River Of Souls – Usurper

Le 20 mai 2020 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


J. : tous les instruments, chants

Style:

Heavy / Death metal

Date de sortie:

15 mai 2020

Label:

Autoproduction

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 8/10

« Il fallut bien s’apercevoir qu’il ne marchait pas dans le Styx, mais dans la boue, qu’il n’était pas coudoyé par des démons, mais par des voleurs, qu’il n’y allait pas de son âme, mais tout bonnement de sa vie… » (Victor Hugo)

C’est drôle mais ces derniers temps, après avoir écumé pas mal de groupes nouveaux ou inconnus à mon bataillon pour des chroniques ou mes découvertes personnelles, j’ai eu un soudain besoin de revenir aux sources. Comme on dit vulgairement, prendre plus d’élan pour mieux sauter dans le grand bain et donc faire quelques pas en arrière supplémentaires. Alors autant vous dire que ma discothèque regorge de CDs « anciens », toujours cependant dans la branche plus extrême avec du black metal, du death metal, du folk metal et accessoirement d’autres artistes plus années 70/80. Après m’être fait des onctions sur mes tympans et donc remis de l’huile dans la mécanique, les rouages étaient repartis pour de nouvelles routes à découvrir ! Parmi les groupes que j’ai eu besoin d’écouter il y a Obituary. J’ai notamment un plaisir immense à me refaire un concert dans mon salon où je suis un membre du groupe et que je headbangue joyeusement sur le morceau « Redneck Stomp » qui est mon préféré. C’est marrant comme le destin est ficelé parce que je ne le savais pas, mais cet arrêt inopiné sur Obituary me conduirait vers un groupe qui, je pense, s’en inspire largement dans sa musique, et le démontre avec son dernier album : j’ai nommé River of Souls.

On devine tous de quelle rivière il s’agit indirectement, mais ce que l’on ignore sûrement c’est que River of Souls vient de Hollande et a jeté sa barque musicale comme une chaloupe de secours en 2014. Jeune formation donc qui a déjà connu deux changements de line up, avec à son palmarès déjà deux albums et un EP. Un parcours artistique correct, sans abondance de sorties mais qui a quand même le mérite d’en être à deux albums avec ce dernier qui s’appelle « Usurper » et qui va sortir prochainement. Une avant-première qui me plonge dans l’expectative sur pas mal de points.

A commencer par la pochette qui est en un mot, superbe. J’avais déjà remarqué que dans le même style de musique, le groupe Rotting Kingdom avait déjà fait ce genre d’accroche et avait cette sensibilité artistique pour un style pictural. Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est une constante mais il y a déjà deux pochettes qui font état d’un paysage d’étendue d’eau pour parler de choses dures. Ici donc, nous avons un décor de tempête qui semble doucement s’estomper avec ce soleil qui apparaît timidement, mais la mer semble totalement déchaînée et des êtres humains, adossés contre un phare ancien (qui me semble briller d’un feu) qui font des signes à un navire qui ne fait guère le malin sur les flots. Tourné comme cela, ça fait un peu humoristique, mais je souligne que l’intention est clairement de planter un décor apocalyptique, sans référence avérée au christianisme. Je suis toujours un peu troublé par cet esthétisme dans une pochette et cette musique, que je vais vous présenter plus bas mais qui ne fait pas dans l’esthétisme justement, plus dans la brutalité pure. C’est un paradoxe qui parfois ne me plaît pas, mais qui ici, par la beauté de l’artwork, ne me laisse pas indifférent du tout. D’ailleurs, autre point étrange : je trouve que le logo du groupe fait plus groupe pagan ou folk metal, plutôt que death metal. Encore un choix étonnant, déroutant même, mais qui dans ce cas précis, me plaît. J’aime bien enfin l’idée d’un « usurpateur » comme l’amène le titre de l’album, on pourrait penser que ce bateau abandonne des naufragés pour s’enfuir lâchement, comme un usurpateur.

Nota Bene : au même titre que Rotting KingdomRiver of Souls utilise un tableau déjà existant. Donc je m’interroge : où est l’originalité d’un groupe quand il ne se soucie guère de ce qu’il transmet par son artwork au point de prendre le premier tableau venu ?

En revanche je me suis un tout petit peu cassé les dents sur la musique pour un problème d’étiquetage somme toute assez banal : vendu comme étant du doom death metal, on est loin, très loin du doom ! Clairement, et sans être un expert du metal, dès la première écoute on sait que l’on a un CD de death metal. Et comme la frontière entre deux étiquetages est parfois mince comme du papier à cigarette, je dirais que River of Souls surfe entre du death metal old school et un côté thrash metal. En fait, je pense que la confusion avec l’incorporation d’un doom metal intervient surtout parce que les morceaux ne sont pas extrêmement agressifs ni rapides, mais on n’est largement pas sur des tempos doom. Pour essayer de vous donner une comparaison à peu près potable, je dirais qu’on est sur des tempos comme certains morceaux de l’album « Evisceration Plague » de Cannibal Corpse. Pour essayer de vous situer parce qu’une comparaison n’est jamais fiable à 100%. Donc, je suis un peu embarrassé pour dire s’il y a du doom ou pas.

Cela n’enlève cependant rien au fait que la musique de River of Souls est très efficace d’un point de vue rythmique, qu’il y a une justesse plutôt bien foutue entre la lourdeur du death et un son plus estampillé thrash metal et qui du coup laisse place aux nombreux soli sans les étouffer, ce que parfois je reproche à des groupes comme Vader que pourtant j’adore. Je suis plutôt conquis par l’écoute de l’album parce que je suis parvenu à dissocier des points positifs auxquels je ne m’attendais pas franchement, après plusieurs écoutes d’albums doom death ou death old school.

