Sons of Otis – Isolation

Le 16 octobre 2020 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


Ken Baluke : guitares, chant Frank Sargeant : basse Ryan Aubin : batterie

Style:

Doom Stoner

Date de sortie:

16 octobre 2020

Label:

Totem Cat Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10

« Mais, vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bonne ou de mauvaise situation. Moi, si je devais résumer ma vie aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres, des gens qui m’ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, où j’étais seul chez moi. Et c’est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destinée… Parce que quand on a le goût de la chose, quand on a le goût de la chose bien faite, le beau geste, parfois on ne trouve pas l’interlocuteur en face, je dirais, le miroir qui vous aide à avancer. Alors ce n’est pas mon cas, comme je le disais là, puisque moi au contraire, j’ai pu ; et je dis merci à la vie, je lui dis merci, je chante la vie, je danse la vie… Je ne suis qu’amour ! Et finalement, quand beaucoup de gens aujourd’hui me disent « Mais comment fais-tu pour avoir cette humanité ? », eh ben je leur réponds très simplement, je leur dis que c’est ce goût de l’amour, ce goût donc qui m’a poussé aujourd’hui à entreprendre une construction mécanique, mais demain, qui sait, peut-être seulement à me mettre au service de la communauté, à faire le don, le don de soi… » Otis.

Comment? On ne parle pas de cet Otis? Ah merde, il y a confusion… Je m’excuse, j’ai manqué cruellement de bienséance en citant ce grand acteur français qu’est Otis. Euh… Putain! Comment il s’appelle déjà? Edouard Baer!
En vrai, peu le sachent (dédicace une fois n’est pas coutume à Cassie di Carmilla qui se morfond sans concert à reporter), mais Otis est un démon. Un démon qui est érigé au dix-septième rang hiérarchique dans la Goétie, l’art divinatoire pour invoquer les démons. C’est le moment de citer Wikipédia : « Le Lemegeton le mentionne en 17e position de sa liste de démons. Selon l’ouvrage, Botis (Otis) est un grand président et un duc des Enfers. Il a l’aspect d’une horrible vipère aux grandes dents mais peut aussi prendre une forme humaine sous l’aspect d’un magicien possédant deux cornes et une épée à la main. Il est un devin connaissant le passé et l’avenir. Il peut réconcilier amis et ennemis. Il commande à 60 légions infernales. » Voilà, et je dois dire que je suis plutôt étonné de voir qu’un groupe dans le style présentement chroniqué ici, utilise les invocations démoniaques pour obtempérer leur musique. Nous allons donc parler de la progéniture d’Otis et de leur dernier album appelé Isolation. **pas faire de blague pourrie**

Huit ans! Huit ans que l’on attendait un prochain album pour les canadiens de Sons of Otis! Ne vous méprenez-pas, je ne suis ni un grand connaisseur du trio de Toronto, ni un grand fanatique. Mais j’étais tombé totalement par hasard, un jour, sur leur album Spacejumbofudge et sa pochette étonnante de la nébuleuse de Tête de Cheval qui fascinait à l’époque (1996) le jeune enfant féru d’astronomie que j’étais. Je n’avais pas écouté l’album d’ailleurs avant l’année 2008 soit douze ans après sa sortie. Pour le reste, Sons of Otis est à l’origine de sept albums en comptant ce dernier, deux EPs, un split avec le groupe Queen Elephantine et un album live qui date de 2018. Il faut savoir, pour comprendre que cette discographie est un peu restreinte, que le groupe existe depuis 1992, quand-même! Comparé à d’autres, oui. La discographie est moindre, mais intéressante. Et si je m’extasie quelque peu pour cette sortie d’album, c’est d’une part à cause de la longévité entre Seismic sorti en 2012 et le présent album, et d’autre part parce que, pour les raisons évoquées plus haut, Sons of Otis a toujours eu une petite part dans mon cœur, un peu comme un souvenir d’enfance. Voyons si cette dernière galette tient toutes ces promesses.

