Ar’ Vran Festival II – Premier jour

Le 20 avril 2024 posté par Metalfreak

Photos : Le Marquis Arthur
Report : Quantum

Il y a encore quelques années en arrière, jamais je n’aurais imaginé cela possible. La perspective de voyager m’était, pendant dix longues années de couple, quasiment impossible à envisager, et surtout aussi loin de chez moi. Et pourtant, la Bretagne m’attirait. Depuis longtemps, je rêvais de me confronter à ce pays plein de mystères. Qui n’a pas voulu un jour visiter Saint-Malo ? Qui n’a jamais voulu découvrir le festival Interceltiques de Lorient ? Le port bien connu de Brest ? Et j’en passe. Moi qui suis naturellement attiré par la culture celtique et sa mythologie, il me fallait bien ronger mon frein puisque les aléas de la vie ont fait que jamais, en trente quatre années d’existence sur Terre, je n’étais allé en Bretagne. Le défi me semblait trop important au regard de mon emploi du temps très chronophage qui m’empêche de base de voir mes ami(e)s même les plus proches, de la vie de père en garde alterné, et des contraintes du quotidien qui en incombe. Alors, quand mon compagnon de route et photographe Le Marquis Arthur m’a proposé de venir avec lui couvrir le Ar’ Vran Festival, sur la commune de Baguer-Pican en Ille-et-Vilaine, le premier détail a été de regarder comment y aller. Résolument, je n’avais pas envie d’y aller en voiture. Moi qui adore conduire, je connais le cout d’un tel trajet en passant par l’autoroute, et ces dernières semaines je n’avais que trop conduit. Alors, j’ai découvert le périple qui devait m’attendre, un trajet en bus et train jusqu’à Chantilly d’une bonne dizaine d’heures en comptant la transhumance avec la RATP sur Paris, puis quatre heures de route en partant de Chantilly en voiture. Quatorze heures de route. Franchement, en temps normal, j’aurais décliné rien que pour cela. Mais bon, l’affiche de ce festival m’attirait beaucoup, et ce malgré les griefs passés avec un des groupes. Et puis, depuis sept mois désormais, une femme est entrée dans ma vie à un moment où je désespérais de finir seul. Et malgré la distance entre nous, cette femme merveilleuse m’a donné un nouvel élan, et surtout m’a rappelé combien j’adorais voyager. Alors, ok ! Baguer-Pican, ce n’est pas la Bretagne profonde, puisque nous étions à vingt minutes du Mont-Saint-Michel. Mais quand-même, symboliquement cela comptait pour moi. C’est ainsi qu’après quelques atermoiements, j’ai décidé d’aller couvrir avec Le Marquis Arthur le Ar’ Vran Festival II. Et pas que ! Nous étions accompagnés de deux de ses amis, Alexandre et Guillaume, deux frères d’origine québécoise qui se sont avérés être une très belle rencontre ! Et puis, nous avons été rejoints par ma chérie, Anne-Lise, avec laquelle j’étais heureux de partager cette belle tranche de vie comprenant aussi une visite du Mont-Saint-Michel pleine d’émotions pour moi. Mais comme tous les bons moments, c’était mille fois trop court…

