Kolossvs – The Line on the Border

Le 12 mai 2020 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


Helliminator : tous les instruments, chant

Style:

Black Metal

Date de sortie:

19 Mars 2020

Label:

Satanath Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 6.5/10

« Il jugea qu’à son appétit Dame baleine était trop grosse ; Dame fourmi trouva le ciron trop petit, Se croyant, pour elle, un colosse. » (Jean de la Fontaine)

Retour aux affaires pour ce mois de mai qui s’annonce enrichissant pour les nombreuses sorties à venir. Certaines ayant déjà été chroniquées, je m’amuse de fait dans ma demande d’albums à analyser, à prendre des groupes ayant été oubliés et qui pourtant ont beaucoup fait parler ! Cela peut arriver selon les accointances que nous autres, chroniqueurs, pouvons avoir pour untel ou untel style de Metal. J’étais donc moi-même passé devant certaines sorties sans m’en offusquer ou m’en extasier selon mes préférences. Une telle indifférence est parfois nécessairement gommable selon le retentissement que certains albums ont eu sur les réseaux sociaux ou les autres supports servant aux découvertes. Ainsi, pour le label Satanath Records qui nous avait récemment et gentiment, on doit le dire, envoyé son catalogue de sorties, il y a un groupe dont j’avais beaucoup entendu de louanges et que je me suis décidé à chroniquer, profitant par-là de l’oubli qu’il avait pu obtenir de la part de mes amourables (néologisme) confrères et consœurs, l’album étant sorti le 19 mars 2020 : le groupe Kolossvs. [Attention : à ne pas orthographier « Kolossus » sinon vous ne trouverez aucune information sur le groupe.]

Le groupe, ou plutôt devrais-je dire le one-man band de l’artiste italien Helliminator, dont on n’a pour palmarès avant son bébé qu’une expérience dans le groupe T132 dont on ne connait rien. Étonnant silence pour cet artiste qui a pourtant, si l’on en croit notre « grande » encyclopédie Metal Archives, fondé son groupe en 2014 et qui aura attendu six ans avant de sortir son premier album appelé The Line of the Border (« la ligne de la frontière ») qui est pléonasme à lui tout seul… bel exploit. Autrement, on retrouve un split avec le groupe italien Manon, qui est aussi un one-man band avec une activité encore moins florissante : fondé en 1995, une démo, un album en 2003 et… le split en 2018. On est donc sur un contexte assez déconcertant de silence, de manque d’expérience de la part de l’artiste, qui pourtant n’apparaît pas comme étant tout jeune, et de longueur sans productivité qui me laisse un peu perplexe. Doit-on en déduire un manque de motivation ? De talent ? Ou d’autre chose ? En tout cas, je suis assez surpris que Satanath Records sorte cet album et de l’engouement que j’ai pu lire sur Facebook.

Malgré cela, si j’en juge l’artwork, il y a de la qualité dans cet album. Reprenant un visuel nordique avec le logo du groupe en runes anciennes, un vegvisir entouré d’un dragon ou d’un serpent de la mythologie nordique (Nidhogg ? Jormungand ?) en orange et cet iceberg baignant sur une mer noire (pas de référence à Question pour un Champion, svp !), je me dois d’avouer que c’est typiquement ce genre d’artwork qui m’arrêterait chez un disquaire. Bien évidemment pour la symbolique nordique qui est chère à mon cœur mais, aussi, parce qu’il est très attirant avec cette carte de froideur assez originale pour du Black Metal. Plus habitués que nous sommes à voir des décors de forêts enneigées ou de montagnes brumeuses, pour une fois qu’un groupe nous propose une autre interprétation de la froideur dans le Black Metal avec cet iceberg et toute la dimension philosophique qui pourrait en découler – la partie immergée de l’iceberg -, je ne boude pas mon plaisir avec cet artwork. Ma seule déception résidant dans le nom des morceaux, d’une grande et un peu affligeante banalité, l’artwork n’en demeure pas moins très beau et d’une symbolique très travaillée. Bon point. Et il en faudra…

Parce que musicalement parlant, on ne se trouve pas loin d’une antithèse. Si je vantais l’artwork comme bien original et beau, la musique est tout le contraire : banale et « moins belle » pour ne pas non plus exagérer l’oxymore. En elle-même, je ne reproche rien de grave à la musique si ce n’est que Helliminator nous confirme que derrière son pseudonyme peu apocryphe (on a connu plus réfléchi), on devine que l’artiste n’amène rien de neuf. Proposant du Black Metal on-ne-peut plus classique, en essayant toutefois de sauver les apparences en incorporant des samples à la thématique religieuse, hélas déjà explorée aussi, et quelques effets de voix… je ne suis au final pas franchement emballé par l’album. Cela n’enlève cependant en rien les qualités qui émargent de la composition, que je détaillerai avec plaisir plus bas mais, en soi, mon premier constat (qui est toujours le plus important avant l’analyse) n’est pas folichon et s’inscrit – je crois – dans le contexte que je décrivais dans la présentation du one-man-band : inexpérimenté et sans particularité. Donc en deux mots : sans personnalité réelle. [Ça en fait trois, mon Quanteub :p (Hans Aplastz)]

