Lewis

Le 23 mars 2021 posté par Metalfreak

Intervieweuse : Cilou Bulle
Interviewé : Lewis

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Inside, dans l’intimité de Lewis
Entretien avec l’artiste de prog marseillais pour son premier album

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Direction la scène rock/prog marseillaise avec Lewis et son premier album « Inside » (19 Mars 2021), un opus qui ne devrait pas passer inaperçu pour les amateurs du genre. Des compositions intéressantes et intimistes, une voix cristalline et enivrante, tous les ingrédients d’un succès.
Après une première expérience dans un groupe de rock psychédélique dont il est toujours le frontman/ guitariste, Lewis nous livre avec ce premier album une partie de lui-même.
Je suis partie à sa rencontre pour faire connaissance avec cet artiste et discuter de son premier opus.

Bonjour Lewis et merci de m’accorder cette interview.
Lewis est ton projet solo, après plusieurs projets musicaux dont le plus récent, dans lequel tu officies toujours, Tense Of Tools (ndlr : rock psychédélique).
Qu’est-ce qui t’as amené à cette volonté de monter Lewis ?

Bonjour, merci de cette interview ! Avec mon groupe Tense Of Fools, on compose en commun c’est à dire que chacun amène quelque chose, ça peut être une idée, une ambiance, une parole, un riff et par la suite on essaie en groupe d’arborer quelque chose de commun et de liant pour privilégier le sens d’une vraie esthétique de groupe.
C’est super intéressant !
Ce processus prend par contre du temps et c’est là que Inside, mon projet solo, vient faire sens : j’avais des trucs à sortir après une période de vie difficile et je ressentais le besoin fondamental de mettre ça en musique. J’ai donc proposé mes morceaux au groupe et ils m’ont suivi, ils m’ont aidé dans ma démarche créatrice à pouvoir poser les choses dans un temps imparti. C’était donc une manière différente que de fonctionner en groupe, je pense qu’elle a aussi permis à chaque musicien qui m’accompagne sur ce projet d’exprimer aussi son identité propre dans les morceaux !

J’ai lu que tu es diplômé en psychologie clinique et spécialisé en psychologie de la musique. Cette orientation influe-t-elle dans la composition de ta musique ?

En effet je suis aussi psychologue et je bosse en psychiatrie. J’utilise la musique et la photographie dans mon métier comme des médias projectifs permettant de mettre en œuvre des processus inconscients. En tout cas, effectivement, tout ce que je vis au travail avec les personnes que je rencontre m’apprend beaucoup, j’en connais plus sur les autres et j’en connais aussi plus sur moi. Mon travail m’amène à voir des facettes de la réalité qui sont très dures et très intenses, malgré ça il y a un profond échange d’humanité et une joie intense qui se dégage de mon travail. Le clair-obscur de l’album, de ma période de vie traversée, de mon travail, tout est un peu dans cet album ! Une vraie Musique Analyse (rires) !

Tu es un électron libre. Cette expression signifie pour moi dans ce contexte quelqu’un qui a beaucoup voyagé, mais pas seulement visité, qui s’est installé dans des villes différentes, a rencontré des gens différents avec des façons de vivre différentes. J’ai lu que tu as vécu en France mais aussi à l’étranger, au Canada. Cette mobilité a -t-elle été un moteur, une source d’inspiration pour ta musique ? Et si oui en quoi ?

J’aime bien cette expression ! Un électron libre est -il vraiment libre puisqu’il continue malgré tout de graviter autour d’un noyau ? Avec un peu de recul, j’en viens à penser que hormis les lieux et les atmosphères qu’ils dégagent, ce sont les rencontres et les conditions propices à pouvoir connaître l’autre sous ses différentes facettes qui m’ont beaucoup inspiré. Par exemple au Canada j’ai eu l’occasion de rencontrer des musiciens incroyables d’horizons totalement différents. Tout semblait différent dans leur approche de la musique, le genre, les couleurs, la manière d’aborder l’instrument, la manière d’intégrer la technique ou justement de pas vraiment y prêter attention. Le Canada était vraiment une année merveilleuse au niveau de la découverte musicale.

Inside, estampillé rock progressif est un melting pot qu’il est difficile de résumer en du rock progressif.
Un bel exemple du mélange des genres pourrait être Fox. Un titre rock’n’roll jazzy qui me rappelle les vibes des années 70, qui s’envole dans un stoner rock psychédélique alliant puissance et douceur. Et ceci n’est qu’un exemple.
Comment pourrais-tu décrire au final ton univers musical ?

Mon univers musical est peut-être aussi décousu que ma manière d’aborder la musique ! (Rires)
J’ai l’impression que je ne sais pas faire autrement que de mélanger ce qui me traverse émotionnellement. Je suis un piètre musicien de reprises, je n’ai jamais réussi à tenir une reprise jusqu’au bout, à partir du moment où j’ai appris quelques accords à la guitare, j’essayais déjà d’en faire quelque chose de personnel. Cette approche de la musique qui est la mienne a ses qualités comme ses défauts ; par exemple, je ne sais pas vraiment suivre une grille, je ne sais pas lire la musique. Pour les qualités, c’est peut-être l’originalité qui ressort de ce mélange, je fais de la musique un peu comme je suis au monde. Les défauts font partie de moi et je sais que j’ai encore beaucoup à travailler.
Mon univers musical est donc inspiré de plusieurs choses, je suis fan de prog, de structures alambiquées mais aussi de grande simplicité et de minimalisme. Les Pink Floyd pour moi arrivent à manier complexité, minimalisme et perfection. Je suis encore et peut-être resterai toujours en admiration devant ce groupe…

Mélange de styles, de textures, d’ambiances, de sonorités, le tout porté comme un fil conducteur par ta voix …
Cet opus ne pourrait-il pas être envisagé comme un voyage ?

