Indigo Raven – Looking for Transcendence

Le 11 novembre 2021 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


  • Benoît Sangoï : tous les instruments, guitares, batterie programmée
  • Julie Docteur : chant
  • Jean Green : basse

Style:

Doom Metal

Date de sortie:

22 octobre 2021

Label:

Argonauta Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 8/10

« C’était une merveille, une fête des yeux, que cet enchevêtrement de tons colorés, une véritable kaléidoscopie de vert, de jaune, d’orange, de violet, d’indigo, de bleu, en un mot, toute la palette d’un coloriste enragé. » Jules Verne

Bon, je n’avais pas mieux pour cette chronique, j’ai fouillé un moment avant de trouver une citation potable. Et encore… En fait, les introductions découlent souvent du nom des groupes que je découvre. Selon les inspirations. Alors parfois, elles sont rebelles ou mauvaises, parfois elles sont bien idoines. Mais c’est surtout ce que me renvoient les noms des groupes qui m’intéressent. Il y en a qui tombe sur un cliché absolument indigne, ne parlons pas des groupes pseudo satanistes qui se réservent le droit de faire un nom avec les sempiternels mots, vous voyez ce que je veux dire je pense. Certains trouvent le truc pour attirer l’œil, j’en ai fait la très belle expérience avec le groupe lyonnais Venin Carmin, dont j’ai adoré le nom avant même de découvrir le groupe et sa musique, ou le groupe Conclave qui m’avait fait l’effet d’une bombe auditive à prononcer dans mes oreilles. Je pourrais sûrement en trouver d’autres mais le temps presse et je dois me lever à quatre heures demain, donc je vais à l’essentiel (ce qui pour un Quantum est un comble !). Mais la prononciation va souvent de pair avec l’intention, dans le cas de Conclave il y a une sorte de solennité qui défonce tout à l’énoncé du nom, et cet effet-ci je le recherche ardemment dans mes pèlerinages quotidiens ou presque dans la sphère underground du metal et autres genres que l’on chronique avec facétie ici. En tout cas, le premier contact est le nom du groupe, comme quand on se présente, on ne dit pas « j’aime les chihuahuas et les beignets au concombre », on dit « je m’appelle untel ». Le choix du nom d’un groupe c’est primordial à mon sens, cela constitue le point de départ le plus essentiel pour entamer sa romance ou sa démence avec un groupe quelconque, et cela marque fortement l’identité d’une congrégation de musiciens ! C’est exactement ce qui s’est produit lorsque j’ai prononcé dans ma tête le nom Indigo Raven. Rien que le nom, j’ai eu envie d’aller à l’exercice périlleux mais passionnant de la chronique, et cela tombait à pic ! Le groupe nous était proposé, via son album « Looking for Transcendence« !

Indigo Raven cache derrière ce beau nom un trio de musiciens de Toulouse ! Belle surprise que de découvrir un groupe français jusqu’à présent passé à travers les mailles de mon filet. L’autre belle surprise intervient dans le label qui a signé le groupe Indigo Raven, et il s’agit d’un que j’adore : Argonauta Records dont le sérieux et le choix de son roster ne laisse aucune place à la déception, ou presque. Mais le plus frappant c’est cet énorme prise de risque que le label accomplit parfois en sortant des premiers albums de groupes émergents. Indigo Raven n’échappe pas à cette prouesse et « Looking for Transcendence » est ainsi le premier album des Toulousains. Franchement, quand on connait bien Argonauta Records, on sait d’avance que cet album va être une tuerie. Mais ne brûlons pas les étapes ! Notons d’ailleurs qu’outre ce premier album concret, le groupe a sorti un EP éponyme et un single auparavant. Pas mal du tout pour un groupe dont l’existence a vu le jour en l’an 2019 ! Une jeune formation, un premier album, un groupe français, tous les ingrédients sont réunis pour démouler un festin digne d’Halloween avant l’heure ! C’est parti !

