C’est désormais de rigueur, la halte lyonnaise est une étape obligatoire lors des tournées européennes de géant du heavy atmo/sympho qu’est devenu Therion : preuve en est avec deux Ninkasi et un Transbordeur (pour ces 20 ans) ces dernières années. Un nouvel album dans la besace, revoilà nos suédois sur les routes et votre serviteur sur les rails afin d’aller juger sur pièce de ce dont il retourne, car avec Therion, le moins que l’on puisse dire, c’est que les tournées s’enchainent mais ne se ressemblent pas. Longtemps hésitante en terme de rendu scénique, la troupe s’est forgée depuis quelques années maintenant, une solide réputation de bête de scène et une imagerie théâtrale bien à elle (référez-vous au DVD « Live Gothic » (2008)). Mais cette fois-ci le challenge est de taille, le cabochard Christofer Johnsson (guitare, composition) ayant viré toute sa partie instrumentale il y a peu, je vous avoue tout de go que j’avais bien des craintes quant à ce show. Déjà que le petit dernier « Sitra Ahra » n’est pas ce qu’on peut à proprement parler une franche réussite, c’est bien par curiosité que je me suis rendu ce soir au Transbordeur de Villeurbanne, pour une soirée sous l’égide de Base Prod.

 LOCH VOSTOK

Mais avant toute chose, laissons place aux premières parties, venues elles aussi de Scandinavie. C’est Loch Vostok, qui ouvre les hostilités avec un metal mélangeant par touches succinctes du heavy, du death et du prog, tout en alternant chant clair et vocaux gutturaux. Dit comme ça, cela vous rappelle quelque chose ? Opeth ? Et bien non en fait, c’est ça la feinte. Même si leurs grands frères de Stockholm font évidemment partis de leurs influences, le style de Loch Vostok est relativement différent, plus proche de la scène américaine des 90’s comme Death (en un peu moins virulent) et Atheist/Cynic (sans la touche jazzy) mais en gardant quelque chose de tout suédois dans l’approche rythmique. Enfin, je trouve. La musique du combo interpelle, il n’y a pas à dire, mais demeure pas très simple à suivre pour une découverte live. De plus malgré une bonne volonté affichée, le combo peine un peu à convaincre de par une prestation on ne peu plus statique et par une musique manquant un peu de maturité, se cherchant encore. En effet nous assistons plus à une alternance de morceaux tour à tour prog, death, pop (!) ou heavy qu’à de véritables compositions intégrant tous ces éléments en leur sein. Mais tout vient à point pour qui sait attendre. Une sympathique découverte en tout cas.

LEPROUS

C’est au tour de Leprous, de Norvège, de s’avancer, et le public arrivant peu à peu, n’est assurément pas au bout de ses surprises, car il y a un petit quelque chose de presque avant-gardiste qui plane sur la scène du Transbo alors que le combo débute son set. Moi qui m’attendais, vu le patronyme, à un truc bien death et bien bas du front, j’en ai eu pour mes frais. D’emblée, le groupe nous balance des compos alambiquées aux riffs savamment prise de tête. Du claviériste-chanteur dreadlocké en passant par le guitariste 8-cordes, tous habillés à la mode du 19ème, voici une formule qui surprend autant d’un point de vue visuel que musical, pour un univers décalé entre Diablo Swing Orchestra, Unexpect et pourquoi pas Pain Of Salvation. Les compos sont longues, fourmillent d’idées mais visiblement, déstabilisent le public à priori peu habitué à ce déballage technique gratuit, ou tout du moins non préparé à ça alors que la soirée s’annonçait plus atmo et plus simple d’accès ! Et à part ce chant mi-pop mi-hurlé vraiment à contre courant, toujours est-il que le groupe m’a convaincu et m’a vraiment donné envie d’en écouter plus ce qui visiblement, aux dires des commentaires recueillis ci et là, n’a pas été le cas de tout le monde. On tâchera d’en reparler dans nos colonnes.