En ce qui concerne le Ar’ Vran Festival, il s’agissait de la deuxième édition. Fondé par un certain Kobal, alias Fabrice, la première édition ayant été un franc succès, avec une affiche qui m’aura déjà fait saliver à l’époque, cette deuxième édition arrive toutefois avec un an de retard puisqu’en 2023, il n’y aura pas eu de festival. Pour une raison que j’ignore, cette deuxième salve arrive donc en 2024 avec une affiche superbe, que je qualifie notablement d’intelligente car avec deux têtes d’affiches qui ne sont pas des ultra machines mainstream stériles, mais des formations montantes ou qui ont déjà confirmé leur importance sans pour autant être démesurées. J’apprécie le fait de faire jouer les groupes français en première moitié de journée, pour laisser place après aux groupes étrangers, et force est de constater que l’Europe aura été bien représentée avec pêlemêle la Lituanie, la Lettonie, La Belgique, La Suède, La Hollande, et même l’Argentine, même si ce dernier groupe est plus européen dans son line up que réellement argentin. Mais passons ! Le cadre s’annonce idéal pour un festival, qui se déroule en indoor avec tout autour une formule qui m’est chère, que je retrouve chaque année au Dark Medieval Fest avec des exposants médiévaux, des foodtrucks et des animations sympathiques comme un spectacle de feu ou des « cours » de forge, de breton, etc. Mention spéciale au café aux épices qui m’a permis de tenir le coup pendant ses deux jours intenses et sportifs, et à la poutine délicieuse, parce qu’oui ! Le gras, c’est la vie. La bière aussi était très bonne. Bref ! On avait tous les ingrédients pour passer un festival aux petits oignons. Ne manquait (comme d’habitude n’est-ce-pas) que le public qui aura déserté la journée de dimanche malgré la fin des concerts tôt. Cela devient désespérant surtout quand on connait l’incertitude qui va planer autour du festival à la fin de ces deux jours… On en reparlera.

1710879311--Ar_-Vran-Fest-2024---Running-Order---Samedi

Il n’est jamais simple d’ouvrir un festival. Je sais que beaucoup de groupes en rêvent, puisque cela permet de mettre une belle ligne sur un CV, peu importe le taille du festival. Et vraiment, je vous assure, ce n’est pas une promenade de santé. Erocis arrive sur ces entrefaites avec un bagage de jeunesse manifeste, car la formation parisienne existe depuis peu, soit 2019. Avec un EP et un single pour garnir leur discographie, je trouve qu’ils n’ont pas démérité du tout en ouvrant le festival parce qu’il y a eu tout de même un bel enchainement de pépins sur scène. Une musique très tournée sur le folk metal, les instruments en moins, avec une dimension épique loin d’être inintéressante ! On sent que les compositions apportent une dimension sincèrement aventureuse, et que même si elle ne révolutionne rien en la matière, elle a le mérite d’être bien amené. La sobriété du décor de scène a permis non pas de dénaturer la musique mais de laisser une place méritée à cette dernière pour nous faire vivre des émotions, et s’agissant de cela, Erocis ne manque pas de promesses pour une jeune formation. Premier bémol d’ailleurs qui n’a pas aidé : c’est la première fois de ma vie que j’entends plus les retours sur la scène que la façade ! C’est une grande première. Alors, qui est à recadrer dans cette affaire ? Les musiciens qui ont trop voulu s’entendre ? L’ingénieur son qui a bidouillé un truc à la dernière minute ? En tout cas, quand on était au premier rang, avec un peu de distance quand-même, à la scène, on entendait plus les retours que le reste. Incroyable… Maintenant, ce que j’ai à redire sur la prestation, et je vais passer pour un mec sévère, mais il faut absolument que nos amis gagnent en maitrise. Parce qu’on ne peut pas se parer de matériel scénique pour ses instruments, et ne pas savoir se coordonner pour s’en servir. Une pédale de guitare, quand on en prend une, il faut savoir la maitriser, sinon on vit des moments de solitude. C’est un peu ce qu’il s’est passé pour Erocis. Du coup, cette multiplication de pains et d’errance ont quelque peu gâché mon ressenti sur leur jeu de scène. Bon, ceci dit, je ne pense pas faire une offense ni une insulte en disant que c’est une jeune formation et qu’elle a suffisamment de talent et de marge de manœuvre pour s’améliorer les prochains coups. Je note par ailleurs une belle énergie scénique, j’ai notamment beaucoup aimé l’enthousiasme du bassiste, dernier arrivé du line up si j’en crois mes sources, qui dégage une motivation et une vraie joie de jouer à toute épreuve ! Mention spéciale également au chant qui s’avère de bonne qualité aussi bien sur le plan rythmique que technique. En fait, c’est un constat très encourageant que je fais sur Erocis. Car comme je le disais, ouvrir un festival n’est jamais chose aisée. Le public est encore un peu dans l’expectative, n’a pas encore consommé assez d’alcool et participe finalement peu. Pour sûr que dans un autre contexte, le groupe parisien de metal folklorique fera mieux, j’en suis convaincu ! Next.

