avant en tant que membre session pour les concerts, ils savaient exactement vers quoi Negura Bunget devait aller et finalement, cet évènement leur a permis de pouvoir enfin prendre part activement au choix du cap que le groupe allait suivre.
Aujourd’hui comment perçois-tu l’effet que cette séparation a eu sur le groupe ?
Je pense que ça a permis d’apporter à Negura Bunget davantage d’influences car aujourd’hui tous les membres prennent par à la composition et même si nous ne retenons pas toutes les idées apportées, il est toujours bon d’en avoir le plus possible, aussi bien pour réussir à composer plus rapidement que pour avoir un maximum d’influences variées. Tout cela a donné à Negura Bunget un nouveau visage et pour nous, Virstele Pamintului n’est que le début.
« Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort » ?
Ça résume parfaitement la situation oui !
Depuis le début avec Negura Bunget vous avez choisi de garder votre langue, le roumain. Quelle sont les raisons qui ont motivées ce choix ?
Avant tout, bien sûr, ce choix témoigne de notre attachement à notre pays, en gardant notre langue, nous montrons qui nous sommes et d’où nous venons. Et de toute façon, même si nous voulions chanter en anglais ça ne sonnerait pas bien. Pour notre dernier album, nous avions fait des traductions en anglais pour faire un essai mais nous n’en avions pas été satisfaits. Peut-être cela permettait d’avoir une idée de ce que nous disions, mais tellement de nuances avaient été perdues dans le procédé de traduction que nous avions préféré ne pas continuer. De plus, nous avions perdu les sonorités de notre langue, et le rendu avec la musique était vraiment étrange.
Peut-être par la suite, pour nos prochains albums, nous mettrons dans le livret une traduction anglaise partielle des textes pour que les gens puissent saisir ce que nous exprimons mais je la ferai moi-même, même si ce sera moins soutenu, ça donnera une idée juste de ce que nous voulons dire.
Et quel est le sens de Virstele Pamintului ?
En roumain, Pamintu veut dire à la fois la terre et le pays. Virstele Pamintului voudrait donc dire l’âge de la terre et à la fois l’âge du pays. Cela confond la pensée tribale ou patriotique avec une pensée universelle plus grande.
Comment décrirais-tu l’idéologie de Negura Bunget ?
Nous nous intéressons à notre nature, à ce que nous sommes au fond de nous. Même si nous n’en parlons pas directement, tout ce que nous abordons est lié à cette pensée, cette recherche. Chaque nouvel album présente une étape différente dans cette réflexion.
Y a-t-il des groupes dans la scène actuelle desquels tu te sens assez proche ? Musicalement ou spirituellement.
Enslaved est le meilleur exemple je pense, Opeth également. Il y a aussi un groupe finlandais qui s’appelle Tenhi, ils font une musique très profonde que j’adore.
Dans Negura Bunget vous utilisez de nombreux instruments traditionnels, on a l’impression qu’il y a un désir d’expérimenter de nouveaux instruments.
Nous ne cherchons pas à tout prix à mettre un maximum d’instruments folkloriques mais il nous arrive souvent de penser que tel passage sonnerait mieux en utilisant un instrument autre que la guitare ou d’autres instruments plus communs. Donc nous partons régulièrement à la recherche de l’instrument qui conviendra le mieux. Ça fait partie du travail de composition en fait, trouver le bon son et parfois même la bonne personne qui pourra nous construire cet instrument ! Cela nous oblige également à savoir jouer de ces instruments et nous élargissons nos capacités. Mais bien sûr, c’est un travail que nous apprécions fortement.
Pour finir, parlons d’un petit détail. Sur la pochette de votre dernier album il y a une petite écriture. A quoi correspond-elle ?
Ce sont des initiales. Il y a écrit « nb / vp » pour Negura Bunget / Virstele Pamintului. Le type qui s’occupe de notre visuel avait beaucoup de travail lorsqu’il a fait notre artwork et il avait noté ça pour ses travaux qui concernait notre album. Comme nous trouvions ça joli, nous avons choisi de le faire figurer sur la pochette.
C’est lui qui a fait la pochette d’Om également ?
Oui, et aussi Inarborat Kosmos entre autres.
Ah, je ne savais pas ! Et est-ce qu’il fera les pochettes des albums de la Trilogie ?
J’aimerais beaucoup ! Mais ça va être compliqué, il vit en Nouvelle-Zélande maintenant. Ce qu’il fait convient parfaitement à notre musique, on travaille avec lui depuis des années, si ça peut continuer tant mieux !