THERION

Mais là, c’est l’heure de Therion. La scène est étonnement sobre par rapport à ce que l’on a pu voir ces dernières années, juste décorée d’un backdrop à l’effigie du dernier album, d’un piano droit, et de trois voilures disposées en arc de cercle faisant office de pupitre depuis lesquels les vocalistes harangueront la foule. Et c’est sans surprise aux notes de ‘Sitra ahra’ (la chanson qui passe d’ailleurs bien mieux en live que sur album) que la partie instrumentale débarque bientôt rejoint par les 4 chanteurs-choristes (Katarina Lilja, Thomas Vikström, Snowy Shaw puis Lori Lewis) arrivant un par un au grée des couplets. La sobriété est donc de mise, les tenues vestimentaires s’accordant plus là aussi avec un opéra du 19ème siècle … Sauf Snowy Shaw semblant n’en faire qu’à sa tête avec une tenue limite teenageuse américaine (et si …) qui dépareille avec le reste. Tant qu’on y est avec les présentations, Nalley Pahlsson (basse) est remplacé par Waldemar Sorychta (rien que ça). Therion ne va pas y aller par quatre chemins, en enchaînant par le très heavy et énergique ‘Wine of Aluqah’, le groupe sait très bien que la température va rapidement monter tandis que le public ne saura rester de marbre. Et la formule, fonctionnant à merveille, est reprise à l’identique pour l’agressif ‘Typhon’ aux grunts assurés par Shaw. Alors que le groupe s’offre une première pause le temps de changer d’accordage, la scène se teint en rose annonçant un plus serein (mais convenu) ‘Perenial Sophia’, le seul titre d’ailleurs issu de « Gothic Kabbalah » (2007). Un choix judicieux, car avec deux dernières tournées faisant la part belle à cet album ainsi qu’à « Theli » (1996) (interprété dans son intégralité lors du précédent passage des suédois), un peu d’air frais dans la setlist nous fera donc du plus grand bien. C’est ainsi qu’une large place va être laissée aux deux opus pré-Gothic Kabbalah : le double album « Lemuria/Sirius B » (2004) qui outre les classiques et attendus ‘Lemuria’ ou ‘Blood of Kingu’ nous permet de découvrir quelques raretés que je n’espérais plus voir un jour en live comme ‘Call of Dagon’ ou encore ‘Voyage of Gurdjieff’ et sa fantastique intro a capella, et son prédécesseur le trop mésestimé « Secret Of The Runes » (2001), une occasion rêvée de profiter de la qualité du quatuor vocal sur les chœurs propres à cet opus, totalisant à eux deux une dizaine de titres, soit une petite moitié de la setlist.

Un concert de Therion recèle toujours quelques surprises, et cette interprétation de l’onirique et ô combien magnifique ‘The siren of the woods’, au piano, en est une. Et cette reprise du ‘Dies Irae’ de Mozart en est assurément une autre. Cette relecture metal, que l’on avait pu voir sur le DVD « The Miskolc Experience » (2009) avec un orchestre philarmonique s’intègre très bien au reste du répertoire du groupe. Et sur ces deux titres force est d’avouer, pour ceux qui en douteraient encore, que Lori Lewis est décidément l’une des plus grandes chanteuses en activité. Pas une fausse note, toujours égale à elle-même. Se sera d’ailleurs le mot d’ordre de la soirée : la maîtrise technique parfaite, rien à redire de ce côté : les petits nouveaux se débrouillent à merveille. Bon, retour au show. Rassurez-vous, la troupe n’en oublie pas pour autant sa dernière livraison, en choisissant le meilleur comme ‘Hellequin’ ou ‘Kali Yuga III’ (quitte à piocher dans les précédents albums, on regrettera qu’il n’ait pas poussé l’audace jusqu’à interpréter les parties I et II (présentes sur « Sirius B »)). Suite à ce déchaînement heavy-metal, le groupe effectue un petit retour en calmant le tempo le temps d’un ‘Call of Dagon’ (où Thomas Vikström s’emparera de sa flute sur l’intro) mais marquera tout de même un léger ventre mou sur l’enchainement ‘Clavicula nox’/’Enter Vril-ya’ peut être un brin trop atmosphérique par rapport à ce qui a précédé. Un ventre mou de courte durée puisque un ‘Blood of Kingu’ des familles aura tôt fait de remettre tout le monde d’accord. Encore quelques morceaux dont ce récent ‘Unguentum Sabbati’ dont quasi tout le monde fredonnera la mélodie tirée du célèbre ‘Phantom of the opera’ et on se dirige lentement vers le rappel. La pression dans le public ne redescend pas et c’est véritablement sous une pluie d’applaudissement que le groupe revient sur scène pour deux de ses plus gros classiques : les énormes et inévitables ‘Rise of Sodom & Gomorrah’ et surtout ‘To Mega Therion’ !

Voila, donc ! J’en doutais mais Therion m’a remis une énorme baffe dans la gueule, comme les fois précédentes (sauf peut être au Hellfest 2007). Un show sans faille, une setlist très judicieuse, surprenante même et de la satisfaction sur tous les visages à l’arrivée. Un point surprenant tout de même, alors que Snowy Shaw a été un élément primordial en terme de cohérence visuelle les années passées (les costumes, c’était lui), on a une étrange impression qu’il se met un peu à l’écart volontairement, autant d’un point de vue scénique que par son interprétation par moment volontairement très décalée. On n’oubliera pas l’épisode de cet été, ou le chanteur avait quitté le groupe pour rejoindre Dimmu Borgir avant de claquer la porte avec fracas quelques jours plus tard, pour se rapprocher à nouveau de Therion. Doit-on y voir une corrélation ? Qui sait …

En tout cas, le déroulement de cette bonne soirée à été au quart de poil, ce qui permet de ne pas finir trop tard et de pouvoir profiter des derniers métros afin d’être en forme pour le lendemain pour ceux qui bossent. Nickel.

Setlist Therion
01. Sitra ahra
02. Wine of aluqah
03. Typhon
04. Perenial Sophia
05. Hellequin
06. Niefelheim
07. The siren of the woods
08. Voyage of gurdjieff
09. Ljusalfheim
10 Dies irae
11. Ginnungagap
12. Kali yuga III
13. Call of dagon
14. Clavicula nox
15. Enter vril-ya
16. Blood of kingu
17. Lemuria
18. Abraxas
19. Unguentum sabbati
— Rappel
20. Rise of odom & gomorrah
21. To mega therion

 

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