erocis 4

C’est au tour du groupe Arntor d’entrer sur scène et j’avoue honteusement ne pas avoir fait le lien tout de suite avec le défunt groupe norvégien de black metal folklorique Windir. Imaginez le truc : les premières notes démarrent et vous avez un parfait imbécile comme moi, qui se dit « tiens ! On dirait du Windir, c’est sacrément ressemblant. » Mec, c’est normal ! Arntor est un groupe lillois de reprise de… Windir. Des fois, je me désespère… C’est, une fois le bazar cérébral reconnecté, que je me suis pris d’un bel enthousiasme. Autant vous le préciser tout de suite, j’adore Windir que j’ai découvert un peu sur le tard contrairement à d’autres projets de cet acabit, et j’ai toujours été sensible à ce côté décalé, où on sent que Valfar ne se donnait aucune limite dans la composition de sa musique. La tâche était rude sur le papier pour Arntor parce que Windir a tellement un côté légendaire pour certains qu’il s’agit de ne pas se tromper. La prestation était attendue, et j’ai senti tout de suite que le groupe gérait. Comprenons-nous : ce n’est jamais simple aussi de s’approprier les compositions d’un autre groupe, surtout au chant d’ailleurs. Et Arntor s’en est très bien sorti avec une certaine difficulté à entrer dans le set. J’en veux pour preuve la timidité assumée de la chanteuse qui, une fois la confiance repris, saura nous transporter dans un jeu de scène qui montre une confiance retrouvée. Il faut contextualiser là encore que le public manquera un peu de réception, or un chanteur ou un chanteuse a besoin d’interactions avec son public, sinon la confiance peut s’effondrer. A noter d’ailleurs un incident salvateur : suite à une bourde du batteur, la formation a dû recommencer un morceau. Et j’ai trouvé que cette erreur, loin de les avoir perturbé, finira par détendre tout le monde, public compris, et la deuxième moitié de set permettra à tout le monde d’entrer dans le jeu de scène et enfin, le public se montrera réceptif. Après, sur le côté groupe de reprise, cela n’a jamais été fondamentalement ma tasse de thé. J’ai même un peu de mal avec les groupes qui reprennent du mainstream comme si c’était leur musique. Cela me gêne. Mais concernant Arntor, au moins la formation lilloise aura eu le mérite de donner vie sur scène à une formation certes mythique, mais pas du tout mainstream ! Et c’est à souligner. En tout cas, malgré quelques pains, j’ai trouvé le concert très intéressant aussi. Une prestation plus aboutie que le précédent groupe, et là encore de belles promesses pour la suite.

arntor 1

Viendra ensuite le moment où Vosegus montera sur scène. Voilà la première formation que j’attendais sur le festival car lors du dernier Dark Medieval Fest, Vosegus avait annulé sa venue pour raisons de santé. J’étais pourtant impatient de découvrir l’un des nombreux projets de Cide, musicien nantais, que je suis de loin mais que j’ai eu la chance de voir dans FT-17 et Trollheart par exemple. Nantes et son vivier de groupes très talentueux, en voilà un qui ne dérogera pas à la règle. Sur le papier, le projet avait tout pour me plaire. Un black metal aux forts accents paganiques, avec cette part de mystères autour des thématiques abordées qui rajoutent encore davantage de curiosité à leur prestation scénique. Prestation finalement assez sobre, avec un décor simple mais qui permet une pleine immersion dans les atmosphères empreints de légendes et de mythes. Le flûtiste qui accompagne les instrumentations metal joue un rôle prépondérant là encore, loin d’être un banal accompagnement, l’apport mélodique et la douceur de la flûte colore la musique d’une teinte féérique presque. Je pense que Vosegus trouve encore plus de puissance quand il joue avec des lumières plus prononcées, soit dans un temps de nuit. Mais franchement, pour une première fois, je me suis totalement laissé bercer par cette musique black metal paganique tantôt agressive, tantôt planante, avec une variation dans les chants loin d’être dissonante. J’ai ainsi eu confirmation que tout ce que touche Cide vaut de l’or, et qu’il choisit très bien sa musique et ses groupes. Hâte de revoir Vosegus au prochain Dark Medieval Fest !