by Mr.Olc | Mai 1, 2011 | Live Reports
Pour une fois, les Français ne pouvaient pas se plaindre d’être mal desservis par une tournée. Lors de leur traversée en France,
Enslaved et
Negura Bunget se sont arrêtés à trois reprises : Lille, Limoges et enfin Paris.
Les Parisiens étaient même encore plus chanceux que leurs compères puisque dans leur ville venaient s’ajouter à l’affiche les Norvégiens de
Vulture Industries.
Apparemment, ces Parisiens étaient conscients de leur chance puisque le Nouveau Casino affichait complet en ce soir du 25 Avril 2011, aux grands regrets de certains.
Le déplacement en valait-il donc la peine ?
Houlà, oui !
L’interview avec Negru de Negura Bunget m’ayant fait louper le début du concert, j’entre dans un Nouveau Casino déjà rempli et bien chauffé par Vulture Industries qui joue l’excellent The Bolted Door, issu de leur dernier album The Malefactor’s Bloody Register. S’il m’avait semblé, lors de leur dernier passage (avec Taake), que le public avait été peu réceptif, ici j’ai eu le plaisir de voir que beaucoup ont été convaincu par la prestation des vautours en bretelles noires et chemises blanches. Les applaudissements ne se font pas désirés à la fin du morceau et le groupe reçoit avec un plaisir non-dissimulé l’enthousiasme de cette salle remplie. Bjornar, au chant, annonce déjà le dernier morceau A Path Of Infamy, tiré de leur premier album, qu’ils exécutent toujours avec cette petite scénette théâtrale entre un des guitaristes et le chanteur. Après un salut général effectué avec de grands sourires sincères et des « vive la France », le groupe remballe ses affaires sous des applaudissements amplement mérités.

Puis, les instruments étranges envahissent petit à petit la scène, signalant la venue prochaine des roumains de Negura Bunget. Leur dernier passage à Paris s’était fait en 2008 au Klub, suite au refus par la salle prévue initialement de les faire jouer. Le groupe, avec son line-up initial, avait donc sorti tout son attirail dans une salle de 30m² à tout casser et c’était magique !
Depuis la séparation du line-up original, Negura Bunget avait sorti un album, Vîrstele Pămîntului, qui m’avait tout à fait satisfait, même s’il ne m’avait pas autant touché que son prédécesseur Om. J’avais donc réellement envie de voir comment le groupe s’en sortirait en live, privé de l’hypnotisant chanteur/guitariste/instumentbizarre-iste : Hupogrammos.
Devant un Nouveau Casino blindé et bouillant, le groupe brandit ses énormes trompettes (l’inculte que je suis ne connais pas le nom de cet instrument) et entame son set avec Țara de Dincolo de Negură. Dès ce premier morceau, certaines faiblesses se font ressentir. La guitare lead me semble manquer de précision et le son des « trompettes » n’est pas juste, cela donnant un aspect général un peu brouillon. La faute au son ou au musicien ? Je n’en sais rien, mais quelques minutes plus tard, ces deux points ne m’empêchent pas d’entrer dans l’ambiance particulière de la musique du groupe. Le medley qui s’en suit, Pămînt / Cunoașterea Tăcută, fait ressortir une autre déception, la voix d’Ageru ne me convainc pas, et cela est encore plus flagrant sur les morceaux issus de l’album Om. Bien que ce dernier excelle à la multitude d’instruments qu’il manipule, le chant reste faible et quelconque, notamment sur les passages en chant clair/crié. Enfin, étant placé à l’arrière de la scène, il lui est difficile de faire ressentir un peu de charisme, là où Hupogrammos était (et est toujours au sein de Dordeduh) impressionnant.
Mais passons cette comparaison avec l’ancien line-up… Le groupe exécute ensuite le morceau instrumental Norilor, le tout nouveau La Marginea Lumii et surtout l’énormissime Hora Soralelui pour mon plus grand plaisir. L’ambiance prend et se renforce au fur et à mesure que les minutes passent, puis vient le moment du dernier morceau, Dacia Hiperboreană, avec son intro planante. Encore une fois, le public ovationne le groupe qui plie ses (nombreuses) affaires pour laisser place à la tête d’affiche.
De mon côté, je ne peux m’empêcher d’être un peu déçu tout en étant satisfait. Le show était très bon, les morceaux sont excellents et magiques, mais tout de même… Il manque un vrai chanteur qui puisse emmener avec lui les auditeurs et reprendre correctement, si ce n’est mieux, les parties faites par ses prédécesseurs. Il en reste que Negura Bunget a apporté 45 minutes de magie lors de cette soirée, ne faisons pas les difficiles !

