Suffer Yourself – Rip Tide

Le 25 juin 2021 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


  • Stanislav Govorukha : Guitare, chant
  • Kateryna Osmuk : Batterie
  • Lars Abrahamsson : Guitare
  • Johan Selleskog : Basse

Style:

Doom Death Metal / Funeral Doom

Date de sortie:

25 juin 2021

Label:

Aesthetic Death

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 7/10

Le masochisme est une expérience mystique.” André Pieyre de Mandiargues

Je suis un peu en deuil ce soir. Je sens que mon cher patron en a un peu marre. Il est un homme de passion, un vrai mec qui en impose dans le milieu, traçant sa route sous l’étendard fièrement placé sur les monts du metal de Soil Chronicles. Et ce soir, mon boss Chris Metalfreak est épuisé. Probablement d’abord par ce contexte sanitaire que nous connaissons tous, on ne va pas revenir dessus mais on n’en sortira pas indemne, croyez-moi. Ensuite parce qu’il faut parfois se recentrer sur l’essentiel, c’est à dire notre famille, nos ami(e)s, et que le reste n’est qu’un tas de poussière insignifiant quand on a besoin de s’enterrer sous une énorme dune de sable qu’est la famille. Et enfin, parce que de base chroniqueur, live reporter, journaliste, ce sont de vrais métiers. Et quand on le fait bénévolement comme chez Soil Chronicles, c’est qu’on accepte de faire un travail rémunéré gratuitement, par passion, simplement par passion. Et la passion, ça coute cher comme j’ai coutume de dire! En investissement personnel déjà. En temps que l’on ampute à notre famille ensuite. En perte d’acuité auditive, mais ça c’est un peu cherché on va dire… En périodes d’euphorie où l’on se sent tout-puissant, alternant avec des périodes d’abattement, surtout lorsque nos chroniques ne sont pas partagées par les groupes ou les labels (ce qui arrive dans 75% des cas environ), quand on a le malheur de jouer la carte de l’honnêteté pour au final se faire gercler comme une raclure de bidet par les groupes et labels pour le seul motif de la franchise – mais ça, ça arrive dans la vie de tous les jours hélas. Alors, simplement amis lecteurs et amies lectrices, imaginez un tant soit peu ce que toutes ces contraintes prennent comme ampleur quand on gère un webzine. Imaginez!
Bon, ça fait un peu film romantique mais je me sentais obligé en introduction de rendre hommage au patron de Soil Chronicles sans qui je n’aurais probablement jamais franchi le cap de la chronique, qui a su me tirer vers le haut et me donner confiance en moi, et m’a permis de rassembler mes deux grandes passions que sont l’écriture et la musique dans une seule entité bicéphale. Je sais qu’en ce moment il n’est pas en forme alors je voulais simplement lui dire « merci! » Et aussi, lui jurer sur mes bébés fraisiers que non! Je ne lui lèche pas une énième fois le cul, d’abord parce que je développe des mycoses à la langue (je lui avais dit de se frotter le derrière sous la douche pourtant…), ensuite car c’est vers cette période que j’ai saisi ma chance d’intégrer Soil Chronicles (c’est donc mon anniversaire!) et enfin parce que brader un pass au Hellfest n’est rien devant l’amitié et l’admiration que je lui porte.
Antirouille, tu as du boulot pour rattraper mon avance d’adulateur. (Je m’incline-Antirouille-)
Sinon? Ben, c’est l’heure de la chronique de Suffer Yourself et de son album Rip Tide. Une introduction totalement hors sujet, mais nécessaire pour le bien du webzine. J’espère que le groupe comprendra.

