OTUS – Torch

Le 28 décembre 2022 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


  • Daniele Antolini - Basse
  • Fabio Listrani - Guitare
  • Brunomaria Cosenza - Guitare
  • Fabrizio Aromolo - Claviers, chant
  • Leopoldo Russo Ceccotti - Batterie

Style:

Doom Sludge Metal

Date de sortie:

20 septembre 2022

Label:

Time to Kill Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 6.5/10

« La nuit était longue et bleue comme une lame de Tolède. Nos trois torches griffaient ses ténèbres, leurs grésillements accrochant des reflets sauvages aux bijoux et médailles des matelots pour conjurer les ombres. » Stéphane Beauverger

C’est drôle, j’ai réalisé ce soir que je fêtais ma première année de spécialisation sur tout ce qui gravite autour du Doom. J’entends par là le Doom Metal, le Sludge Metal, le Stoner, le Drone Metal, le Doom Death Metal, le Funeral Doom Metal, etc. J’en tire une certaine fierté parce qu’au départ, hormis quelques gros groupes, je n’avais pas tellement de références solides. C’est un peu comme quand vous passez un entretien d’embauche pour ouvrir des huîtres sur le marché de Grenoble, alors que toute votre vie vous avez ouvert des moules. Bon ok, la comparaison est moche… Mais c’est pour vous illustrer que changer de références Metal, c’est un peu la même chose. Vous avez les bases, comme prendre ce mollusque dégueulasse dans les mains, ça vous savez faire ! Mais la technique d’ouverture de l’opercule turgescent, en principe ce n’est pas tout à fait pareil et si vous y allez « à la zeub » comme j’aime dire des fois, vous risquez de vous ouvrir lamentablement la main. Eh bien, moi qui étais enfermé dans des carcans de Black Metal principalement, me frotter à ce style lancinant et lent, sans pour autant renier de temps à autre mes origines, c’était un sacré pari ! Mais comme j’aime ce webzine, et que je voyais la liste doomesque restée seule et sans copain, je me disais qu’il était temps pour moi de répondre à l’appel du destin et sortir de ma zone de confort. C’est pourquoi je fête une sorte d’anniversaire ce soir, un peu spécial, parce que depuis un an, je suis allé de découverte en découverte. Et bon sang ! Que ces genres ont du talent à revendre, je ne le soupçonnais même pas !
Que ce soit dans le registre Sludge, Stoner ou Drone, je me suis régalé très souvent, et aujourd’hui, ma discothèque gargantuesque est fièrement ornée de quelques pièces Doom Metal dont je suis très fier. C’est à peu près du kif kif bourricot dans la proportion, mais je suis vraiment content, d’autant que je continue encore à découvrir des œuvres géniales. Et ce soir, pour fêter avec dignité cet anniversaire, je me suis décidé à chroniquer OTUS. L’album Torch, outre son côté drôle quand j’ai cherché des citations (dans mon livre de wc par exemple, « torcher »…), est donc celui dans lequel je vais me plonger avec fierté ce soir. C’est parti !

De ce que je connais d’OTUS, il n’y a pas grand-chose. Hormis que le groupe est italien, nous vient de Rome ce qui n’a rien d’excessivement original, et que le groupe existe surtout depuis 2012. Je note cette information avec un peu plus d’attention parce que je vois beaucoup de groupes à faire en chronique exister depuis le début des années 2010. Ils n’ont bien évidemment pas du tout le même vécu ni la même histoire, mais j’aime à comparer le nombre de sorties dans une discographie qui date potentiellement de la même époque. Et on a des surprises, croyez-moi. Ici, OTUS n’a sorti « que » trois ouvrages : une démo à leur début, et deux albums dont l’avant-dernier remonte à 2016. Un groupe qui prend son temps dirait-on, d’autant que le line up n’a quasiment pas bougé hormis le batteur, qui a quitté le groupe en 2020. Cela n’enlève en rien, malgré le rachitisme inquiétant de la discographie des italiens, que cet album est signé chez un très bon label puisqu’il s’agit de Time to Kill Records, label que je n’ai pas fait souvent pour ainsi dire. Allez ! Trêve de bavardage intempestifs, on attaque les hostilités les ami(e)s!