Enfin l’heure des géants norvégiens ! Enslaved, à travers ses 20 ans d’existence (et oui !), a su fournir au Metal un bon nombre d’albums d’une grande qualité et faire de sa discographie un monument en constante évolution tout en restant fidèle à l’esprit qui l’anime depuis ses débuts. Comme si cela ne suffisait pas à faire d’eux un grand groupe, leurs concerts sont aussi bons que leurs galettes ! C’était, je crois, la cinquième fois que je voyais Enslaved ce soir là, je n’avais jamais été déçu jusqu’à présent, et je ne le suis toujours pas aujourd’hui !
Le groupe était en grande forme ce soir là comme en témoignent les interventions de Grutle, empreintes d’un humour à la Akerfeldt en plus succins. Le ton emprunté et les blagues de Grutle laissent à penser que des bouteilles ont dû précéder leur venue sur scène, et c’est tant mieux.
Sans grande surprise, le set s’ouvre sur les deux premiers morceaux de leur dernier album. Les « talents » de l’ingé son permettront au public de se faire péter les tympans par la voix de Grutle pendant une demi-seconde avant de pouvoir avoir un volume de chant correct. Les problèmes de son viendront d’ailleurs également perturber Isdal, guitariste, plus tard dans le set, sans que cela n’affecte la bonne humeur du groupe. Enslaved joue ses classiques, certes la surprise n’est pas vraiment au rendez-vous, mais la baffe, elle, est bien là ! Fusion of Sense and Earth, Ground, Return To Yggdrasil, Giants, Lightning, Isa, RUUN en rappel, les quatre derniers albums sont à l’honneur. Un petit retour sur les vieux albums permettra d’assister au très, très, très vieux Allfáðr Oðinn, afin de satisfaire également les fans de la première heure.
Durant tout le set, la précision du groupe, même si on n’en doutait pas, est bluffante. Les morceaux s’enchainent les uns après les autres avec simplicité et efficacité.
Enslaved, c’est un groupe de professionnels passionnés. Le résultat ? Un show parfait (si on enlève les petits merdes de son) qui emporte avec lui un Nouveau Casino complet dans une transe totale !