vosegus 1

J’avais déjà exaucé mon souhait de voir Darkwald en concert peu de temps avant le festival, c’était lors d’un concert à Tours en novembre 2023. Pour moi, c’est idiot à dire, mais Drakwald était l’un des groupes les plus prometteurs en matière de metal paganique en France. C’était dans ma jeunesse le groupe montant par excellence, et l’apothéose de les voir sur une affiche au Hellfest ne faisait que renforcer l’admiration que je portais pour les tourangeaux. Malheureusement, la Covid est passée par là et comme beaucoup de formations montantes, un coup d’arrêt phénoménal a été mis à la carrière prometteur du quintet. Après avoir sorti un album l’année dernière, Drakwald commence néanmoins à pointer de nouveau le bout de son nez sur les affiches de festival, et de concerts en général, et je leur souhaite évidemment de retrouver cette dynamique qu’ils avaient auparavant. En tout cas, au vu de la prestation sur le Ar’ Vran Festival, Drakwald n’a rien perdu de sa superbe ! Fort d’un metal mélodique, plutôt sur des accentuations death metal selon moi, les riffs sont soumis à variation du fait de cette présence quasiment systématique des instruments folkloriques comme la cornemuse, les flûtes, tout en demeurant sur une dynamique paganique voire metal folklorique à l’ancienne, avec cette prestance des musiciens sur scène qui démontre, pour les plus sceptiques d’entre vous, combien le groupe a de l’expérience et le charisme pour aller loin. La prestation est solide, carrée, ne souffre d’aucune contestation tant les morceaux fonctionnent et restent en tête et les costumes qui, il me semble, demeurent les mêmes depuis un moment, sont sobres mais efficaces par leur aspect sombre. A n’en pas douter puisque le public a commencé à manifester un vrai enthousiasme à leur encontre, démontrant que comme moi, les plus nostalgiques espèrent encore une gravitation vers les sommets. Sur le concert en lui-même, il n’y a rien à redire, vraiment. Au point que mon acolyte Le Marquis Arthur vivra son coup de foudre du festival aussi, alors que ce n’est pas spécifiquement sa tasse de thé. Moi qui suis aussi chanteur, Thibaud représente la classe pour moi. Droit, le regard décidé, haranguant le public comme il faut, sans en faire des tonnes, et je suis agréablement surpris par la réceptivité du public, comme je disais et ce malgré le côté solennel et fier de la musique. Bref ! Vous l’aurez compris, je suis un grand admirateur de Drakwald, et la prestation au festival ne fait que renforcer mes encouragements à persévérer pour atteindre les sommets du metal folklorique / paganique français. Lâchez rien les mecs !

