Mal Ardent – Noirceur Féodale – Mal Ardent ...
Line-up sur cet Album
- Line up Noirceur Féodale :
- Corbac : composition
- Quentin Fourreau : narration sur 1
- Line up Mal Ardent :
- Hyvermor : composition
- Quentin Fourreau : narration sur 1
Style:
Dungeon SynthDate de sortie:
24 janvier 2025Label:
Les Acteurs de l'Ombre ProductionsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9.75/10
“La poésie se fait dans un lit comme l’amour. Ses draps défaits sont l’aurore des choses.” André Breton
Vous le savez probablement si vous suivez un peu mes écrits, mais je suis un passionné de contes et légendes. Lors d’une rencontre avec des personnes étrangères, j’avais expliqué qu’en France nous avons moultes légendes selon les régions de notre beau pays, et qu’encore aujourd’hui, certaines perdurent. Je pourrais vous citer, puisque c’est près de chez moi, la bête du Gévaudan, mais il y a aussi le Carcolh, le Lébérou, la Ganipote, etc. Et je vous invite, si vous êtes profondément attaché comme moi à votre département d’origine, à vous plonger dans les lectures qui foisonnent sur ces sujets, en particulier me concernant « Contes Et Légendes D’Ardèche » de Catherine Caillaud qui raconte les histoires contées par sa nourrice concernant l’Ardèche. J’adore ces thématiques. J’aime d’autant plus découvrir les créatures des autres pays car elles sont le reflet, pour pas mal d’entre elles, de la société dans laquelle les gens vivaient auparavant, et continuent à vitre pour certaines cultures asiatiques ou africaines. Pour être encore plus moderne si j’ose dire, certains épisodes de la série policière Les Rivières Pourpres traitent de quelques croyances ancestrales et ésotériques. Bref ! Vous l’aurez compris, découle de cette passion pour les mythes et légendes, la musique qui va avec. Les musiques folkloriques, acoustiques, traditionnelles et pour rester sur un registre plus underground, le fameux dungeon synth. Ce style musical, pas forcément toujours très mis en avant, est celui que je préfère avec le metal bien évidemment. J’ai été plusieurs fois amené à chroniquer ce style qui va de pair selon les puristes avec des styles de metal extrême comme le black metal par exemple. Ce genre est étroitement lié au dungeon synth car de nombreux artistes compositeurs viennent directement de l’horizon black metal, ou parce que les dits compositeurs empruntent le visuel old school du black metal. Alors, la question qui demeure encore pour moi à ce jour est : pourquoi ces deux styles de musique, pas nécessairement familiers de prime abord, sont si proches ? Je ne sais toujours pas mais je peux d’ores et déjà affirmer qu’oui ! Les deux genres sont très proches, puisque ce jour, je vais vous raconter une histoire. Celle d’un label underground bien connu en France, qui produit énormément d’excellentes formations black metal dont certaines ont pignon sur rue sur les affiches de festival, mais qui décide un jour, d’abord de lancer un jeu de société avec des cartes sur la thématique moyenâgeuse, ce qui n’est pas courant ; ensuite parce que le dit label a décidé d’illustrer son jeu par de la musique, ce que je trouve absolument génial. Et enfin, parce que pour parer ce projet nommé Mal Ardent, le label a confié à deux excellents musiciens le soin de composer cette bande-son. Elle s’appelle « Noirceur Féodale » pour la partie une, et « Mal Ardent » pour la partie deux. C’est donc la première fois que je chronique une vraie bande-son !
Pour la partie biographique de la chronique, il va me falloir faire d’une pierre trois coups. Commençons par présenter le fameux jeu de société qui porte le nom de Mal Ardent. Le site Internet explique ceci : « Le pain est maudit… il nous a tous rendus fous ! Fidèles, priez pour rétablir l’ordre, et anéantissez les possédés !… À moins que vous n’ayez, vous aussi, perdu la raison ? » Le décor propose donc un village appelé Saint-Antoine (un rapport avec Saint-Antoine de Padoue ?) où le pain a été maudit et les habitants deviennent donc des personnes possédées qu’il convient de sauver par la prière et tout un tas de règles de jeu. Cette histoire me rappelle la chanson « la Sorcière » de Manau (magnifique morceau sur « Panique Celtique II« ) et l’affaire du pain maudit (« L’affaire du pain maudit est une série d’intoxications alimentaires qui frappe la France pendant l’été 1951, dont la plus sérieuse à partir du 16 août à Pont-Saint-Esprit (Gard) où elle fera cinq, voire sept morts, cinquante personnes étant internées dans des hôpitaux psychiatriques, et deux cent cinquante personnes atteintes de symptômes plus ou moins graves ou durables. » Wikipédia). L’histoire se situe au Moyen-Âge et reprend des contextes déjà connus, mais toujours efficaces. En revanche, les deux compositeurs de la musique illustrant le jeu sont loin d’être des inconnus pour moi. Corbac, de Rouen, qui a composé l’album nommé « Noirceur Féodale » est le multi-instrumentiste du projet black metal / dungeon synth Necrocachot que je connais bien puisque je suis très épris de sa musique et particulièrement son album nommé « Tanz der Schatten » que j’adore. Ensuite, Hyvermor, qui vit en Bretagne, qu’on ne présente plus je crois, leader du label Antiq Records, musicien de nombreux projets ayant une belle vitrine en France comme Véhémence, Grylle, Hanternoz, Tour d’Ivoire, Hyver, etc. Et qui a mis bas à l’album « Mal Ardent« , album éponyme du jeu. Petite parenthèse : un normand et un breton qui composent ensemble, c’est assez cocasse ! Quoiqu’il en soit, cette bande-son s’annonce alléchante étant donné le pedigree des deux protagonistes et le label Les Acteurs de l’Ombre Productions ne pouvait pas me faire de plus beau cadeau. On y va !
