The Old Dead Tree, Katabar

Le 20 mars 2007 posté par LittleGirlWithAGun

Intervieweuse : Helen Chachaty

Me voilà devant le Katabar. Il est 18h30, je dois interviewer les désormais fameux membres de The Old Dead Tree, groupe français qui monte, qui monte… La journée promo étant dédiée à la sortie de leur nouvel album The Water Fields, il est tout naturel que des tonnes de questions à propos de leur nouvel opus me passent par la tête… Descendons dans les sous-sols du bar et écoutons ce que Manu et Gilles ont à me dire…

SC : Alors, contents de votre nouveau bébé?

Unanimement : Oui.

Gilles : Ouais, très fier de ce nouvel album je dois dire, du travail qu’on a abattu, après des conditions un peu difficiles d’écriture etc., bref, on est très satisfaits en tout cas. Je pense que c’est l’album le plus abouti du groupe, peut-être aussi parce que je n’ai pas participé aux deux premiers, j’ai un regard différent sur cet album.
Je sais que Manuel, de son côté, a peut-être un peu plus de mal à donner son avis dessus…

Manu : Effectivement, je vais attendre environ six mois avant de donner un avis définitif, histoire d’avoir un peu de distance quoi. En tout les cas, il y a plein de choses qui me plaisent énormément dans cet album, mais je n’arrive pas encore à avoir une vision globale, et surtout à réussir à le juger avec l’oreille de musicien et pas l’oreille du gars qui l’a composé. Mais bon, pour le moment les retours sont très très bons, comme je le disais, il y a énormément de choses qui me touchent dans cet album et je pense qu’on a fait quelque chose de vraiment bon, maintenant, euh, j’vais attendre avant de dire effectivement « On a fait quelque chose de bon. »

SC : Ok, on reviendra dans six mois alors.
(Rires)

SC : Et sinon, pour ceux qui ne l’auraient pas encore écouté, quel est le concept général, si je puis dire, de cet album? Sa tonalité, tout ça…

Manu : Il est plus dark. Plus sombre et plus agressif, plus metal dans l’ensemble. C’est un album qui est plus homogène, dans la mesure où « The Perpetual Motion » avait tendance à faire parfois des montagnes russes, entre des morceaux qui sont très violents et d’autres beaucoup plus calmes, là, au contraire, on peut dire que « The Water Fields » est mieux réparti dans les morceaux, il y a une espèce de tension sous-jacente qui est un peu due aux conditions d’écriture, c’est-à-dire qu’au moment de cette écriture on a du faire face à pas mal de choses. En premier lieu le départ de Nico (NDLR : ancien guitariste du groupe remplacé à présent par Gilles), membre du groupe depuis le début, on a donc du chercher un nouveau guitariste, avec qui on a du construire une relation etc. On a ensuite eu deux naissances (NDLR : Manu et Gilles), plus un changement de management, ce qui fait qu’on a eu l’impression que tout ça n’allait jamais s’arrêter. A ce moment, il y avait beaucoup de frustration dans l’air, de tension, même si entre nous ça s’est super bien passé, on a tous vécu une période assez trouble, et finalement ça se reflète dans l’album, dans l’agressivité générale que j’ai décrite plus tôt.

SC : Bon, question bateau : comment se passe le travail de composition? Qui de la musique ou des paroles arrive en premier?

Manu et Gilles : La musique d’abord.

Gilles : Celle des guitaristes en premier lieu, puis la travail d’arrangements avec le bassiste et le batteur. Avec Manu on a vraiment beaucoup travaillé ensemble, pour avoir une cohésion parfaite…

Manu : Dans TODT, y a une particularité, la batterie et la basse ne suivent pas les guitares comme ça peut se faire dans d’autres groupes, on a vraiment deux entités différentes, deux entités rythmiques qui sont distinctes et qui se complètent. Du coup on a vraiment un travail différent, les guitares amènent la base mais ils forgent quelque chose à part. Ensuite c’est le tour du chant. Là, contrairement au reste, je travaille vraiment tout seul.

SC : Justement, pour les textes, quelle a été ta source d’inspiration, comment tu as travaillé? Est-ce que la ligne est la même que pour les deux précédents albums?

Manu : Il est vrai que les deux premiers albums étaient surtout basés sur « ma petite personne » on va dire, sur « The Water Fields » j’ai voulu m’éloigner de ce système-là, parce que c’est jamais bon de donner autant de soi-même à des gens que l’on ne connaît pas, parce que finalement, les paroles sont lues derrière et quand tu t’aperçois qu’il y a beaucoup de gens que tu n’as jamais vu et qui connaissent très bien ton intimité, bah… y a un truc qui va pas. Donc du coup c’est vrai que pour cet album-là j’ai plutôt voulu regarder autour de moi, mes proches, ma famille, mes amis, j’ai regardé comment chacun réagissait face à un problème et je me suis aperçu qu’on avait tous un petit peu ce réflexe-là, quand la douleur arrive, quand un problème se présente, au lieu d’y faire face, on essaye de s’y soustraire. Soit c’est la fuite, soit c’est le déni, on ferme les yeux et on essaye de ne pas y penser. Y a des tas de moyens de réagir, mais la plupart du temps, tous les moyens qu’on utilise sont contraires à une réaction présumée positive. Un exemple tout con : quand on se brûle la main, le réflexe c’est d’enlever sa main et pas d’éteindre la bougie. Concrètement on a tous eu ce réflexe-là, fuir, d’abord fuir et après on cherche à rebondir.