Ce qui m’a particulièrement surpris, c’est l’aspect un peu « heavy » de la musique ! C’est plutôt surprenant dans le sens où on a le nom de groupe qui fait penser au fleuve des Enfers, on a un nom d’album à la connotation assez négative, on a un artwork qui ne respire pas l’optimisme et l’on se retrouve avec une musique limite agréable, à l’image de ces groupes américains qui mélangent gravité et musique endiablée, limite dansante. Five Finger Death Punch me vient en tête mais on n’en est pas à du heavy américain non plus ! Alors si je devais retenir une influence principale, je dirais Obituary avec des soli plus heavy. C’est assez désarmant pour le coup. Je suis d’ailleurs un peu partagé entre mon obsession de la cohérence entre les concepts et la musique, et cette même musique qui me prend aux tripes et me donne un regain d’énergie non négligeable. Un vrai dilemme pour moi !

Le son est de fait lui aussi passablement déroutant, puisque si l’on retrouve cette lourdeur caractéristique du death metal, les incorporations de parties plus mélodiques et des soli donnent une dimension moins agressive, plus harmonieuse d’une certaine manière. Ce que je qualifierais, pour ma part, de « subtilités » dans la moiteur ambiante, et qui confère à cet album quelque chose de définitivement plus original que les autres albums de death que j’ai pu entendre ces derniers temps. Après, en toute franchise, il y a plusieurs petites choses qui m’embêtent : la batterie qui sonne moyennement juste et spécifiquement cette caisse claire mal réglée pour le genre, la ou les grosses caisses qui me semblent triggées mais pas assez audibles ce qui est fort dommage quand on fait l’effort de trigger ses pédales. Les roulements de batterie aussi me gênent un peu, pas assez claquants. En fin de compte, ce qui sauve très bien l’ensemble, ce sont les guitares et la basse qui fort heureusement font largement le boulot et compensent bien le manque dans la rythmique. C’est même un petit miracle tant la batterie est essentielle pour l’ossature des morceaux. Donc on est bien dans une logique d’album autoproduit, avec ses qualités et ses défauts qui rendent somme toute tout CD perfectible pour la suite. Un son plutôt sympa donc, sans enthousiasme.

Il faut tout de même souligner la justesse technique des musiciens, particulièrement des guitares qui font un boulot intéressant pour conférer à cet album cette touche d’originalité dont je parlais plus haut et qui me semble donc découler du gros point fort de l’album « Usurper« , qui sont les guitares. Alternant des passages de cordes bien grasses, typiquement américaines avec ce côté Cannibal Corpse que je citais aussi plus haut, et des moments plus endiablés, avec de longs soli et des mélodies accrocheuses, aux accents thrash metal qui me font pour le coup bien plaisir. Gros point fort donc pour moi : les guitares.

Le chant est bon mais sans être extasiant. Il fait le boulot on va dire, bien juste techniquement, avec de temps en temps comme sur le morceau « Of Pit and Snare » des parties claires qui rajoutent encore de la subtilité. Un chant intéressant donc.

Mais là où je suis un peu dans le flou et c’est mon côté Yann Moix qui ressort (j’en profite pour saluer mon chef suprême Laurent Ruquier-Metalfreak et ma consœur vénérée de chronique Christine Angot-BloodyBarbie), c’est dans ce que veut raconter le groupe. Clairement, je suis perdu. Qu’il y ait une part d’ombre indéniable avec cet artwork, ce côté usurpateur qui ressort dans le nom des morceaux et semble suivre une suite logique au moins en partant du premier jusqu’au dernier, sans pour autant englober les morceaux entre (la logique se retrouve sur le premier et le dernier morceau, mais pas forcément sur les autres en gros), c’est validé. Mais alors, pourquoi en faire une musique aussi bipolaire ? Pourquoi ne pas avoir tout bêtement fait un CD bien sombre, avec pourquoi pas ce doom metal qui manque finalement bien assez pour qu’on en demande ? Cette question demeurera sans réponse, sauf si évidemment le groupe veut me répondre. Mais je ressors de cette écoute et analyse un peu pris de court. Pas forcément déçu mais déconfit on va dire.

Je terminerai donc ma chronique sur un bilan positif puisque l’analyse du CD que j’ai pu faire montre tout de même beaucoup de qualités et mérite que l’on s’intéresse à cet album. Néanmoins, loin de nous aider à comprendre de quoi il en tourne, River of Souls nous embarque dans un flou artistique à la fois risqué et méritant. Risqué car certains comme moi vont avoir du mal à s’y retrouver tant la composition, le son et le concept ont l’air de marcher côte à côte sans se tenir la main. Et méritant parce que cette même prise de risque peut avoir des effets positifs sur l’écoute et propose au moins ce qu’il y a de plus méritant à un album que l’on découvre : la surprise. Et rien que pour cela, je pense que chacun devra se faire son opinion et qu’il y aura fifti-fifti d’avis contraires.

Tracklist :

1. Harbinger
2. Of Pit and Snare
3. At Rope’s End
4. Usurper
5. A Spirit’s Weight
6. Fateweaver
7. The Tightening
8. Aftermath

Facebook  BandCamp
Twitter  YouTube

Retour en début de page

Laissez un commentaire

M'informer des réponses et commentaires sur cet article.

Markup Controls
Emoticons Smile Grin Sad Surprised Shocked Confused Cool Mad Razz Neutral Wink Lol Red Face Cry Evil Twisted Roll Exclaim Question Idea Arrow Mr Green