Mais tout d’abord, on ne pouvait pas passer à côté des pochettes, comme toujours. Si ces dernières se rejoignent d’un point de vue stylistique, il demeure toutefois quelques différences visuelles que je vais vous commenter. Les deux ont le même jeu de couleurs avec ce mélange étonnant de rouge et de doré qui font un beau contraste bien tape-à-l’œil et qui rappellent certains tarots en ésotérisme. Le logo est absolument superbe et reprend l’idée vraiment originale de reproduire un paysage de village avec un cimetière en avant-plan et donc le nom de Mal Ardent qui évoque les logos de groupes de black metal épique. J’adore la présence sur le logo d’un épi de blé et d’une représentation iconographique d’une église parce qu’il y a ce décor rural qui englobe bien l’univers du jeu et qui démontre une authentique originalité. Ce qui diffère en revanche des deux pochettes réside dans les symboles ésotériques utilisés. Sur celui de « Noirceur Féodale » on retrouve le médecin de la peste dans un cercle vert, le pentagramme et l’entonnoir qui, au Moyen-Âge, est le symbole de la transmission du savoir. Il y a cet œil qui à mon sens représente la folie, écarquillé comme tel, entouré d’une couronne d’épine qui représente le purgatoire par exemple, et les autres cercles autour qui font penser que l’ensemble est une sorte de soleil. Cet œil va en contradiction avec d’autres symboliques possibles comme le savoir. Sur l’album éponyme, on est sur un décorum beaucoup plus ésotérique voire spirituel avec l’opposition symétrique du diable en haut et d’une figure divine en bas. Chacun porte une étole qui va de pair avec leur propre figure, celle du diable étant ornée de symboles de sorcellerie. Ce qui est intéressant est que les deux se tiennent les mains très fort, mettant à confusion qui commanderait l’autre et qui semble, finalement, être l’alternative du jeu. En tout cas, j’aime beaucoup les artworks mais à mon humble avis, il aurait été possible de faire plus original comme le logo peut l’être. Peut-être que Mal Ardent a voulu se rapprocher justement d’une représentation commune d’un jeu de tarot par exemple. En tout cas, si je trouve les pochettes jolies et bien faites, je trouve donc qu’elles manquent un peu d’originalité et peut-être de cohérence avec le déroulé de l’histoire qui fait la part belle à un environnement rural et surtout moyenâgeux. Cela manque de références en ces matières quand-même !
Quoi de mieux qu’une musique dungeon synth pour accompagner ce beau et audacieux projet ? Les deux comparses Corbac et Hyvermor sont, si l’on peut dire, de grands connaisseurs en les matières de musique et de références moyenâgeuses, je ne suis donc pas surpris de constater que la musique qui sert à illustrer le jeu ne peut qu’être opportune. Plus que du dungeon synth, je pense que l’on peut qualifier la musique comme une véritable bande-originale oscillant entre le style primairement cité et une musique acoustico-médiévale qui ont le mérite toutes les deux de planter un décor logique et fidèle. Commençons dans un premier temps par « Noirceur Féodale » qui a le net avantage de se voir paré de la narration chevaleresque de Quentin Fourreau, célèbre conteur français qui écume les projets metal et les festivals pour apporter sa voix charismatique et théâtrale. Il raconte donc dans le premier morceau l’histoire du village de Saint-Antoine de manière épique et poétique, faisant totalement vivre l’anamnèse de ce jeu Mal Ardent. Pour la musique qui va suivre, on est effectivement sur ce que je disais précédemment. La musique flirte ainsi sur un dungeon synth old school et raffiné, jouant sur des nappes de claviers enchanteresses, quelques banques-sons oniriques et mélodiques, avec des instruments en tous genres mais dont la sonorité rappelle ces claviers qui font le charme indéniable de ce genre de musique qui se lie étroitement avec la froideur historique du black metal, et des subtilités qui rappellent le néo-classique ou la musique médiévale tout simplement. Il y a en effet une magnifique part onirique et féérique, presque magique dans les atmosphères qui transpercent le jeu de cartes, et qui m’évoquent certains projets néo-classiques comme Narsilion par exemple, ou des projets plus discrets comme Règne, Dame Silu de Mordomoire ou les non-moins légendaires Darkstroll, Örnatorpet ou bien évidemment Mortiis. Mais là où Corbac fait très fort, c’est qu’il nous embarque dans cette histoire féodale étrange et sombre, en jouant sur les atmosphères en fonction des besoins du conte. Ne se contentant donc pas de rester sur un même genre d’ambiance, il jongle brillamment entre la noirceur, le féérique et les ambiances plus vivantes comme la vie d’un village sous la pluie, la Nature, les combats chevaleresques, etc. « Noirceur Féodale » est donc un véritable bijou de dungeon synth, ponctué de sous-genres liés de près ou loin et qui a une richesse composale remarquable.