« The Water Fields » c’est donc les champs d’eau, l’espèce de lieu imaginaire qu’on veut tous avoir en soi, ce lieu de repli. Pour nous c’est la musique par exemple, pour d’autres ça va être le tunning, passer ses journées sur Msn ou regarder la télé non stop, un endroit où on peut se « laver le cerveau », où on pense à autre chose et surtout pas à la réalité et à la douleur. Le problème, c’est qu’il y a des gens qui s’y noient, dans ces champs d’eau, et qui y restent toute leur vie…

SC : On a donc toujours cette question de douleur, de souffrance…

Manu : On fait pas de la musette en même temps! (Rires) Faut que ça colle avec le genre de musique qu’on fait aussi, j’aurais bien raconté des histoires d’enfants qui jouent au parc, mais ça allait pas le faire.

SC : Peut-être pour le prochain album alors…?

Manu : Peut-être que le prochain album sera un album pour les enfants, oui, effectivement!

SC : Quel a été, selon vous, le morceau le plus dur à enregistrer?

Manu : Techniquement, Rise to the Occasion, il y a tellement de pistes, tellement de sons différents qui se mélangent qu’on arrive à soixante pistes environ, ce qui en soi est énorme, et donc un vrai casse-tête. Les arrangements sont également extrêmement alambiqués. Jusqu’à la dernières répétition on n’avait pas encore tout fixé, et encore, Foued (batterie) a changé ses parties à l’enregistrement! (Rires) Une vraie pression pendant l’enregistrement. L’arrêt du studio a été un soulagement, surtout pour ce morceau.

SC : Le morceau qui a le plus de force selon vous?

Manu : Gilles et moi on a Dive en commun, après moi je sais que j’aime beaucoup Is your Soul for Sale?

SC : Vous avez une espère de méga tournée qui vous attend en France, à l’étranger. Vous avez déjà été en France (naturellement), en Belgique, mais vous allez également partir en Allemagne, vous avez déjà une fan base là-bas?

Manu : En fait oui, on avait déjà joué en Allemagne, le festival allemand Wave Gotik Treffen en 2006 à Leipzig, on avait joué juste avant Katatonia, dans un endroit bourré de monde, et on avait eu droit à un excellent accueil, meilleur score merchandising de la soirée, donc on s’est dit « Bon, bah c’est plutôt encourageant ». On a également eu d’excellentes chroniques dans des webzines ou magazines allemands.

La Belgique et la Hollande, c’est vrai que ça fait longtemps qu’on tourne là-bas, aucun souci. On va découvrir le Portugal aussi, ça va faire du bien, ça va nous réchauffer un peu! (Rires) On est très satisfaits de voir que ça commence à bien bouger.

SC: Y a des pays dans lesquels vous aimeriez bien jouer?

Manu : L’Australie, le Japon…

SC : Parlons un peu de la pochette… On y voit pas mal de désordre, une femme, qui donne l’impression d’être perdue…

Manu : Elle est entourée de problèmes. Autour d’elle il y a une espèce de mélange, de désordre, ça renvoie à plusieurs paroles de l’album, tout se mélange, y a des ruines, une horloge… C’est une sorte de figuration du stress de tous les jours, et elle regarde vers le sol, le reflet qui semble être de l’eau… Pour cette cover-là on a contacté des designers du monde entier, on a eu beaucoup de propositions qui tournaient autour de l’eau mais qui au final s’éloignaient un peu du concept du titre et de l’album. Il n’y en a qu’un seul qui a vraiment travaillé sur le concept, sur le fond. Ca nous a plu tout de suite, c’est un peu spécial, ça nous a rappelé les pochettes de prog’ des années 70, le genre que tu voudrais avoir en 33 tours pour voir tous les détails… C’est un artwork dont on est très satisfaits parce qu’il est beau, original et il suit vraiment vraiment le concept de l’album.

SC : Bon, vous faites quand même partie des groupes de metal qui commencent à vraiment bien marcher en France, vous vivez de votre musique ou toujours pas?

Manu : Bah on est riches! (Rires) Je rigole. Non, on n’en vit pas. On garde l’espoir, mais c’est pas d’actualité. Les recettes passent surtout par les concerts, puisque les ventes des disques sont assez conséquentes, mais pas énormes, le marché du disque est un peu en train de couler, mais les concerts sont très importants.

SC : Un avis sur la scène metal française en général?