Une fois n’est pas coutume, je m’attaque à la pochette de « Looking for Transcendence » ! Je vais être honnête, malgré le nettoyage de mes lunettes et une mise en pénombre intempestive pour mieux discerner le motif, je n’ai pas vraiment compris ce que cela représentait. On dirait une forme de fumée noire qui s’élève dans le ciel en ondulant, comme celle qui se dégage de la flamme d’une bougie éteinte vous voyez. Mais je crois voir un visage au sommet, un visage plaintif, torturé, et un visage féminin surtout. Le reste, le décor en gris clair et l’aspect lumineux de l’ensemble contrastant avec cette trainée noire, j’aime bien. En fait, graphiquement parlant, si l’on extrait le scepticisme quant au sens qui est mis dedans, la pochette est belle. Maintenant, voilà le ou les problèmes : déjà il n’y a pas le nom du groupe en avant. Éternel problème que ces groupes qui s’évertuent à ne pas mettre leur propre identité sur un artwork de devant, pourquoi ? On l’ignore ! Mais c’est un effet de mode qui commence un peu à m’agacer, parce que j’ai tendance à être retors sur la question et chez un disquaire, un CD sans le nom du groupe en avant, je ne m’y intéresse pas. C’est la première chose. La deuxième, et non des moindres, c’est le sens selon moi bien trop abstrait pour amener l’auditeur vers un indice de taille. Faire dans le métaphorique est bien évidemment une pratique que j’encourage, mais il faut faire la distinction profonde entre métaphore et sens caché. Moi, je considère qu’un artwork doit amener la personne qui s’intéresse à l’album à savoir d’emblée de quoi cela parle. Or, dans le cas de « Looking for Transcendence« , je ne vois pas spécialement de lien avec une quelconque transcendance justement. Enfin, et cela c’est plus un détail insignifiant, on ne voit pas bien le nom de l’album. Voilà ! Je pense qu’Indigo Raven va m’accuser de chipoter, c’est un fait avouable je chipote ! Mais j’essaye de contextualiser la chronique d’un album dans le processus normal de la découverte du dit album. Et une pochette qui ne remplit pas son rôle de vitrine, pour moi c’est un mauvais point. La beauté de l’ensemble sauve bien les choses, et la pochette me semble au final plus moyenne que passable, ce qui est déjà pas mal.

Désormais un peu échaudé par cet artwork qui me laisse sur ma faim, me voici aux prises avec la musique. Ce qui me frappe immédiatement c’est la dimension très chamanique, voire ésotérique (enfin je crois) qui semble ressortir d’Indigo Raven. Sur la base principale de la musique de « Looking for Transcendence« , on se situe très clairement sur un doom metal avec de fortes belles accentuations sludge metal. Cela vous donne donc un aperçu de ce vers quoi la musique tend : des ambiances très lourdes, un son métallique et bien boueux laissant le champ libre à des expérimentations et une épaisseur sonore intéressante à coupler avec une voix féminine envoûtante et charmante. Mais le principal atout de ce premier album est résolument les incorporations ambient, presque un peu néofolk ou industrielles par moment, en tout cas une large palette proposée par le trio de musiciens qui se permettent donc le luxe d’arborer une quintessence musicale très vaste. On se demande si Indigo Raven se met des limites ! Je vous avouerai que certains morceaux me parlent plus que d’autres, en particulier ceux qui ont des traits comme je disais, spirituels et folkloriques. Mais le plus étonnant encore c’est que ces incorporations particulièrement expérimentales sont portées fiers à bras par le chant féminin, véritable couteau-suisse / chef d’orchestre de ces ambiances qui frôlent l’onirisme et les incantations à la Nature. Rien d’étonnant que ces ambiances me parlent puisqu’Indigo Raven se revendique des influences du fameux « Peaceville Three« , nom donné aux trois groupes signés chez le label Peaceville Records : My Dying Bride, Anathema et Paradise Lost. D’ordinaire ces groupes ne m’inspirent que peu de choses, mais il est vrai que ramenés à une sauce sludge metal, on a tout de suite un regard neuf bien saisissant. Qualifier la musique de nos amis de Garonne serait un chemin de croix, mais les adjectifs sont tous situés autour de la sphère de la surprise, voire de la stupeur. La musique se veut rare et imprévue. Et chaque piste est un voyage à la fois extérieur et intérieur. Bref ! La première écoute m’a plu, c’est un euphémisme. J’aime cette richesse et cette inspiration chamanique et onirique qui transforme un doom metal habituellement lourd et vicelard, en une musique langoureuse et aventureuse. Une grosse surprise !