Encore un excellent concert au Nouveau Casino. Décidément, cette salle est un porte-bonheur ! Les trois groupes ont convaincu et semblent avoir pris leur pied sur scène. Le concert étant sold-out, j’imagine que les organisateur ont eux aussi pris leur pied. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes alors ? Pour ceux qui étaient là, oui je pense. Pour ceux qui ont loupé cette date de dingue… Dommage !
Report : Mr Olc, Photos : juliA photosynthese.
(Galerie photos bientôt en ligne !)
by Mr.Olc | Nov 9, 2010 | Live Reports

C’est une affiche venue entièrement de Bergen qui se produit ce soir au Glaz’art. Cependant, bien que les groupes aient la même ville pour origine et même des membres en commun (entre Sulphur et Vulture Industries ainsi qu’entre Helheim et Taake), du point de vue du style l’affiche est clairement hétérogène.
Chargé de chauffer la salle, Sulphur entame son set devant un Glaz’art loin d’être blindé. Le groupe joue un black léger teinté de death et d’une ambiance assez épique je dirais. Malgré un son moyen (qui s’arrangera par la suite bien heureusement), on sent que les compos de Sulphur dégagent une puissance certaine. Le set se passe tranquillement, satisfaisant un public maintenant chauffé. Sulphur remplit donc son contrat sans problème, sans non plus proposer quelque chose d’extraordinaire. Pour les experts, voici quelques titres joués parmi les six de leur set : Realm of darkness, The Purifying Flame, Luna Noctiluca.

Sulphur
Viens ensuite l’ovni de l’affiche : Vulture Industries. Les membres entrent en scène, vêtus de chemises blanches salis, et de bretelles s’il vous plait, et entame immédiatement Race For The Gallows premier titre du dernier album. Le groupe semble venir d’une autre époque, aussi bien par leurs tenues, que par le comportement du chanteur qui me rappelle un bonimenteur tentant de vendre des produits miracles à la foule en l’alpaguant. Grimaces et démarches théâtrales sont de la partie et collent tout à fait avec le style de musique que propose le groupe. Bien sûr, face à un public venu pour Taake, difficile de satisfaire la masse et ça se ressent. Cependant, un bon nombre de personnes se laisse prendre au jeu et acclame ces personnages sortis tout droit d’une nouvelle de Poe. Le groupe pioche les meilleurs morceaux de leurs deux albums : Pill Of Conformity, Blood Don’t Flows Streamline… Sur The Hangman’s Hatch, le chanteur en profite pour se passer la corde au cou et jeter l’autre bout dans le public. J’avoue avoir un peu craint qu’un petit comique s’amuse à tirer dessus pour le trainer hors de la scène, mais ça n’a pas eu lieu, tant mieux ! Le set se finit par The Bolted Door, I Hung My Heart On Harrow Square et bien sûr l’excellent A Path Of Infamy sur lequel le chanteur et le guitariste nous livrent une courte scénette à deux voix. Le set se clôt et le groupe quitte la scène sur des applaudissements modestes mais sincères.

Vulture Industrie
Retour à quelque chose de plus conventionnel avec Helheim : ambiance guerrière, cotte de mailles, bruits de rivière, projection de guerriers, de symboles païens, bref nous avons affaire à du black metal viking à n’en pas douter. Le public est plus enclin à se défouler sur ce genre de musique car les premiers gros mouvements de foule apparaissent. Le chant est assuré principalement par le bassiste, soutenu régulièrement par le guitariste. La musique fait son effet, on lèverait bien sa hache ou son hallebarde si on en avait une.
Le dernier groupe se prépare et tout le Glaz’art attend devant la scène. A peine les membres font-ils leur apparition que les cris montent. Pas de doute possible, la majorité est venue pour Taake ce soir, et elle ne sera pas déçue ! Le set commence fort avec l’agressif Voldtekt, puis Umenneske, le meilleur titre du dernier album selon moi, et comme pour exaucer mon vœu prononcé lors d’une discussion un peu plus tôt : les trois premiers titres de Hordalands Doedskvad enchainés les uns après les autres. Un pur moment de violence et de haine, les têtes s’élancent avec frénésies, la fosse exulte ! Sur scène, Hoest, le chanteur, se lâche, son maquillage blafard et ses yeux blancs lui donnent un air de revenant allumé vociférant sa haine sans faiblir. Et comme pour prouver qu’il ne peut être vaincu, il écrasera à maintes reprises au long du set le micro contre son front, faisant couler petit à petit le sang le long de son visage. Cela finira d’ailleurs par lui faire un joli nez rouge : Hoest, un clown original pour l’anniversaire du petit Matéo !