drakwald 2

J’ai réalisé que le festival proposait un running order inédit dans ma connaissance des festivals, en proposant une première moitié de journée cent pour cent française, et l’autre moitié totalement inversée, que des groupes étrangers ! Ce qui me laisse à penser que Drakwald était l’une des têtes d’affiches françaises de la journée. En tout cas, les quatre prochaines formations sont étrangères, et le premier groupe à se présenter sur scène ne vient pas d’à côté du tout ! Voici le groupe Ukanose (prononcé « oukanocé ») qui nous vient de Lituanie, et de la capitale Vilnius ! J’ai une admiration incroyable pour les pays baltes, depuis toujours, pour la fierté immense qu’ils ont de leurs origines, de leurs histoires, et de la manière avec laquelle ils tiennent la tête haute devant l’ogre russe. J’ai pas mal bourlingué dans ces pays et je dois dire que j’ai eu un vrai coup de foudre pour la Lituanie et la Lettonie par cette fierté historique, que l’on peut aisément trouver dans les musiques traditionnelles et les groupes comme Ukanose. D’ailleurs, ils seront le premier groupe à nous offrir des banderoles de scène avec des drapeaux à motifs baltes, certains montés sur des lances, et les costumes type médiéval colorés en bleu ou rouge. Ukanose, que je connais très bien pour avoir fait la chronique du dernier album et pour les avoir vus à Lyon en 2022, a beaucoup progressé au point de s’imposer en Lituanie comme un des groupes les plus importants. Et la magie opère instantanément quand la musique démarre. Ukanose propose tout simplement des morceaux magnifiques, équilibrés en matière de violence, avec des moments mélodiques, épiques, deux chants clairs, un masculin, l’autre féminin, et cette flûte traversière totalement envoutante. Cette touche de douceur contraste beaucoup avec la violence de certains riffs metal, mais ne dénature pas du tout l’ensemble, bien au contraire. Le groupe lituanien propose d’ailleurs deux types de composition : une partie comme je disais très historique, très fier, limite guerrier, et d’autres plus dansants, amenant à la fête et la communion. Le public aura un peu de mal à s’imprégner pleinement de la musique, mais les quatre derniers morceaux, beaucoup plus punchy et dansants, font littéralement exploser le public ! Tous les musiciens s’impliquent dans la mise en scène, offrant un spectacle complet, et on sent que le line up fonctionne à merveille ensemble. Franchement, j’ai une affection particulière pour ce groupe qui dégage une sorte de clivage entre la partie sérieuse de leur musique et la partie plus drôle, loin des clichés « pouêt-pouêt » que l’on croirait, et je suis très heureux de les voir évoluer ainsi. Ukanose mérite en tout cas que l’on s’y intéresse, surtout si, comme moi, vous êtes sensibles à la fierté et à la droiture. Génial, tout simplement solide et génial.

ukanose 1

Et comme le hasard de la programmation (je blague !) fait bien les choses, voici l’autre groupe des pays baltes, cette fois-ci de Lettonie : Varang Nord. Alors, les concernant, c’est tout pareil : déjà vus à Lyon en 2022, on avait même partagé une affiche pour le Dark Medieval Fest en 2019. C’était, de mémoire, leur tout premier concert en France, et depuis, ils n’ont jamais cessé de clamer combien ils aimaient jouer en France, et surtout à ce festival d’ailleurs. Pour le Ar’ Vran Festival, bien évidemment que le constat risque d’être le même, et comme le groupe letton, originaire de Daugavpils, monte de plus en plus mais à l’européenne même, pour sûr qu’il ne faudra pas trop tarder pour les faire revenir. En tout cas, il s’agit donc encore d’un groupe que je suis de près, et dont j’ai vu une évolution exponentielle avec des tournées européennes, en première partie de grosses formations, et une scénographie qui a bien changé ! Le décor reste un peu le même avec cet énorme crâne en guise de pied de micro, les costumes avec des peaux de bêtes et dans une tradition médiévale, des décors de scène qui sont du plus bel effet. Mais j’avoue que le figurant en costume guerrier qui tient le drapeau de la Lettonie et de la France sur deux lances est d’un très très bel effet ! Allant sur le papier vers un metal folklorique sur la thématique viking, la vérité est plus au fond du verre qu’il n’y parait. En fait, Varang Nord part de plus en plus vers un schéma presque parodique. En témoigne les morceaux plus dansants que fédérateurs, un batteur mais aussi un musicien dont on ignore exactement ce qu’il fait, tantôt s’amusant avec des percussions de… Batterie, tantôt avec un tambourin, mais étant surtout particulièrement bourré et tenant à peine debout et fracassant les cymbales au point de littéralement les péter, et surtout, l’arrivée du guitariste / chanteur avec un costume très… Rétro. Genre années disco, avec un gilet jaune typé peau de léopard, et des lunettes de soleil. Alors là, j’avoue que je n’ai pas bien saisi le délire. Bon, après, le public a adhéré totalement au truc, et on retiendra que c’est le plus important. D’ailleurs, sur l’ensemble, la prestation est toujours aussi travaillée et le groupe fonctionne sur ses bases solides avec un nouveau bassiste, plus discret. Mais pour moi qui suis le groupe letton depuis les débuts, je suis déçu. Je suis passé d’un Varang Nord certes très dansant, mais avec quand-même des morceaux agressifs, solennels et fiers, à un Varang Nord qui fonce inexorablement vers une parodie de lui-même. Ok, les morceaux qui parlent d’alcool sont potentiellement ouverts à toutes les turpitudes ! Mais delà à tomber dans le piège de l’outrecuidance, j’ai du mal. En fait, la fin de set m’a laissé dans un constat de profonde perplexité. Je préférais très nettement le Varang Nord des débuts, quand le groupe faisait son metal folklorique avec l’accordéon, les danses marrantes mais surtout les morceaux sérieux sans décaler éhontément de sa ligne de départ. Là, j’ai bien peur que le groupe ne tombe dans les travers de beaucoup de groupes estampillés « pouêt-pouêt », et la prestation de ce soir m’aura laissé un gout amer. Je suis déçu.