La pochette a quelque chose de très bizarre. Je ne peux pas dire franchement si j’aime le style ou non, je pencherais plus pour un non d’ailleurs. C’est ce que je n’aime pas souvent dans ce type d’artwork, cette abondance de symboles et de représentations qui fait qu’on n’y comprend pas grand-chose. Je pense que le groupe OTUS aurait gagné à clarifier cette imagerie soit en lui associant un motif clair comme un titre plus parlant qu’un vulgaire « Torch » qui peut tout et rien dire, ou alors épurer l’artwork en lui-même.
Bon ! En gros, on a trois représentations qui me font penser à des indigènes ou des divinités indigènes qu’on trouve par exemple en forêt amazonienne, ou en Amérique du Sud. Il y a beaucoup de mains qui touchent ces personnages énigmatiques, et l’un d’eux porte donc une fameuse torche. Torche qui déambule au milieu de lianes qui tombent, supposément, d’arbres gigantesques et très typiques des jungles. Le serpent en arrière-plan, de couleur dorée, est tout de même d’un très bel effet. Le tout étant majoritairement en nuances de gris, ce serpent doré détone un peu dans le paysage, même si l’on peut supposer que les trois personnages qui semblent bien apeurés, cherchent à trouver ce fameux serpent soit dans un but de protection, soit dans un but de lui échapper.
Ce que je reproche donc à cet artwork, et qui équivaut à un « non » caractérisé pour moi, c’est l’absence de corrélation entre le nom de l’album et l’artwork. Si le groupe avait centré plus clairement son concept-album sur cet univers spécial, de jungle et d’indigènes, j’aurais compris. Mais le fait d’avoir un nom d’album aussi simpliste pour un artwork très sophistiqué, voire beaucoup trop à mon goût, cela ne colle pas. Je n’adhère pas à ce dernier, pour une raison évidente pour moi de manque de logique et de clarté. Trop fourni fait trop vague, c’est tout.

J’allais dire, heureusement que quand on fait une chronique on ne s’arrête jamais à l’impression que nous laisse la pochette. Sinon, si on se comportait comme un auditeur lambda, ce que nous sommes dans la vraie vie par ailleurs, jamais je n’aurais écouté la musique de ce Torch. Alors parfois, on allume un cierge et on remercie une divinité quelconque, peut-être la bière ou le rhum d’ailleurs, de nous avoir donné l’impulsion nécessaire pour aller au bout de la démarche. Parce que clairement, le Sludge Metal d’OTUS est très très bon ! Doublé au passage d’un tempo très Doom Metal, revendiqué par le groupe lui-même, cela donne ce que j’ai écouté dans pas mal de groupes italiens d’ailleurs. Ce Sludge Metal qui voit sa puissance et sa rondeur décuplées par l’apport Doom Metal avec un tempo extrêmement lent, des balancements d’accords incroyables et des passages en accélération qui sont tantôt sur quelque chose de medium, tantôt sur des vitesses de pointes plutôt bluffantes. Après, avec le Sludge Metal, d’une manière générale, il ne faut pas s’attendre à de très grandes accélérations de tempo, le but étant surtout d’installer une forme d’inconfort dans l’esprit de l’auditeur. Pour cela, rien de mieux qu’une musique avec les sonorités qui vont bien avec le style Sludge Metal, et la lenteur habituelle accompagnée d’une lenteur encore plus extrême avec le Doom Metal. Le résultat se situe sur tout ce que j’aime entre ces deux genres.
La musique ne souffre d’aucune fioriture particulière hormis quelques apports mélodiques de temps en temps à la guitare, mais on sent tout de suite qu’OTUS est là pour envoyer du bois. Le groupe me fait penser, toutes proportions gardées, au groupe Bleeding Eyes du même pays qui officie exactement dans le même registre et qui envoyait aussi du gros bois, sans passer par quatre chemins, et que j’avais adoré faire en chronique à l’époque. En tout cas, une musique qui s’écoute très bien, avec un effet malaisant garanti puisque c’est le but recherché je pense. Ce Torch est assez bluffant même dans sa construction, sa suite logique et son côté lancinant à l’extrême. Une belle découverte en première écoute !

La production pour ce genre d’albums doit être impeccable selon moi. Il est rare d’avoir une production Raw dans ce style Sludge Metal sauf s’il est associé comme le ferait Alkerdeel avec un Black Metal par-dessus. Mais ici, clairement, avec cette lenteur incroyable, il fallait une production carrée. Bon, je vous rassure tout de suite, dans le cas d’OTUS, le contrat est rempli. Mais c’est bon de le rappeler, je crois. En tous cas, pour cet album, je dois admettre qu’on se situe sur un quasi sans-faute pour Torch qui se dote d’une sonorité totalement en accord avec ce qui doit se faire dans le Sludge Metal. La caractéristique sonore numéro une étant cette rondeur et ce côté épais, rebondi, un peu ressort sur les bords, on la retrouve impeccablement dans tout l’album. Déjà quand le son est raccord à ce point, c’est un gage de réussite. La particularité étant d’avoir rajouté de la lourdeur avec le Doom Metal, et cette lourdeur s’appuie parfaitement sur le son de base, offrant donc un album sonoriquement parlant très hypnotisant, qui chamboule pas mal les esprits. C’est un type de productions que j’ai désormais l’habitude d’entendre dans mes chroniques mais je ne m’en lasse jamais. Absolument jamais. Parce que je soutiens mordicus que le Sludge Metal et le Doom Metal vont superbement bien ensemble, et quand on voit ce genre de son, cette lourdeur incroyable que même le Death Metal, défendu vaillamment par sieur Antirouille chez nous, envierait. Voilà pourquoi cet album signe un sans-faute sonore, la production est impeccable, vraiment.