C’est donc avec facilité que ce frontman déchainé entraîne le Glaz’art. Tout au long du set, rien ne faiblit, la rage progresse, la foule crie dans le micro de Hoest qui la soutient avec ses fameux « Uw ! » (parfois même des « Houlala » bien frenchy parce qu’on peut s’ouvrir la tête et rigoler un peu aussi !) .
Le set se finit, Hoest quitte la scène le visage en sang, sang qu’il aura d’ailleurs pris soin d’étaler sur certains visages. Le public en veut plus mais n’en obtiendra pas, Taake a tout donné et ça s’est bien fait ressentir, ce show était un grand moment pour les fans d’un black metal simple et efficace.
Encore un excellent concert pour ce mois d’octobre en définitif. Je retiendrai l’originalité de Vulture Industries et la présence indéniable du chanteur de Taake, deux prestations complètement différentes à ne pas oublier !

Mr Olc
by Mr.Olc | Nov 7, 2010 | Interviews

C’est de Shining, le groupe norvégien et non son confrère suédois, dont il est question ici. Evoluant sans cesse, ce groupe a sorti cette année un album au style novateur et à la violence incontestable au nom évocateur de Blackjazz, définissant ainsi ce style si particulier que nous propose le groupe.
C’est dans les bureaux de l’équipe de La Maroquinerie que je vais avoir le plaisir de retrouver les norvégiens de Shining, presqu’au complet pour cette interview. J’entre dans la pièce, hésitant, et me retrouve face à un grand blond, Bert Moen (claviériste), et derrière lui, un petit barbu amusé, Torstein Lofthus (batteur), un rouquin souriant, Tor Egil Kreken (bassiste) et le chanteur saxophoniste Jørgen Munkeby. Ce dernier ne prendra pourtant pas part à l’interview et ira s’assoupir dans un coin de la pièce. Une fois les présentations faites, je m’installe et entame donc ce qui tiendra plus de la discussion que de l’interview avec ces trois sympathiques musiciens.

Bonsoir tout le monde. Je crois que c’est la deuxième fois qu’une tournée européenne vous amène à Paris, la première étant celle que vous aviez fait avec Enslaved. Que s’est-il passé depuis ce moment ?
Tor : C’est seulement la deuxième ? La dernière fois on n’avait pas …
Bernt : Non, on n’était pas passés par Paris la dernière fois.
Oui, oui, j’ai bien dis « à Paris ».
Torstein : Et bien, un nouvel album : Blackjazz !
Tor : Et des nouveaux membres, il me semble…
Bernt: Oui, lors de notre précédent passage ici, ce n’était pas le même line-up.
Torstein : Tous les membres sont nouveaux à part le chanteur et le batteur.
Bernt: Le groupe a également changé de direction musicale.
Tor : En fait presque tout est nouveau ! (rires)