Suffer Yourself n’est pas le nom d’un club masochiste! C’est au départ le projet musical de l’ukrainien Stanislav Govorukha, qui a fondé son groupe en 2011. Vous me direz, jusque-là, on ne s’en sort pas trop mal. Sauf que notre bien aimé musicien ukrainien a fondé son groupe… En Pologne. Puis il a déménagé en Ukraine, pour finalement aller en Suède! Et ce n’est pas tout : le groupe est composé à ce jour de deux ukrainiens et de deux suédois… On n’y pige pas grand-chose sincèrement. On va donc dire, comme notre sublissime Metal Archives, que le groupe est polonais. Dix années donc plus tard, Suffer Yourself a sorti trois albums « seulement ». Je dis cela parce qu’il n’y a que ces trois CDs au compteur ce qui est relativement mince pour défendre son pedigree. Mais bon, la quantité ne veut pas toujours rimer avec qualité, et je pressens que ce Rip Tide qui veut dire contre-courant en anglais, va passer ou casser. Pas de juste milieu!

C’est marrant parce que le style de pochette présentement présenté par Suffer Yourself est quelque chose que l’on voit souvent en ce moment. Stylistiquement parlant, le côté tableau est vraiment à la mode, notamment dans les genres bien lourd en metal. Ici, pas de dérogation, le groupe polonais nous renvoie vers un concept qui nous emmène vers les océans ou plus simplement, la mer. Mais évidemment, une mer particulièrement agitée sous la tempête. Je ne suis pas bien friand du noir et blanc de ce tableau, à vrai dire je ne le comprends pas. Que le groupe veuille un aspect funèbre, pourquoi pas. Mais je trouve que masquer les couleurs aussi franchement n’arrange en rien leurs affaires. On dirait un vague montage avec Paint quoi… Quitte à jouer sur un style pictural, autant aller jusqu’au bout et trouver un jeu de couleurs qui fasse très mortuaire. C’est largement possible en plus, on l’a vu plein de fois! Bon, en tout cas j’aime au moins la pochette pour le côté conceptuel que j’ai pu remarquer sur les précédents albums. Le décor général est là, et il va bien être mis à l’honneur sur l’album Rip Tide. On va donc dire que la pochette remplit sa mission mais je n’aime pas tellement le style proposé.

Rip Tide, c’est trois morceaux pour trente-deux minutes, dont vingt et des brouettes pour le premier! Autant vous dire qu’il va falloir s’accrocher sévèrement et faire montre d’une passion sans faille comme stipulée dans l’introduction pour en faire une analyse. Evidemment le label a joué le jeu de bien vendre son album en expliquant que les trois pistes sont un concentré astucieux de doom death metal, de funeral doom et de drone metal. Je me méfie de cette démarche qui alambique trop les éléments, et il faut se dire que plus de la moitié de ce qui est raconté n’est là que pour induire l’auditeur naïf vers des états d’âme qui ne sont même pas les siens! Donc, que les choses soient claires : Suffer Yourself est majoritairement un groupe de doom death metal, voire pour faire plaisir, de funeral doom puisque la frontière est très mince. Seul le dernier peut se vanter d’être du drone metal. Tout ce constat n’éclipse toutefois pas que l’album est vraiment intéressant. Il serait un peu exagéré de dire que l’album est superbe, on va se contenter d’un « bien » juste et propre. Je trouve que faire un morceau de vingt minutes est une grosse prise de risque assez bête, puisque décourageante comme démarche artistique. Que le deuxième n’a pas de chant et qu’il n’y a qu’un passage de film en français que je n’ai pas reconnu, ce qui est très mince. Et donc ce troisième morceau qui tire un peu la bourre. Le contenu est à la fois ainsi très léger, très mince, mais aussi trop complexe. Du coup, pour y trouver un intérêt certain, je vais avoir besoin d’autres écoutes. Ce qui n’est pas un gage de réussite…