Et qui dit dernière galette, dit non pas les rois et les reines, mais pochette! Et on n’est pas si loin que ça des confins de l’espace avec cet artwork assez… Planétaire. On a de fait un paysage de cratères rouges, qui fait irrémédiablement penser à Mars, et un œil géant qui évoque en quelque sorte le Soleil avec ces éruptions lumineuses puissantes. C’est un peu bizarre comme idée, je ne vois pas tellement l’intérêt mais au moins, l’image est belle. Le rouge flamboyant comme cela fait toujours son petit effet et comme je disais, me fait penser à cette fameuse pochette qui datait si bien. Cela démontre également une sorte d’ambiguïté dans la musique qui est présentée, parce qu’on a rarement l’habitude de voir un tel concept dedans, même si le cynisme est de mise selon moi avec cet œil gigantesque qui représenterait facilement l’emprise de l’Homme sur son environnement et sa soif inconsciente ou non de destruction. Il faut savoir qu’une étoile aussi grosse et aussi fortement lumineuse est au stade de ce que l’on nomme une étoile géante rouge, qui happe donc tout ce qui gravite autour, avec lenteur puisqu’une étoile ne grossit pas rapidement. Imaginez donc cette planète rouge qui voit le Soleil gonfler et devenir rouge, et se rapprochant irrémédiablement là encore pour la détruire. Bref, ne tombons pas dans le fatalisme à outrance. Je dirais donc que ce design est intéressant dans sa conception, avec un côté old school qui colle très bien avec le logo lui-même old school du groupe, et qui donc mérite tout notre intérêt.

Je lève le suspense assez rapidement après l’écoute initiale de l’album : il s’agit de doom metal avec toutefois un détail qui change un peu la donne, les nuances stoner. L’originalité de la musique doom est de proposer des atmosphères à elle toute seule, avec cette distorsion importante des cordes et la batterie qui amène une rythmique marquée mais aussi une ambiance. Sons of Otis propose aussi des introductions de morceaux qui ajoutent un côté très pesant, presque inquiétant. L’utilisation de riffs stoner donne un côté très original, comme une sorte de rock atmosphérique, et je dois dire que la première écoute me laisse une impression … D’être impressionné. Il y a vraiment un truc en plus dans cet album, une originalité musicale comme j’en ai rarement entendu depuis. Je parlais de riffs pesants mais ils sont plutôt « agréables » à entendre, contrairement à beaucoup de groupes doom qui jouent sur l’aspect noir de leur musique. Là, c’est un subtil mélange du côté positif du stoner, et de la lourdeur extrême du doom, et j’adore! A noter toutefois que l’étiquette exacte ne devrait pas être « stoner doom » mais « doom stoner » tant le doom metal est largement usité et envahissant, plus que le stoner. La première écoute m’a déjà largement convaincu d’avoir un très très bon CD.

Passons à la production. C’est probablement la grande force de cet album, et pour avoir écouté les autres, de toute la discographie : le côté vintage et presque totalement analogique. J’ai senti de suite que l’atmosphère très céleste de cet album relevait du son, parce que si l’on passe outre quelques secondes la lenteur des instruments induite par le genre doom, la lourdeur est inhabituellement peu présente dans le spectre sonore. Le son ne prend pas toute la place comme j’ai pu entendre dans les dernières sorties du genre doom death, donc j’ai été légèrement surpris par ce son plus léger, plus old school que je retrouverais probablement plus dans les CDs de doom metal classique. Comme le groupe cultive dans son imagerie un aspect plutôt vintage, y compris dans les photos du groupe, cela ne m’étonne guère au final. Et comme ce son se marie bien, lenteur comprise, avec les riffs très stoner, cela donne un album plus que satisfaisant à l’oreille. Un savoureux mélange entre la lenteur du doom et un son plus aérien, plus spatial et donc sans jeu de mot qui occupe moins l’espace, le tout saupoudré de riffs stoner, et d’ores et déjà je place l’album Isolation comme un très grande sortie de l’année dans le genre.