Maintenant, ce qui restera selon moi le gros souci de Torch est comme je disais pour l’artwork cette absence regrettable de concept clair et précis. OTUS a voulu probablement trouver un juste milieu entre une absence de concept si j’en crois le titre des pistes assez lambdas, et cette pochette qu’ils ont voulue avec plein de symboles, plein de trop de choses. Du coup, moi qui suis attentif aux signifiants d’un album, et entre parenthèses dans la vie de tous les jours et dans mon boulot, là je n’en vois pas. Hormis, allez ! Une référence évidente et trop déjà vue à la noirceur ténébreuse, je ne vois pas en quoi OTUS peut démarquer son album. Musicalement en plus, comme je précise, c’est très très bien ! La musique est très bien composée, l’ensemble est d’une harmonie presque sans faille, mais comme il manque une évidente conception globale, avec un sujet choisi et développé, on ne trouve pas de sens à cet album. Moi, je suis peut-être idiot et trop tatillon, je suis prêt à l’entendre. Mais quand on me propose un album en chronique, j’aime découvrir ce que les groupes veulent nous faire avaler de sincère et profond, et simplement faire de la musique dans une nappe de brouillard intellectuelle, cela n’a jamais permis d’offrir une visibilité particulière. Voilà pourquoi je regrette sincèrement que Torch ne soit pas plus développé que cela. Si vous êtes capables de faire abstraction de ce principe conceptuel qui fait exister l’album à au moins la moitié de ses compétences, je pense que vous allez l’adorer ! Mais pour moi, cela demeure un constat mi-figue mi-raisin. Très frustrant au final, cet album. Vraiment très frustrant…

D’autant que le chant présentait bien ! Avec une technique qui colle bien avec le Sludge Metal, en technique que j’appelle bêtement « hurlée » tant les râles et paroles semblent sortir des profondes entrailles, là encore tout était raccord ! J’aime bien ce côté un peu lointain qui permet de donner l’impression que le chant est étouffé exprès, mais pas trop, et qu’il surgit du fond de je-ne-sais quelle scène. Je trouve en revanche que ce dernier, qui n’offre pas une rythmique de chant plus rapide que cela, trahit surtout un aspect très random des textes, et donc comme je l’arguais plus haut, que l’album est un recueil de compositions sans lien spécial ni de fil conducteur. Mais ce n’est que mon avis. Je n’ai rien à rajouter pour le chant, si ce n’est un gros sentiment de gâchis qui est renforcé par la réussite du chant sur le plan technique.

Cette conclusion de chronique s’annonce sur un sentiment un peu en demi-teinte. Je suis partagé sur la question de la pertinence et du sérieux de ce Torch, deuxième album du groupe italien OTUS. Proposant un Doom Sludge Metal particulièrement bien réussi et prenant en première intention. C’est quand on creuse un tout petit peu dans la recherche de sens sur cet album que l’on se heurte à un constat évident, et triste à la fois : le concept est inexistant, et le sens quasiment absent. Ou alors, je n’ai pas réussi à discerner ce dernier, ce que je regrette car je ne peux pas l’écarter totalement.
En fait, si l’on en reste sur la musique en elle-même, sur la technique pure et la composition, l’album est impeccable ! Tout est bon, du son à la construction des riffs, en passant par le chant. Mais si on creuse le potentiel concept, on se rend qu’il n’y en a probablement pas de réel, et cet album manque alors cruellement d’originalité. Il faudra malheureusement passer outre cette absence intellectuelle pour aimer cet album qui je le maintiens, est excellent sur la musique pure. Pour moi, ce sera un « moyennement bon » pour faire l’effort de ne pas dire non.

Tracklist :

1. In Tenebris (01:21)
2. Through the Flesh (07:24)
3. The Vessel (12:15)
4. Apnea (05:37)
5. Ex Tenebris I (10:46)
6. Ex Tenebris II (05:55)

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