Typiquement, la production se situe bien sur du sludge metal. Avec ce son boueux caractéristique, mais pas que. Outre le doom metal qui rajoute une lourdeur importante, on a aussi toute cette panoplie que je citais plus haut qui est à prendre en considération. Et je dois dire que sonoriquement parlant, Indigo Raven a vraiment bien joué son rôle. On sent bien toutes les influences citées et le travail autour du son donne un rendu impeccable et bien distinctif. J’aime beaucoup l’ensemble qui se dégage, il y a une forme d’harmonie générale qui joue un rôle défini d’envoutement et de voyage spirituel. « Looking for Transcendence » est un album bien construit et bien ficelé sur le plan sonore, et le reste se passe de mot. Excellent son !

J’ai le sentiment mais je peux me tromper qu’Indigo Raven tourne son concept autour d’une dimension cette fois néofolk à la Garmarna. On sent quelques influences un peu old school en la matière, et la voix féminine conjuguée à cette ambiance très spirituelle me fait penser aux pionniers du genre, ou une sorte de Heilung à la sauce ancienne. Les parties doom metal sont en tout cas assez simples, minimalistes dans leurs bases et l’effet sludge metal amène une profondeur sonore qui donne une atmosphère qui oscille entre dérangement et bienveillance. « Looking for Transcendence » est un réel bon album, bien produit et bien composé. L’intelligence autour de la composition intervient dans cette répétition de décors plantés au début des morceaux pour ensuite installer un doom metal plus conventionnel, et les deux sont loin de se toiser, bien au contraire. La symbiose est totale et donne une vraie richesse à la musique d’Indigo Raven. C’est sincèrement une très belle découverte et je suis fier que l’on ait un groupe français aussi calé en matière de doom metal un peu expérimental. Mais la question demeure : pourquoi employer la couleur indigo pour parler du corbeau ? J’ai trouvé une piste en ayant la symbolique de l’indigo que je vous partage ici « Le bleu indigo est la couleur du chakra frontal, troisième œil de la connaissance, l’indigo stimule notre capacité de perception, développe notre intuition et clarifie notre esprit. » Comme Indigo Raven s’attache à une imagerie un peu folklorique et propre à la spiritualité, on pourrait y voir un lien. Le groupe l’infirmera ou le confirmera !

Le chant était loin de me convenir au départ. Vous connaissez sûrement ma défiance vis-à-vis des voix féminines dans le metal extrême pour des raisons que je ne répéterai pas ici, mais sachez qu’Indigo Raven a su me mettre d’accord tout de suite. La voix est sublime, allant sur des tonalités plus graves et donc apportant cet aspect chamanique, de récits incantatoires et l’on a presque l’impression d’entendre une prêtresse grecque. En tout cas le chant est très bon techniquement et correspond très bien à ce doom metal qui est sludgien et qui me fait également penser à quelques courts passages de Blod. Je trouve toutefois que le chant pourrait être un peu plus audacieux, dans le sens où les variations dans les octaves restent très pauvres, les lignes de chant sont effectivement un peu trop linéaires à mon goût et auraient mérité plus d’intensité. Surtout sur les parties doom metal bien sombres, une petite envolée ou deux auraient été de fort bon aloi. Ou alors, l’arrivée d’un chant masculin ou d’un chant plus saturé aurait apporté une touche originale fort bien bienvenue. Mais ce n’est que mon avis.

Pour terminer cette nouvelle chronique, je dirais que « Looking for Transcendence« , premier album d’Indigo Raven, est une découverte très surprenante. Loin de crier au génie, je trouve néanmoins que ce doom metal teinté d’apports qu’il resterait à clarifier mais qui me semblent être néofolk, présente très bien et offre de bonnes promesses. Ce premier album n’en est pas un dans le sens où la qualité du son, les références assumées aux « Peaceville Three » et les compositions pointilleusement bien construites sont des gages de bonnes découvertes pour n’importe quel amateur du genre. En tout cas, loin de dire que cet album va avoir un écho très important, il vaut largement le coup d’oreille et rend honneur au label Argonauta Records qui a décidément la main chanceuse ou le nez fin. Indigo Raven est en tout cas une très belle découverte que je recommande chaudement.

PS : je m’excuse auprès du groupe de ne pas avoir eu le temps ni le courage de faire la chronique en release du jour comme c’est d’usage chez Soil Chronicles.

Tracklist :

1. Our Sacred Soil 05:20
2. Palin Genesis 06:26
3. Small-Hearted & Blind 07:01
4. The White Knight Syndrome 06:34
5. Nightshade Winds 06:32
6. Where Lies Our Hearts 05:11

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