varang 1

Pour continuer sur notre lancée, Skiltron arrive sur la scène en co-tête d’affiche du jour. Je m’amuse à dire que Skiltron, qui est sur le papier un groupe argentin, est finalement le groupe argentin le plus européen que je connaisse ! Alors, certes, les deux fondateurs du groupe qui sont guitariste et bassiste, sont réellement argentins, mais le batteur est finlandais, le chanteur est italien et le joueur de tin whistle et cornemuse est français ! Ce n’est pas banal du tout, comme ce n’est pas banal d’avoir un groupe sud-américain, aux antipodes de nos traditions européennes, qui traite de sujets… Celtes ! Autant vous dire que la genèse de ce groupe qui existe depuis 2004 sous cette appellation n’est pas banale. Là encore, on tape aussi dans du lourd avec des décors de scène plus importants, des costumes somme toutes assez sobres pour du metal à consonance celtique, avec les kilts évidemment. C’est vrai que secrètement, un poil plus de décor m’aurait fait plaisir, surtout si on compare aux têtes d’affiches du lendemain. Mais c’est un détail ! Par contre, je n’ai pas pu m’empêcher de rire quand le chanteur a fait péter son haut pour montrer sa musculature saillante, un peu comme le ferait Manowar. Cela faisait quand-même un peu cliché sur les bords ! Un peu kitsch même. Bon, je blague, c’est bon enfant. Le groupe aura en plus de cela une patience et un professionnalisme à rude épreuve puisqu’il y aura des pépins sonores juste avant de jouer qui donnera un retard déjà un peu conséquent suite aux errances d’Arntor. Mais le groupe est resté calme, patient, ce qui a forcé mon admiration. S’agissant de la musique, comme je mentionnais plus haut, la présence d’une cornemuse et de tin whistle donne cette nuance celtique caractéristique, et je salue l’immense talent de Pereg Ar Bagol qui, par sa présence, amène un vrai plus aux compositions. De toute manière, j’adore ce type, humainement et musicalement parlant, et le rencontrer aura été un privilège. Les instruments folkloriques ne sont pas là pour faire figuration, ils ont leur importance primordiale dans la musique de Skiltron. Sur le style de metal, on se situe en revanche beaucoup plus sur un registre power metal, avec un chant caractéristique qui nous emmène sur des envolées lyriques, une puissance impressionnante, et les riffs qui font irrémédiablement penser au style épique du power metal, allant sur un côté légendaire et guerrier qui lui sont propres. En fait, je me moquais pas mal au début, gentiment bien entendu, aucune volonté d’être méchant de ma part, je m’amusais simplement de la situation peu banale de Skiltron. Mais en vérité, la formation est très bonne, et tient la dragée haute aux autres formations typées celtiques actuelles, et n’ont rien à envier. Comme quoi, à partir du moment où on est passionné, tout roule. Et Skiltron a délivré ce soir-là une prestation haut de gamme, démontrant à la fois son sérieux, ses ambitions grandissantes et son expérience. Une très belle tête d’affiche !