Je vois ça, c’est une tournée complètement différente pour vous.
Torstein : Ouais mais le saxophone est toujours là ! (rires)
Oui, ça, ça s’entend rapidement ! Et après cette collaboration avec Enslaved, pour la tournée mais également pour le Armageddon Concerto durant le Roadburn Festival, puis avec votre nouvel album Blackjazz, beaucoup plus violent que les précédents, avez-vous l’impression d’avoir attiré une partie du public fan de metal extrême ?
Bernt: Peut-être que nous nous rapprochons de ce genre de public, mais de notre point de vue, ça n’a pas vraiment changé. Les fans sont là depuis le début, et que ce soit à travers du free-jazz ou quelque chose de plus violent, c’est l’énergie qu’ils cherchent. Ce n’est pas si différent, même si notre son a beaucoup évolué. Et puis, nous repoussons constamment les limites et explorons divers horizons donc …
Oui, en repoussant les limites vous mettez à votre portée un public plus large et plus varié.
Bernt: Voila, c’est exactement ça.
A propos de ce show, le Armageddon Concerto, il y a un ressenti plutôt drone par moment. Est-ce un style musical duquel vous vous sentez proches ?
Bernt: Je crois que la côté drone vient surtout d’Enslaved car je pense que leur musique, bien qu’elle soit jouée rapidement, part à la base d’idées longues et lentes.
Tor : Non mais il y a aussi une des chansons que nous jouons et qui n’apparait pas sur l’album. Cette chanson qu’on a jouée lors de ce festival a en effet un feeling drone. Ce genre de compo est liée au fait que nous écoutons des groupes comme Sunn O))). On joue parfois cette chanson live d’ailleurs. Elle est sur la version vinyle mais pas sur le CD Blackjazz.

Se pourrait-il qu’un évènement comme celui-ci se reproduise ? Avec Enslaved ou un autre artiste d’ailleurs. Car c’est dommage que cela n’ait pas débouché sur un CD live ou un DVD.
Torstein : Ca pourrait se reproduire, mais ce n’est pas au programme. Là on se concentre sur Shining uniquement. On va faire un DVD de Shining, c’est la priorité.
Mais si ça se représente vous seriez partant ?
Torstein : Complètement ! Mais personne ne peut savoir si ça se représentera. On va dire: “Qui vivra verra !” (rires)
Album après album votre musique change constamment. Grindstone était très différent d’In the Kingdom Of The Kitsh You Will Be A Monster et Blackjazz est encore plus différent de Grindstone. Pensez-vous qu’avec ce dernier album vous avez finalement trouvé votre voie ou n’est-ce encore qu’une étape dans une évolution constante ?
Bernt : Je crois que nous sommes très satisfaits du son que nous avons aujourd’hui. Comme on l’a dit, il y a eu beaucoup de nouveaux membres et chacun d’entre eux a apporté une influence plus violente. On ne sait pas comment sera le prochain, peut-être sera-t-il pareil, peut-être que nous irons encore plus loin dans le concept du Blackjazz que nous avons créé pour définir notre musique… On ne sait pas trop.
Tor : Il y a pas mal de chance pour que nous continuions dans ce mélange des genres, en allant plus loin.
Torstein : Enfin on verra bien, on n’a pas encore commencé ! (rires)
Concernant ce dernier album, d’où proviennent ce terme “blackjazz” et la musique qu’il définit ?
Tor : Le nom en lui-même provient de l’album de Venom Black Metal et de l’album Free Jazz d’Ornette Coleman. Nous avons donc pris un peu des deux car ils ont tout deux servi à définir un nouveau genre de musique. Nous les avons donc utilisés pour définir notre propre genre.
Bernt: Mais notre musique n’évoque pas vraiment ces deux albums. C’est le concept que nous avons repris plutôt que la musique : repousser les limites et en définir d’autres. Car beaucoup de gens nous demande de définir notre musique donc au final on s’est dit que c’était plus simple de lui donner un nom qui lui soit propre !