Après plusieurs écoutes, je suis en mesure de dire que le CD s’écoute sans lassitude. La faute donc à cette production old school, mais aussi je trouve à la composition logique des pistes. Tout s’enchaîne avec aisance et même la longueur plutôt étendue des titres ne parvient pas à nous détacher de l’écoute. Je pense que ce serait désobligeant de ne pas mentionner l’expérience du groupe, vu les années d’existence et le nombre de skeuds sortis, donc en soi rien d’anormal à avoir un CD d’une grande intelligence et d’une logique imparable. C’est juste… Plaisant. Plutôt que de devoir gouter des CDs très pompeux par leurs constants changements de riffs ou d’ambiances, vous avez une seule et même entité non-morphologique dans cet album. Un tout, voilà ce qui selon moi, fait la réussite incontestable d’un album! Et manifestement, tout est réuni pour faire d’Isolation une œuvre unique et sans faille aucune dans son écoute. Gros point fort qui se situe en plus dans les riffs stoner que dans l’hyper lenteur rythmique et qui, plutôt que de se montrer oppressants, deviennent agréables.
Tout se suit et se ressemble dans mon analyse ce qui est rare je dois dire tant j’ai parfois la maladive tendance à chercher LA démarcation. Et ici, l’expérience fait parler le talent, ou l’inverse! Les musiciens sont tous aussi talentueux les uns que les autres, à n’en pas douter. Creuser davantage cette évidence même serait un sacrilège, aussi vais-je me contenter de constater à quel point la maitrise instrumentale est au rendez-vous. A ne toutefois pas faire de raccourci entre l’expérience qui serait gage certaine de talent car ce n’est pas toujours le cas, loin s’en faut.

Autant j’ai mentionné les riffs stoner pour démarquer le style couplé de l’album de Sons of Otis, autant le chant n’est pas la dernière roue du carrosse. Particulièrement enrayé, limite un peu « Lemmy » sur les bords, mais avec encore une fois cette hyper lenteur et ces différents effets dessus qui retrouvent l’idée de balancer de l’atmosphérique à foison. Il varie relativement peu mais qu’importe! Les riffs étant très old school, je pense qu’il était envisageable d’avoir un chant de la même trempe, donc en soi tout est encore une fois raccord. Je sais que ce type de voix s’acquiert souvent beaucoup de boulot, et le groupe existant depuis longtemps, il était normal que je remarque à quel point la technique est niquel chrome. Je trouve d’ailleurs que le chant n’est pas trop présent et laisse donc une large place à l’ensemble instrumental si caractéristique. Encore une fois, je me répète mais du gros talent et du gros boulot pour tous les compartiments et le chant ne fait pas exception.

On pourrait se demander, pour finir la chronique, jusqu’où pourrais-je aller dans les compliments pour définir un album? Je crois que la question, comme dirait l’une des nombreuses perles du Net qui fait le buzz par sa connerie « elle est vite répondue ». En fait, il arrive parfois que l’analyse soit redondante et je pense que dans le cas de Sons of Otis, et de leur dernier album Isolation, l’analyser de trop finirait presque comme une insulte. Aussi, vais-je me contenter de vous conseiller de faire comme moi : de fermer les écoutilles, débrancher les neurones, arrêter de prendre trop de caféine ou d’amphétamines (non j’en prends pas!) et juste, de vous laisser porter par la musique. C’est aussi simple que cela, et cet album est probablement l’un des meilleurs pour se laisser aller à l’imaginaire et l’ataraxie. Très bon album, bluffant mais finalement moins quand on se rappelle que Sons of Otis est surement un des pionniers du genre. Sinon, qu’ils le deviennent! Avec cet album c’est largement mérité!

Tracklist :

1. Hopeless
2. JJ
3. Trust
4. Blood Moon
5. Ghost
6. Theme II

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