skiltron 8

Et pour terminer, Prima Nocta se lancera sur la scène pour clôturer cette première journée intense, avec le plus grand nombre de groupes sur les deux jours. Il fallait être endurant ! D’autant que la formation belge joue sacrément en retard, et nous remerciera de rester pour le concert. Ce n’est pas rien ! Alors, Prima Nocta, je connaissais surtout de nom et de réputation. Étant branché musique celtique en général, ayant été bercé avec The Pogues, the Dubliners, et les groupes comme Cruachan, je savais par avance que j’aimerai la musique proposée par les belges de Gand. La première chose qui va me sidérer sera la beauté des cornemuses, toutes illustrées ou taillées par des motifs magnifiques, avec des tuyaux gigantesques, sûrement faites sur mesure mais qui sont en tout cas impressionnantes. La deuxième chose que je vais trouver cocasse est le look un peu « punk à chiens » du leader de Prima Nocta, en tout cas celui qui va nous parler, et son humour un peu insondable parfois (la belle-sœur qui s’appelle Prudence, je ne m’en suis pas encore remis). Mais au-delà de cela, l’humilité proposée en expliquant leur carrière, en nous remerciant d’être venus les voir, et cette posture bon enfant, limite entre potes avec nous, va me réchauffer le cœur. Pour une fois qu’une tête d’affiche de festival communie avec nous en dehors des artifices habituelles, en se mettant tout simplement à « notre niveau » si j’ose dire, cela fait un bien fou. Ce genre d’artistes, j’en redemande tous les jours. Et musicalement parlant, c’était juste génial. Cette musique celtique, un brin minimaliste mais très rythmée, avec des percussions prépondérantes. Mais tout cela fleure bon la musique de légendes. Et je m’avance surement un peu quand je dis cela mais Prima Nocta, qui revendique des influences comme In Extremo, ont clairement leur place dans ces légendes. C’était court mais intense, et le public ne s’est pas trompé en offrant de sa personne dans le pit. Mais on sentait quand-même que ce dernier était impressionné par le groupe présent, il y avait une forme de respect, de communion. Et tout cela fait du bien au moral ! Des concerts, et j’irai plus loin, des clôtures de journée de festival comme cela, on en redemande.

prima 5

Alors, pour cette première journée au Ar’ Vran Festival, je m’en vais fourbu mais heureux. Heureux parce que le public a répondu présent, s’est montré globalement actif et respectueux, c’est bien de le dire parce que ce n’est pas tout le temps le cas. J’ai découvert un festival qui souffre évidemment de quelques errances, mais on se souvient d’une part qu’il s’agit d’une deuxième édition, et d’autre part que, comme disait John Hammond dans Jurassik Park, « tous les grands parcs d’attraction ont du retard. » Il n’empêche que ce genre de festival avec une ambiance sympa, des stands médiévaux, des animations originales, et le légendaire beau temps breton (il a plu des cordes pratiquement tout l’après-midi !), c’est typiquement ce que je recherche. A taille humaine qui plus est, on se sent comme dans une réunion de cousins. Et c’est ce que tous les festivals devraient reproduire. Je pars donc me coucher, avec mes acolytes Le Marquis Arthur, Alexandre qui a adoré et Guillaume qui s’est tellement lâché qu’il a dû perdre dix litres de sueur ! Et surtout, ma chérie qui nous a rejoints pendant le concert d’Ukanose. Tout est réuni pour passer un second jour aux petits oignons !

Retour en début de page

Laissez un commentaire

M'informer des réponses et commentaires sur cet article.

Markup Controls
Emoticons Smile Grin Sad Surprised Shocked Confused Cool Mad Razz Neutral Wink Lol Red Face Cry Evil Twisted Roll Exclaim Question Idea Arrow Mr Green