Effectivement c’est une belle piste, j’ai cherché à voyager en moi-même et j’adore l’idée qu’il puisse permettre aussi de voyager autrement, chacun à sa manière, à l’écoute des musiques.
C’est en ce sens-là que je rejoins l’idée de voyage, je pars de mon ressenti brut et intérieur mais je ne l’affirme jamais concrètement. Mes textes et la musique aux allures mystiques sont conçus pour questionner mon rapport aux autres et au monde, au final je demande aussi aux autres et vous, que pensez-vous de tout ça ? Comment voyagez-vous ?

Time, money and fear est une chanson en deux parties. La première est la seconde tracks de l’album, ambiante et lourde et la seconde l’avant-dernière track, psychédélique, dérangée, mais plus chaude.
Qu’as-tu voulu exprimer par cette construction ?

C’est peut-être cette construction le fil rouge de l’album : de la lourdeur, de la profondeur, du désespoir, le lancement d’un appel à l’aide et puis une réponse…
Une réponse chaude, dérangée, psychédélique mais aussi joyeuse avec les rires de fin qui montrent que, malgré les épreuves, le chemin peut lui aussi être joyeux.

La dernière piste se nomme « The End », et, au-delà d’avoir un titre évocateur, c’est aussi dans un style bien différent que l’on te retrouve, plus industriel, sombre et « moderne ». Mais du coup, c’est la fin de quoi exactement ?

Je suis ravi que tu me poses la question ! J’espère que le clip de cette chanson pourra t’aiguiller !
« The end », c’est l’étrange questionnement entre monde interne et monde externe. Comment voyons-nous et observons le monde quand notre propre monde interne est dévasté ? Je me suis aperçu que quand ça allait mal, ce qui se passait dans le monde venait me prendre au tripes et que partageais étrangement cette souffrance avec mon ressenti intérieur.

« The End » débute par l’écriture de ce texte :

« Le monde s’en va en peine, tourbillonnant de douleurs et d’isolement.
La machine jamais ne s’arrête et dans ses débâcles sans fin entraîne avec elle la face de l’homme.
La face cachée du vice, les entrailles du péché inondent les tranchées de nos âmes.
C’est une question : Est-ce la fin ?
Au rythme infernal des cerveaux anéantis de marasmes et de soumission mon cœur saigne, et le tien ?
Dans une cadence effrénée les usines macabres ensanglantées d’innocence ne peuvent s’arrêter, elles frappent de leurs sorts, les morts déjà appareillés pour vivre la catastrophe.
Le ciel s’assombrit, seule une ombre jaune, opaque contemple la face du monde.
Le vivant n’a plus ses lois, le creux de nos esprits se remplit et nous laissons place à la fin.
Mais pour autant est-ce la fin ?
 »

Donc effectivement l’interrogation est là : Est-ce la fin du monde ou est-ce la fin de mon monde interne ? De notre monde interne ?

A l’écoute de cet album, on en ressort avec la sensation d’une mise en abîme d’une partie de toi-même, de tes émotions et sensations, de quelque chose de très personnel et intime, que d’ailleurs tu revendiques.
Ce n’est pas trop difficile de se mettre autant à nu ?

En effet ce n’est pas chose évidente surtout quand on prend conscience que l’on s’est beaucoup caché par le passé …
En tout cas je ne regrette pas cette mise en abîme, c’est un tournant de vie pour moi cet album et j’apprends que se mettre à nu fait du bien. Comme une noix, c’est une en se brisant que l’on peut voir notre intérieur. Je pense aussi que ce sont les personnes que je rencontre et qui m’accompagnent dans mon travail qui m’ont montré cette force : « Vas-y, met toi à nu, cesse de te mentir et exprime ce que tu as a traversé, tu t’en sentiras d’autant plus vivant… »

J’ai écouté une interview que tu as donné (ndlr : United Rock Nation, 12 février 2021) où tu décris la signification de l’album au travers de grands thèmes comme « l’accès à la paternité et sa déconstruction, l’argent, la peur, celle du monde (mais aussi de nous-même), de notre monde intérieur aliéné par des choses, comme le concept du temps ».
Tu as notamment évoqué le fait d’avoir écrit une partie des chansons pendant le premier confinement.
Peux-tu m’en dire plus ?

C’est une période en effet où beaucoup de choses ce sont mélangées. Je ne rentrerai pas forcément dans les détails intimes mais j’ai dû déconstruire et apprendre à gérer beaucoup d’émotions fortes en même temps. A ce moment-là, j’ai ressenti comme une pesanteur du temps, de l’argent et de la peur.
Le confinement venant s’ajouter à ça, je n’ai pas trouvé d’autres moyens que de mettre tout ça en musique !

Son plutôt « oldie », production moderne. Pourquoi ce choix ?

Peut-être pour évoquer que dans la réalité profonde, le Temps n’existe pas ! Les époques se mélangent, les sons se mélangent et étrangement quelques fois prennent forment dans ce qu’on nomme une chanson ou « passation ».

Et pour finir, tu écoutes quoi en ce moment, tes coups de cœur ?

En ce moment je suis toujours en boucle sur le dernier album de Fontaines Dc : A Heroes’death.
Ah j’ai aussi découvert un petit groupe très sympa : « Magon » (Une Pop un peu underground, esprit velvet et Lou Reed)
Mes potes de Seven Levels vont enregistrer un album, j’écoute aussi leurs maquettes en boucle, ça promet grave !
Sinon, toujours les classiques…

Merci Lewis pour ton temps et au plaisir de te voir prochainement sur scène !

Merci à toi de t’être intéressée en profondeur à l’album ! A bientôt sur scène je l’espère grandement !

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