La production est pourtant vraiment bien faite, pour un troisième album je la trouve standard et totalement raccord avec le ou les genres abordés ici. Un son lourd, très lourd! Oppressant par moment, un peu mystico-dramatique aussi notamment sur le dernier, mais surtout une production qui permet de trouver du lien entre les pistes pourtant assez aux antipodes. Je suis assez étonné de voir que cette fameuse production rattrape habilement le tout, en tout cas le contenu rachitique. Au moins le label ne s’était pas trompé quand il parlait d’atmosphères pesantes, de maelstrom sonore et de style, et d’une dimension ésotérique et méditatique péremptoire! Cet album a un potentiel énorme en matière de son, de jeux sonores et d’atmosphères. Pas étonnant que Suffer Yourself construise des albums conceptuels puisqu’il parvient en effet à insuffler des embruns maléfiques sur l’auditeur avec Rip Tide dédié à la mer. L’album me fait penser pour cela à Ahab dans la démarche. En tout cas, force m’est de constater que la production de l’album sauve grandement les apparences et adoucit les tares que j’avais primairement identifiées.

Heureusement qu’elle est là! Parce que les autres écoutes ont été quelque peu difficiles à appréhender et à apprivoiser. En fait, pour moi, Rip Tide manque vraiment de cohérence et de matière. Trois morceaux même très longs, qui plus est un qui est instrumental et hors sujet, c’est maigre… Et quand en plus ils sont radicalement opposés, même s’ils restent près d’un doom death metal, j’avoue que cela me décontenance pas mal. Si l’on prend les pistes une par une encore, on peut y trouver un intérêt. Mais mises bout à bout, ça ne prend pas plus que ça… Et c’est dommage parce qu’un album aussi court ne peut fonctionner qu’avec des liants dans le tout. Je dirais donc que pour aimer cet album, il faut le prendre comme s’il s’agissait d’un regroupement de singles, un par un et sans chercher à se farcir l’album en entier surtout! Sinon vous allez droit à la catastrophe. Mais globalement, chaque piste étant unique, on peut dire que le troisième né de Suffer Yourself est « pas mal ».

Maintenant le vrai bon point avec la production, outre le talent des musiciens qui est indéniable malgré tout, c’est le chant. Bien que trop rare pour mon plus grand malheur, le chant est excellent! Très gras, très lent, funéraire au possible, avec un côté caverneux digne du genre funeral doom et que j’adore en l’état. C’est véritablement une très belle performance technique! Et je le trouve trop peu présent. Pourquoi d’ailleurs ce choix de ne mettre du chant que sur une piste? Je me serais volontiers passé de cette citation à deux balles d’un film qui parle des eaux profondes sur le deuxième morceau. Quel putain de gâchis que de s’approprier l’œuvre d’un auteur pour au final ne durer qu’une minute et couper la fin d’un morceau… Alors qu’un chant bien épais, bien profond comme celui-ci, aurait largement égayé mon écoute. De même qu’une toute petite ligne de chant par-dessus le drone aurait été plaisant. Mais bon… Il est des mystères impénétrables mes amis.

Pour conclure cette nouvelle chronique, il faudrait que je prenne quelques pincettes bien douces. Suffer Yourself a l’air d’être un beau projet au départ, qui cherche à parcourir les sentiers compliqués du doom death metal et du funeral doom avec entrain. Mais le gros problème de ce troisième méfait, c’est qu’il est brouillon et peu fourni. En elles-mêmes, les pistes sont très bonnes et méritent toute notre attention. Mais Rip Tide n’est pas le genre d’album que l’on peut écouter d’une traite sans se demander où est le souci principal. Sans une once de scepticisme en tout cas. La démarche artistique est quelque peu déroutante, pour ne pas dire étrangement malsaine. Je ne comprends pas l’intérêt d’un tel CD sinon de l’avoir construit à la hâte pour honorer un contrat de label. On pourrait donc considérer que le scepticisme est de rigueur pour Rip Tide, et qu’il s’agit d’un album qui ne passera que trop difficilement le cap fatidique du CD moyen bon.

Tracklist :

1. Spit in the Chasm
2. Désir de trépas maritime (Au bord de la mer je veux mourir)
3. Ugasanie – Submerging

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