Puisque l’originalité n’est pas le point médian de l’album et le nom des morceaux abondent en ce sens, la principale qualité reste le travail autour du son. Un Black Metal, certes, déjà entendu mais qui a au moins le mérite de naviguer sur un son bien travaillé, bien mixé, avec un ensemble instrumental harmonieux et agréable à l’écoute qui amène cette froideur avec non pas brio mais au moins avec sincérité, ce qui est tout de même un bon point aussi.
Il n’est en revanche pas parfait, loin de là. Je suis un peu déçu de trouver le ou les chants trop en retrait, ce qui se retrouve assez fréquemment dans des productions plus underground dans le Black Metal, avec une volonté de mettre le chant dans « du lointain » pour donner un effet de profondeur et de noirceur supplémentaire, ce qui est apprêté au hasard dans le sens où sur certains albums, cela passe, tandis que sur d’autres, cela casse. Et ici, le chant mis en fond de scène contrastant beaucoup trop avec une production de qualité indéniable, cela donne un ressenti davantage d’erreur de mixage qu’autre chose. De même que les samples, déjà peu nombreux, sont là encore soit trop mis en avant comme l’introduction du morceau « Sins » (qui est en français d’ailleurs) ou les cloches par exemple. Mais si l’on met de côté cet effet underground, la production est quand-même vraiment bien.
A noter que les morceaux s’enchaînent bien grâce notamment aux trois instrumentaux qui sont « Abyss », « Chains » et « Shores », qui sont des pauses plus ambiant que j’apprécie beaucoup malgré encore une fois le manque d’originalité flagrant.

En fait, au-delà de la musique, c’est tout le concept de l’album qui me dérange. Surfant sur la mode actuelle qui remet au goût du jour la mythologie nordique, le paganisme en général et l’anti-christianisme qui en découle naturellement, je n’arrive pas à cerner dans quel but s’inscrit cet album. On est sur un visuel nordique, mais lorsque l’on écoute les morceaux on s’aperçoit très vite qu’il y a une référence directe au Christianisme et, je l’imagine, d’une manière cynique comme l’on a dans le Black Metal en général. Certes, je parlais de manque de personnalité et d’une musique qui ne se démarque pas du tout mais je suis encore plus confus de voir qu’Helliminator ne se situe pas clairement sur une branche existentielle précise. C’est à se demander s’il n’est pas totalement hors sujet entre sa musique et son visuel !
Et cela me pose un énorme problème car, pour analyser un CD, j’ai besoin maladivement de pénétrer l’univers de ce dernier, de « mieux le connaitre » pour appréhender son approche de la musique et ce qu’il met de lui dedans. Or ici, tout n’est que confusion et cela me perd complètement dans mon analyse et, du coup, dans les écoutes différentes que j’ai dû faire. Que le lien entre Christianisme et Paganisme existe, c’est un fait indiscutable d’un point de vue historique et culturel… Mais quand on veut situer son univers artistique sur ce paroxysme, il faut, je pense, aller au bout de sa pensée et ne pas essayer soit d’être impartial, soit d’être indécis. C’est en cela le principal reproche que je fais à Helliminator et son premier album.

Pour conclure, je suis sur un constat assez peiné car je reste sur une impression sans réel emballement. Qu’il y ait des qualités d’exécution, c’est un fait indéniable ; qu’il y ait de l’inspiration, aussi. Mais la musique m’aura laissé sur une certaine indifférence que j’attribue à des œuvres déjà écoutées, du même cargo, et qui m’auront laissé un souvenir bien meilleur. Mon ressentiment se place également sur le manque d’expérience de l’artiste ou, du moins, de l’absence de son pedigree s’il en a un, qui dénote fortement dans ce premier album aux incohérences multiples, qu’elles soient musicales dans le mastering, conceptuelles dans l’univers artistique, et innovatrices dans le style abordé. Néanmoins, si lesdites incohérences rendent ce premier album assez difficiles à appréhender et apprécier, il n’en demeure pas moins que par son caractère perfectible, il ne peut que promettre du mieux au prochain album. C’est en tout cas que je souhaite à Helliminator : se perfectionner pour mieux rebondir.

Tracklist :

1. Abyss (01:08)
2. Fog (07:08)
3. Chains (01:45)
4. Sin (07:17)
5. Journey (05:33)
6. Reborn (07:19)
7. Shores (01:24)
8. Norge (04:08)
9. Glimmer (06:53)

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