Manu : Bon, à part Lux Incerta (autre groupe de Gilles), ils sont tous très bons! (Rires) Sans rire, il y a une réelle professionnalisation de la scène metal française, c’est-à-dire qu’en cinq, six ans il y a eu une véritable explosion de groupes avec une démarche professionnelle, des sites Internet qui tiennent la route etc. C’est vraiment super, nous on était un peu les premiers à partir jouer et dans les chroniques on lisait régulièrement  » On n’arrive pas à croire qu’ils viennent de France! ». Ca donne plutôt une très très mauvaise image du metal en France… Heureusement, ça change parce qu’il y a Gojira, Dagoba, Scarve, ça bouge vraiment en ce moment… Bon, on n’est pas encore considérés comme l’Allemagne, y a encore du travail, mais le fait est que voilà, il y a du respect et de l’attention qui vient de l’extérieur. C’est plutôt bon.

SC : Meilleur souvenir de concert?

Manu: L’ouverture pour Paradise Lost. Je suis vraiment fan de ce groupe donc ce concert a vraiment été un de mes meilleurs souvenirs.

Gilles : L’ouverture pour My Dying Bride avec Lux Incerta en avril dernier. C’était vraiment extra. Sinon, bah les trois concerts avec The Old Dead Tree, en particulier la date à Lyon, où y avait vraiment une pure ambiance.

Manu : Ouais, c’est vrai qu’on a le plus de public à Paris et à Lyon, c’est là qu’on remarque le plus d’ambiance.

SC : C’est comme ça pour pas mal de groupes, Paris et Lyon semblent vraiment être des « lieux de metal ».

Manu : Ouais, mais regarde Dagoba à Marseille, ça doit être pas mal aussi! (Rires)

Sinon je dois dire que quand on joue à Paris, Lyon, Liège (je n’entends pas le nom de la quatrième ville), on a l’impression de jouer comme à la maison. Ce sont des villes où on a une fan base très solide, il se passe quelque chose de spécial à chaque fois.

SC : Des idoles dans le monde moderne?

Manu : Musicalement j’ai des idoles, mais je pourrais te faire la réponse de Dave Mustaine: « Le karaté et Jésus. » (Rires)

SC : Ca vaut pour toi aussi?

Manu : Absolument, je ne fais pas de karaté et je suis athée mais sinon c’est tout à fait ça.

Plus sérieusement, je reste pantois devant Jeff Buckley, Matthew Bellamy (Muse) et Gregor Mackintosh (Paradise Lost), trois compositeurs, dont deux qui chantent avec un niveau absolument dégoûtant… Après leur vie je m’en fous, mais musicalement ils m’impressionnent beaucoup et me rappellent à ma condition de « petit musicien »…

Gilles : Robert Smith (The Cure) et Adrian Smith (Iron Maiden).

SC : Quel autre style de musique écoutez-vous?

Manu : Je dois dire que Diams est une grosse influence chez The Old Dead Tree. Il y a une telle profondeur dans ses paroles que j’en ai la larme à l’œil, surtout avec « Laisse-moi kiffer la vibe avec mon mec, j’suis pas d’humeur à c’qu’on me prenne la tête », ça m’a soufflé, même maintenant j’arrive pas encore à tout saisir…

Gilles : Celtic Frost.

Manu : On a dit autres styles de musique!
(Rires)
Gilles : Soit, je reste quand même très dans le batcave, l’electro… et puis le metal et le rock en général. Je dois dire que j’ai quand même beaucoup de mal avec le metal allemand et le heavy speed.

Manu : Les incontournables comme Pink Floyd, les Beatles… J’ai récemment acheté un album d’Emilie Simon, très bien. Mais le plus important c’est de ne pas se limiter. Je reste très metal parce que c’est ma base quand j’étais ado, mais il y a du bon partout. Je pense d’ailleurs sérieusement à m’acheter un Best-Of de disco, ça pourrait être pas mal.

SC : Pour faire des reprises?

Manu : Non, pas pour le moment. On est super exigeants, alors si on fait une reprise, ça ne devra en aucun cas être une reprise bateau. Enfin, j’voulais pas le dire, mais Tata Yoyo c’est presque dans la boîte! (Rires)

Sinon, tu connais les OGM? Ils mélangent des noms de groupe, ça donne des trucs du style Delpech Mode, Georges Moustakis (Georges Moustaki et Kiss), Nirvani Cordy etc… Ils sont complètement timbrés et chantent mal, c’est dramatique, mais c’est marrant!

SC : On arrive à la dernière question, le traditionnel mot de la fin. A vous de parler, lâchez-vous!

Manu : Betterave.

SC : Ca sera tout?

Manu : Je laisse Gilles se charger du mot de la fin.

Gilles : Oui, betterave. (Rires) Désolé, on est fatigués… Bon bah que dire sinon qu’on est super fiers de cet album, on a travaillé dur pendant quasiment un an dessus et on espère que les gens aimeront!

SC : T’es sûr Manu, c’est tout, on reste sur betterave? C’est le moment de te rattraper!

Manu : Oui, betterave.

Bon bah… Betterave alors!

C’est donc sur ce mot hautement philosophique que prend fin l’interview, il ne me reste donc plus qu’à aller méditer sur le sens profond de la betterave et de son implication chez les Old.

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