Oui c’est vrai qu’autrement ça aurait été assez difficile.
Bernt: Exactement, on peut associer beaucoup de genres à ce que nous faisons, donc on a fait de notre mieux pour en trouver un qui définisse simplement tout cela.
Et au final Blackjazz fonctionne parfaitement ! Tu as parlé de ces deux albums Black Metal et Free Jazz qui ont engendré chacun un nouveau genre. Quels liens vois-tu entre ces deux genres ?
Bernt: Le metal extrême et le free-jazz dégagent tous les deux une grande quantité d’énergie que l’auditeur reçoit de plein fouet. Et cette énergie, venant de musiques tout à fait différentes, est à peu près la même. Nous faisons pas mal d’improvisations free-jazz avec des instruments électroniques qui du coup finissent par se rapprocher du metal extrême. Au final le lien est assez étroit, il reste confiné sur le plan de l’énergie. On ne peut pas établir de lien entre le free-jazz et une musique comme celle de Scorpions par exemple, ça n’a rien à voir, mais avec le metal extrême oui !
Grâce à l’énergie qu’ils dégagent tous les deux ?
Bernt: Oui c’est l’énergie le point commun.
Torstein : Nous avons pris tout le côté émotionnel profond du metal extrême et nous l’avons interprété façon free jazz en quelque sorte.
Il y a un petit côté vieux jeu vidéo dans la musique de Shining, est-ce voulu ?
Bernt : En fait, certains sons de clavier proviennent directement de la puce de son qui était utilisée sur le Commodore 64 !

Ah ok, ça explique le côté très rétro de certains sons ! (rires)
Bernt: Oui c’est très vieux ! (rires) Donc, si ça sonne comme un jeu vidéo parfois c’est parce que les sons viennent réellement de cette vieille console de jeux vidéos ! Ce genre de son créer un lien avec le côté industriel de notre musique. En plus de cela, le son a été mixé par Jørgen [Munkeby : chanteur, saxophoniste, guitariste du groupe –ndlr] et Sean Beaven. Sean Beaven a beaucoup travaillé avec Nine Inch Nails [ainsi qu’avec Slayer, Gun’s and Roses ou encore Marilyn Manson –ndlr] donc ça contribue également à cette touche électronique dont tu parles.
La voix de Jørgen, en plus d’être devenue complètement allumée, est plus présente sur cet album que sur les précédents. Ce changement a-t-il été facile à effectuer ?
Tor : Je pense que nous nous sommes tous beaucoup entrainés, et Jørgen s’est particulièrement entrainé au chant car dès le départ nous voulions mettre la voix en avant. Tout le monde a travaillé dur et nous avons voulu montrer les progrès effectués par chacun.
Bernt: Cependant, il ne s’agissait pas de mettre plus de chant pour rendre la musique plus commerciale. L’idée est venue d’elle-même.
Oui cela rajoute même d’avantage de puissance et de violence à la musique. Pourriez-vous trouver trois mots pour définir la musique de Shining ?
Bernt: (rires) Ah c’est dur, c’est justement pour ça qu’on a créé le mot “blackjazz” parce qu’on en est incapables ! Enfin disons … énergie, concentration et discipline.
Et pourquoi ces trois-là alors ?
Bernt : Notre musique est très énergique ! Et nous répétons très souvent, pour maitriser parfaitement notre musique jusqu’au moindre détail, pour la reproduire facilement et dégager le maximum d’énergie dans des situations comme les concerts.
Tor : Oui, et pour la concentration, de mon point de vue, nous nous comportons comme un groupe d’improvisation, nous jouons également avec le rythme, et sur scène nous devons toujours rester concentrés sur ce que font les autres pour pouvoir suivre le moindre changement improvisé.
Torstein : Discipline, c’est pour moi ! Je suis Torstein The Punisher ! (rires) La discipline est quelque chose que nous travaillons durant nos nombreuses répétitions. Si en effet nous improvisons beaucoup, il faut que chaque membre reste discipliné et attaché à la trame qu’il doit suivre. Et comme chaque membre maitrise son instrument, ils ont tendance à surjouer, donc un peu de discipline permet de garder ces fans d’impro dans un certain carcan ! (rires)