Passons désormais à l’album éponyme, composé par Hyvermor, leader d’Antiq Records et de nombres de formations qui ont une place respectable au possible dans le paysage underground français. Pour les connaisseurs comme moi de son univers, il sera aisé de penser que la musique sera d’un acabit identique aux productions anciennes. On est là encore sur une musique dungeon synth, mais si l’on devait établir une différence avec son prédécesseur, je le trouve beaucoup plus old school encore. Il y a moins de fioriture, la simplicité et le minimalisme est de rigueur pour englober là aussi Quentin Fourreau. La figure diabolique est représentée par des voix obscures et lointaines en de très rares occasions et qui me rappellent l’album récemment chroniqué du projet espagnol L’Espectre Que Alimenta La Flama Dels Ancestres, et je trouve que l’immense point fort de la musique composée par Hyvermor est d’avoir réussi à mettre en place nette la dualité représentée sur la pochette. Jonglant habilement sur des atmosphères plus féériques encore, mais qui alternent avec des chevauchements de nappes sombres et ces fameuses voix maléfique, « Mal Ardent » est en fin de compte tout ce que j’adore dans le style dungeon synth / black metal : le principe de dualité. Le bien contre le mal, la religion, tous ces sujets très chers à son créateur, je les retrouve dans cette musique qui est exceptionnelle. Le dungeon synth ici présent est, comme je le disais, plus minimaliste et nous amène vers une sorte de récital musical où les mélodies s’enchainent avec précision, sans pour autant s’accoupler logiquement mais en suivant aussi une trame romancée. Et nous finissons là aussi par succomber à la mélopée envoutante, féérique mais aussi démoniaque de ce « Mal Ardent« . En fait, sans vouloir tomber dans le piège de la comparaison car il n’est nullement question d’un concours ou d’un duel avec Corbac, on a les deux empreintes distinctes des protagonistes mais qui parviennent intelligemment à faire corréler leurs deux univers pour faire cause commune autour de Mal Ardent. Hyvermor étant un artiste qui maitrise son sujet sans aucun doute, la musique ne pouvait que fonctionner avec ce beau projet.
Inutile de palabrer davantage sur la production, puisqu’il n’y a pas tellement de bonnes ou mauvaises productions selon moi dans ce style inhérent. Il en va donc de conclure cette nouvelle chronique.
Mal Ardent est à la base un jeu de cartes lancés par Les Acteurs de l’Ombre Productions. Pourquoi en faire une chronique ? Parce que le label a eu l’intelligence remarquable d’illustrer son jeu au moyen d’un double-album composé de deux musiciens connus de la scène pour leur talent, Corbac et Hyvermor. Le jeu se situant sur un décorum médiéval et ancestral, le tout sur un fondement ésotérique et mystico-démoniaque, quoi de mieux, vous me direz, qu’une musique dungeon synth pour lui offrir un son digne ? Réussir cet exploit n’était pas donné tant le procédé de composition d’une bande-originale n’est pas chose aisée, puisqu’il faut savoir s’imprégner de l’histoire et du scénario pas toujours simple d’un jeu de cartes. Eh bien, force m’est de constater que le résultat dépasse toutes mes espérances ! Ce dungeon synth là, qu’il soit enrobé d’éléments néo-classiques et / ou ambient, ou qu’il soit accompagner docilement par une musique médiévale et acoustique, il est tout simplement redoutable et magnifique. Si l’on se situe même en-deça du jeu de carte qu’il met en bande-son, ces « Noirceur Féodale » et « Mal Ardent » auront au moins eu le mérite d’être tout simplement des albums du genre fabuleux, devenant je pense incontournables si l’on se souvient du fait que le jeu de cartes va très bien se vendre dans le milieu. A n’en pas douter, un must dans le style ! Un de mes coups de cœurs en la matière en 2025.
Tracklist Noirceur Féodale :
1. Introduction 04:39
2. Mal Ardent 11:46
3. Les Mystères de la Forêt 06:32
4. Messe Noire 04:28
5. Procession 05:19
6. Danse de Cimetière 08:42
7. Noirceur Féodale 09:28
Tracklist Mal Ardent :
1. Pluie Amère 19:38
2. Mal Nocturne 22:48
3. Vent Mauvais 19:26
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