Tor : C’est surtout ce grand là qui surjoue ! (rires) [parlant justement de Torstein –ndlr]
Torstein : Non, je plaisantais ! (rires)
The Madness And The Damage Done est un bon titre qui résume bien l’effet que votre musique peut avoir sur l’auditeur. Aviez-vous pensé à ce titre comme titre d’album avant de trouver Blackjazz ?
Bernt: Blackjazz est apparu quand nous étions entrain d’enregistrer je crois?
Tor : Oui, assez tôt au final
Bernt : The Madness and the Damage Done c’est un titre qui nous convenait également, qui colle à la musique que nous faisons, mais dès le début il était question d’un titre qui définirait notre musique et nous avons fini par arriver à Blackjazz.
Concernant la playlist de l’album, il y a quelques particularités : Exit Sun et The Madness and The Damage Done sont divisés en deux parties que l’on retrouve parfois plus tard. Pouvez-vous expliquer ce choix concernant la structure de Blackjazz ?
Torstein : Si tu écoutes l’album du début à la fin, que tu prends l’album comme un tout, cette structure aide à appréhender le concept du CD.
Oui c’est agréable de retrouver des mélodies du premier morceau plus tard dans l’album.
Tor : C’est quelque chose qui se fait beaucoup dans le jazz et dans la musique classique.
Oui comme les mouvements…
Tor : Oui c’est ça, et quelques passages sont même tirés de l’album précédent. C’est quelque chose que nous aimons bien faire, c’est marrant d’entendre à nouveau une mélodie qui, en plus, est jouée différemment.
Bernt: C’est aussi un moyen de faire en sorte que l’album ne soit pas qu’un enchainement de morceaux différents. Cela permet de créer des liens entre les chansons.
Oui, une telle structure vous permet de renforcer la cohésion de l’album.
Bernt : C’est ça, c’est lié au concept.
Pouvez-vous m’expliquer pourquoi vous avez choisi de reprendre 21st Century Schizoid Man de King Crimson?
Torstein : C’était l’idée de notre ancien guitariste Even Helte Hermansen. Une radio nous avait demandé de faire une reprise d’une chanson qui signifiait beaucoup pour nous. Beaucoup d’artistes reprenaient Hallelujah à cette époque. Pendant un moment pour rire on s’était dit qu’on ferait aussi Hallelujah, ce que bien sûr nous n’avons jamais vraiment fait ! (rires) Puis Even proposa de faire cette chanson de King Crimson et on s’est dit qu’en effet nous pourrions faire une bonne reprise de 21st Century Schizoid Man donc nous le fîmes. Après la sortie d’In The Kingdom Of the Kitsh You Will Be A Monster, on nous a beaucoup comparés à King Crimson, notamment par rapport au saxophone et au côté progressif de notre musique. Nous n’avions jamais écouté King Crimson auparavant à vrai dire, et comme on nous comparait à ce groupe nous nous sommes mis à l’écouter et au final à l’apprécier ! Comme en plus le public aimait également ce groupe et notre reprise, on a fini par la jouer également lors des concerts.

Ca s’est passé à l’envers en fait : en vous comparant à King Crimson, les critiques vous l’ont fait découvrir. Au final, avec cette reprise, ils ont dû penser que vous étiez bel et bien influencés dès le début par ce groupe !
Torstein : (rires) Oui, je n’avais pas pensé à ça, mais ça a dû confirmer cette idée là !
Pour finir, pourriez-vous m’en dire plus sur le sens des mystérieuses paroles de Fisheye ?
Torstein : On n’en a aucune idée ! C’est Jørgen qui écrit toutes les paroles et parfois il en fait des étranges comme celles-ci ! (rires)
Et il ne vous l’explique pas ? Il garde ça pour lui ?
Tor : [appelant Jørgen assis dans un coin en silence à moitié endormi] Tu ne veux pas expliquer les paroles de Fisheye ?
Jørgen : C’est une suite de numéro qui suit une logique… C’est assez long à expliquer et là je préfère ne pas trop parler, je garde ma voix pour tout à l’heure, excuse-moi.
On l’excusera sans problème au vu de la prestation qu’il nous offrira quelques instants plus tard, et le mystère de Fisheye restera entier !